Le double masque, une fausse bonne idée du CDC

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Pour faire face à la propagation des variants dans le monde, le CDC recommande le port du double masque. Un conseil pertinent sur le plan infectieux mais impossible à mettre en place en population générale selon l’infectiologue Benjamin Davido.

Le double masque, une fausse bonne idée du CDC

Deux, c’est mieux qu’un. Le 10 février dernier, le Centre pour le contrôle et la prévention de maladies (CDC) a publié une nouvelle recommandation concernant le port du masque. Désormais, ce n’est plus qu’un mais deux masques que l’agence de santé publique américaine recommande de porter en population générale. L’un en tissu, l’autre chirurgical.
 
Cette nouvelle recommandation se base sur une de leurs études soulignant que cette association offrirait une meilleure protection contre les aérosols expulsés par la toux. 92,5% des gouttelettes seraient bloquées. À noter qu’une expérience complémentaire a également démontré qu’une personne affublée de deux masques serait protégée à 83 % d’une personne infectée qui a décidé de s’en passer. Une véritable aubaine en période de propagation des variants, plus contagieux, qui s’explique notamment par la multiplication des filtres mais également par l’ajustement de la protection.
 
Des arguments qui n’ont pour autant pas convaincu le Dr Benjamin Davido, infectiologue à l’hôpital Raymond Poincaré de Garches. « Ça a une pertinence d’un point de vue infectieux, mais ça va être compliqué à mettre en œuvre dans la population générale », avance-t-il. Glissement des deux masques, masques en tissus pas tous équivalents mais également véritable tannée à porter… Les freins à la généralisation de cette pratique sont nombreux, selon lui. Un avis partagé par l’organisme d’homologation des masques en France, l’Afnor, qui promeut le port d’un masque confortable pour limiter la tentation de le retirer. « Cela posera certainement un problème de respirabilité, rendant difficile de supporter le masque lors d’une discussion, d’une marche plus ou moins rapide par exemple. La personne s’expose au risque de devoir l’enlever, par inconfort, sans être en mesure de se laver les mains, […] donc en s’exposant à un risque de contamination. », écrit l’organisme sur son site internet.
 
Sans oublier que le port du masque semble encore être un exercice mal maîtrisé par nombre de Français. « Il nous manque peut-être encore un peu de pédagogie sur le port du masque. La première étape est de mieux apprendre à le porter », conseille l’infectiologue, qui rappelle qu’un masque bien mis vaut mieux que deux de travers. « Dans le contexte de la propagation des variants, le fameux masque M95 me semble plus indiqué. Ils sont généralement mieux tolérés », indique-t-il.
 
Dans le milieu médical – à haut risque, cette recommandation pourrait cependant avoir plus de pertinence selon le Dr Benjamin Davido. « À Garches, il nous est arrivé de doubler le masque chirurgical pour plus de filtration ». Selon lui, cette association permettrait d’économiser les masques FFP2 sans sacrifier la sécurité des soignants. Un « truc et astuce » qui ne doit cependant pas virer à l’obligation.  « Si on veut protéger les soignants, il faut tout faire pour tendre vers une protection maximale. Mais, il faut que cela reste optionnel et pas punitif », assure l’infectiologue. Cette recommandation dévie tout de même quelque peu de l’avis initial de l’agence de santé américaine qui ne conseille pas le port d’un double masque jetable. « À l’hôpital, c’est quand même plus hygiénique de porter deux masques qu’on peut jeter après », balaye le spécialiste.
 

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