[Poisson d'avril] Rosette, la meilleure amie des pharmaciens

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L’IA contre les erreurs de délivrance de médicaments

[Poisson d'avril] Rosette, la meilleure amie des pharmaciens

Développé par un pharmacien, le logiciel Rosette permet de déchiffrer l’écriture cursive sur les ordonnances médicales. Une avancée qui devrait permettre de réduire les erreurs lors de la délivrance des médicaments.

Elle s’appelle Rosette, mais cette application n’a aucun rapport avec le saucisson. Elle tire en fait son nom de la fameuse Pierre de Rosette, qui a permis à Champollion de décrypter les hiéroglyphes égyptiens. Utilisant l’intelligence artificielle, ce logiciel de reconnaissance d’écriture cursive a été imaginé par Rémi Quadeau, docteur en pharmacie.

Son objectif : permettre aux pharmaciens de comprendre les ordonnances manuscrites, trop souvent illisibles, source d’erreurs de délivrance. Des complications graves ont été rapportées à plusieurs reprises à l’ANSM, liées à la confusion entre le Permixon et le Previscan notamment, entraînant une lettre aux praticiens en avril 2014 des laboratoires Merck et Pierre Fabre sous l’autorité de l’ANSM, appelant à la plus grande vigilance.

Facebook et Champollion pour déchiffrer les hiéroglyphes médicaux

« Après quelques années de pratique, on arrive à déchiffrer la majorité des noms, mais pour les jeunes, c’est dur. Ils doivent parfois demander de l’aide à un sénior, et il arrive même qu’on doive appeler le médecin prescripteur, en espérant qu’il soit joignable. Cela nous fait perdre du temps, et il y a toujours un risque que le médicament délivré ne soit pas le bon », explique le père de Rosette.

Au Québec, un groupe privé de plus de 4000 pharmaciens s’est même constitué sur Facebook pour solliciter l’avis de confrères sur les ordonnances illisibles. « J’ai eu l’idée de Rosette après avoir vu un reportage sur Champollion » se souvient le pharmacien. « Au début c’était une plaisanterie, mais quand j’ai entendu parler des progrès de l’intelligence artificielle et de son utilisation dans la reconnaissance de l’écriture, j’ai compris que ce projet était peut-être réalisable finalement. »

Les tests « in real life » ont déjà commencé

Le Dr Quadeau a alors pris contact avec l’équipe du laboratoire Graphologie & IA et travaillé avec eux sur la base de données des médicaments pour créer Rosette. La non-prescription en DCI, pourtant censée être obligatoire depuis janvier 2015, a augmenté la difficulté. Il a fallu par ailleurs prévoir des mises à jour régulières pour les nouvelles molécules.

Un an, et de nombreux tests plus tard, les résultats sont prometteurs, et la phase de terrain a été lancée : Rosette est en bêta-test depuis mars dans une dizaine de pharmacies d’Ile-de-France. L’étape suivante sera la validation par l’ANSM.

Vers la fin des ordonnances manuscrites ?

L’Etat de New-York a fait passer une loi il y a un an, la loi I-stop, obligeant les praticiens à transmettre par voie électronique les ordonnances aux pharmacies. Une façon de lutter contre le trafic d’opiacés, mais aussi contre les erreurs liées aux ordonnances illisibles. Quand on lui demande s’il n’a pas peur que son logiciel soit déjà obsolète lors de sa mise sur le marché, en raison de l’informatisation des professionnels de santé, Rémi Quadeau s’amuse : « ce serait fantastique ! Sans même parler des logiciels de prescriptions informatisées qui limitent les interactions médicamenteuses ou les erreurs de dose, un simple logiciel de traitement de texte abolirait tout risque d’erreur d’interprétation. Mais il faut être lucide... on en est encore loin en France. »

La bête noire de Rosette : les chirurgiens gauchers

La seule limite de Rosette pour l’instant, ce sont les ordonnances rédigées par les chirurgiens gauchers, heureusement peu nombreux. « Nous avons rencontré des difficultés avec cette population, qui a une manière de tenir son stylo très particulière, combinant les défauts de rédaction des chirurgiens et des gauchers, mais les développeurs travaillent sur ce problème d’arrache-pied » s’excuse Rémi Quadeau.

Source:

Sarah Blagafon

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