Retraites des médecins : réserves sauvegardées, inquiétudes préservées…

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Édouard Philippe a annoncé hier que les réserves resteront dans les caisses des professionnels concernés. Une déclaration qui n’a pas suffi à lever les inquiétudes du SML et de l’UMFL-S.

Retraites des médecins : réserves sauvegardées, inquiétudes préservées…

« J’ai parfaitement entendu les craintes des représentants des professionnels libéraux sur le sujet des réserves », a déclaré hier Édouard Philippe qui présentait son système universel de retraite. Et d’ajouter que « les réserves resteront dans les caisses des professionnels concernés ».
 
Celles-ci auront vocation, notamment, « à accompagner la transition vers le système universel au bénéfice des auxiliaires médicaux, avocats, et médecins concernés », a poursuivi le Premier ministre, qui en a tiré la conclusion suivante : « Pas de hold up, pas de siphonage pour combler tel ou tel trou, tel ou tel déficit. Ce n’est pas notre conception de la gestion de l’argent des Français, et ce n’est pas notre projet. »
 
Pour rappel, plusieurs syndicats représentatifs des médecins libéraux (CSMF, FMF, Le Bloc, MG France, SML, UFML-S) avaient exprimé leur vive inquiétude sur la réforme des retraites. Ils craignaient notamment une baisse des pensions et la remise en cause du régime complémentaire.

Réserves évaluées à neuf ans de prestations 

Les syndicats s’interrogeaient aussi sur le devenir des réserves de la Carmf (Caisse autonome de retraite des médecins de France) qui sont « constituées par plusieurs générations de médecins » et « évaluées à 9 ans de prestations », selon le Syndicat national des médecins concernés par la retraite (SN-MCR).
 
Des cotisations qui ont permis « de mettre en réserve des sommes importantes nécessaires pour l’équilibre des régimes dans un contexte démographique difficile », rappelait également MG France qui ne pouvait imaginer que ces réserves finissent un jour par échapper aux médecins.
 
Le discours d’Édouard Philippe a donc sûrement en partie rassuré les syndicats représentatifs des médecins libéraux sur la question des réserves. Le SML a pris acte des annonces du Premier ministre, relevant que « les réserves constituées par les médecins libéraux resteront dans la profession et permettront de financer la période de transition entre l’actuel et le futur régime universel au profit de ceux qui les auront constituées », précise un communiqué daté du 12 décembre.

Les caisses complémentaires condamnées ?

Autre préoccupation du syndicat : la fixation d’un périmètre à 3 PASS, soit environ 120 000 €, « condamne les caisses complémentaires des professions libérales dont la CARMF avec ses services, ce qui nécessite la création d'une structure de médiation entre les différents acteurs du régime universel ».
 
Le SML observe que « la gouvernance du RU (régime universel, NDLR) sera confiée aux partenaires sociaux, mais sous contrôle strict de l’État ». Le SML souhaite que les médecins libéraux y soient représentés, tandis qu’une réforme de l’assiette de cotisation à la CSG est programmée.
 
Enfin, « le dispositif prévu conduit à une baisse de la pension de retraite des médecins libéraux dans une proportion qui sera plus importante que la baisse de cotisation annoncée », avertit le syndicat qui exige que les médecins libéraux puissent « compléter leur retraite par un dispositif défiscalisé de type « PREFON » afin de construire des retraites dignes ».

C’est Ubu au gouvernement

Quant à l’UFML-S, il a réagi le 11 décembre à l’intervention du Premier ministre sous la forme d’un communiqué : « Les réserves des professions libérales et indépendantes vont être utilisées et détournées de leur fonction sans notre accord (au départ une fonction de pensions) pour permettre une transition vers un système universel . Elles vont donc servir à payer une partie des cotisations générales ! ».
 
En clair, « on veut nous faire rentrer dans un système où des cotisations vont payer des cotisations ! C’est Ubu au gouvernement… », poursuit l’UFML-S qui fait allusion à Ubu roi. Dans cette célèbre pièce de théâtre d'Alfred Jarry, le père Ubu « incarne tous les vices les plus primaires, avec une cruauté enfantine. C’est le symbole de la cupidité des hiérarchies politiques, l’absurdité de vouloir toujours tout. Il est très avare », dixit Wikipedia.
 
Par ailleurs, « nous sommes dans une étatisation de nos systèmes, jusqu’à maintenant, autonomes, car nos professions ont fait, en conscience, le choix de l’indépendance. Cette étatisation forcée est à l’opposé de notre indépendance (qui protège le patient) et nous n’en voulons pas », conclut le syndicat.

Nouvelle journée d'actions le17 décembre

Quant au Dr Jérôme Marty, le président de l’UFML-S, il a déclaré sur Twitter : « Que ce soit clair, nous n’acceptons pas la #ReformeRetraites » Et d’ajouter : « Le Premier Ministre ne veut pas de communication guerriere...Nous irons pourtant à l’affrontement... »

Pour avoir un avant-goût de la poursuite du mouvement dans le secteur de la santé, il va falloir attendre la réaction des autres syndicats. À l’heure où nous écrivons ces mots, ni la CSMF, ni MG France, ni la FMF, ni Le Bloc, n’ont officiellement réagi aux annonces du Premier ministre. Mais, cela ne saurait tarder.
 
En attendant, une nouvelle journée nationale d’actions et de manifestations contre la réforme des retraites est prévue le mardi 17 décembre. La CGT Cheminots a prévenu qu’il n’y aurait « pas de trêve pour Noël ». Quant à la dernière séance de négociation avec les syndicats sur le projet de réforme, elle est prévue le 7 janvier 2020.
 

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