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Un constat préoccupant : la France décroche en mortalité infantile
Malgré deux décennies de politiques publiques en santé périnatale, la France ne progresse plus. Pire : en 2023, elle se place au 22e rang européen pour la mortalité infantile, avec 4 décès pour 1 000 naissances vivantes. En parallèle, les événements indésirables graves associés aux soins (EIGS) restent trop fréquents, trop sous-déclarés, et trop peu analysés à l’échelle nationale.
C’est dans ce contexte que la HAS publie, ce 21 mai 2025, la première analyse nationale des EIGS survenus chez les nouveau-nés. Objectif : comprendre les causes, identifier les leviers de prévention, et mieux sécuriser les prises en charge dans les maternités françaises. L’étude s’inscrit dans une dynamique de consolidation de la sécurité périnatale. Comme le souligne la HAS, elle vise à « éclairer sur les circonstances des accidents déclarés, orienter les actions des pouvoirs publics et des acteurs de la périnatalité, et ainsi consolider le niveau de sécurité des prises en charge ».
Ce que dit l’analyse de la HAS : 328 événements graves passés au crible
L’étude repose sur 328 EIGS déclarés entre mars 2017 et mai 2024. Ces événements ont été anonymisés et transmis par les ARS à la HAS. Ils concernent exclusivement des nouveau-nés, dans une période allant de la naissance jusqu’à la première semaine de vie.
Les chiffres clés à retenir :
- 54 % ont conduit au décès de l’enfant (dont 42 mort-nés)
- 31 % ont mis en jeu le pronostic vital
- 15 % ont entraîné un déficit fonctionnel permanent (ex. séquelles neurologiques)
- 57 % des EIGS sont considérés comme évitables ou probablement évitables par les professionnels déclarants
La HAS insiste sur le fait que ces données, en raison de la sous-déclaration persistante des EIGS, « ne présentent pas de valeur épidémiologique ou statistique généralisable », mais permettent tout de même d’ « orienter les actions pour améliorer la sécurité du patient ».
Les causes : de l’erreur individuelle à la faille organisationnelle
Les causes immédiates les plus fréquentes sont :
- Les défauts de surveillance obstétricale, notamment les mauvaises lectures du rythme cardiaque fœtal
- Les erreurs de soins ou d’organisation, dont les infections associées
- Les erreurs médicamenteuses
En parallèle, les causes profondes les plus souvent identifiées touchent :
- Aux patients (état de santé du nouveau-né ou de la mère)
- Aux tâches à accomplir (protocoles absents, incomplets ou mal connus)
- À l’équipe (problèmes de transmission, de coordination, d’alerte)
La HAS rappelle que « l’erreur humaine est fréquente et inhérente à toute activité, a fortiori dans un domaine complexe et en constante évolution comme celui de la santé ». Et de souligner : « La sécurité ne consiste pas à supprimer toutes les erreurs, mais à les réduire autant que possible et à gérer de façon adaptée celles qui surviennent. »
Ce qui est nouveau pour les médecins : des préconisations concrètes
Face à ces constats, la HAS formule 10 recommandations opérationnelles, à destination des équipes médicales et des établissements. Son objectif déclaré : « identifier les causes des EIGS chez les nouveau-nés et en tirer des enseignements afin d’améliorer la gestion des risques par les services et structures concernés ».
Parmi ces recommandations :
- Vérifier systématiquement les compétences techniques et non techniques des équipes obstétricales et néonatales
- Garantir un accès fluide aux données médicales mère-enfant
- Améliorer la qualité de la réanimation néonatale en salle de naissance
- Lutter contre les erreurs de diagnostic et les mauvaises décisions de transfert in utero
- Prévenir les chutes et étouffements en maternité
- Renforcer la sécurité des accouchements à domicile et en maison de naissance
- Améliorer le formulaire de déclaration des EIGS, pour mieux tirer parti des retours d’expérience
La certification des établissements évolue également : deux critères impératifs sont désormais intégrés au 6e cycle de certification par la HAS :
- La prévention des risques obstétricaux majeurs
- La sécurisation de la prise en charge du nouveau-né
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