Lanceur d’alerte à l’hôpital : un poids trop lourd à porter ?

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Retour sur l’affaire du CH de Saint-Malo, avec celui qui l’a révélée

Lanceur d’alerte à l’hôpital : un poids trop lourd à porter ?

Il y a quelques semaines, le Pr. Christian Marescaux comparaissait devant le tribunal correctionnel de Strasbourg à l’initiative de son employeur, le CHU de la même ville. L’établissement l’accuse de diffamation. L’objet du litige ? Les avertissements lancés depuis plusieurs années par ce PU-PH, qui constatait l’indisponibilité des appareils d’imagerie et de radiologie de l’hôpital, accaparés selon lui par la patientèle privée.

Voilà qui a valu au Pr. Marescaux, d’après le site Rue89, d’être déchargé de toutes ses responsabilités et de ses gardes. Cette affaire a donné à « What’s Up Doc » l’envie de donner la parole à un autre lanceur d’alerte malheureux : le Dr. Jean-Jacques Tanquerel, ancien médecin DIM du CH de Saint-Malo, qui avait publié une tribune dans nos colonnes il y a un an.

« Je suis au placard depuis deux ans »

On commence par prendre des nouvelles. Elles ne sont pas bonnes. « Je suis au placard. Je suis dans un bureau, je n’ai rien à faire. Je ne suis convié à aucune réunion, je n’ai aucune mission, je n’ai aucun coup de fil ». Contacté par « What’s Up Doc », le CH de Saint-Malo n’a pas été en mesure de nous passer quelqu’un capable de préciser quelles étaient les fonctions actuelles du Dr. Tanquerel.

Il faut dire que les relations de ce dernier avec son employeur sont plutôt tendues. Il y a un an et demi, celui qui était alors le médecin DIM de l’établissement avait publiquement dénoncé les pratiques d’une société de conseil employée par l’hôpital pour optimiser le codage des actes. Les membres de cette entreprise avaient d’après Jean-Jacques Tanquerel directement accès aux dossiers des patients, couverts par le secret médical.

« Je n’ai jamais réussi à faire passer ce message localement », regrette-t-il. Il s’est donc tourné vers l’extérieur, ce qui n’a pas été du goût de tout le monde. Il se souvient notamment d’une CME particulièrement houleuse : « Je me suis fait lyncher pendant une heure et demi. On m’a traité de tous les noms. Cela allait du malade psychiatrique à l’incompétent. J’avais l’impression d’être dans une arène, au cirque. J’en suis sorti dépité, déprimé ».

« Je n’ai pas d’explication »

Résultat : des vacances forcées. « On m’a interdit de revenir au DIM. Cela fait deux ans. J’ai reçu au début de la semaine une décision du directeur me nommant sur un poste à l’hygiène hospitalière. La question que je voudrais lui poser, c’est : "J’étais où, avant ?" ».

Les conséquences de cette affaire pour le Dr. Tanquerel ne s’arrêtent pas là. « J’ai déposé plainte pour harcèlement moral », explique-t-il. Il a reçu un avis de classement de l’affaire, mais il veut poursuivre son action : « Je vais continuer, je n’ai pas le choix ».

Et quand on lui demande ce qu’il faudrait faire pour protéger les lanceurs d’alerte à l’hôpital, il reste sans solution. « Il existe normalement des mécanismes de régulation. Il y a des lois, des règlements… Il faudrait que cela fonctionne, et on voit que ça ne fonctionne pas du tout. Je n’ai pas d’explication ».

Source:

Adrien Renaud

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