« Il n’y a pas de lobby pour les grand-mères essoufflées »

Article Article

Bernard Jomier : un médecin en politique, un politique en médecine

« Il n’y a pas de lobby pour les grand-mères essoufflées »

Bernard Jomier, adjoint écologiste à la maire de Paris, chargé de la santé, du handicap et des relations avec l’AP-HP, est aussi généraliste. Comment concilie-t-on médecine et politique ? Rencontre avec un véritable #DocteurGreen.

 

« Avec un mandat d’adjoint à la maire de Paris, si on est raisonnable, on ne fait rien d’autre », lâche le Dr Bernard Jomier à What’s up Doc, venu lui rendre visite à l’Hôtel de Ville. Il faut croire que l’adjoint écolo d'Anne Hidalgo n’est pas raisonnable : il garde deux plages hebdomadaires de trois heures dans son cabinet de groupe du 19e arrondissement.

« Mon métier c’est d’être médecin, ça n’est pas la politique », confie le généraliste comme pour s’excuser. « Mais on n’est pas vraiment soignant si on ne regarde pas ce qui se passe en dehors de la salle de consultation ».

La continuation de la médecine par d’autres moyens

Un constat en forme de ligne de conduite. Car à en croire Bernard Jomier, la politique serait en quelque sorte la continuation de la médecine par d’autres moyens. « Un médecin de quartier voit beaucoup de choses », constate-t-il. « S’il ne dit pas ce qu’il voit, qui va le faire ? Il n’y a pas de lobby pour les enfants qui toussent ou pour les grand-mères essoufflées ».

Depuis qu’il s’est installé à Paris, Bernard Jomier est donc très impliqué dans la vie de son quartier. Et en 2001, c’est d’ailleurs cet engagement qui lui a valu une proposition inattendue : une place sur la liste écologiste aux municipales. « Je ne suis pas né écologiste », se défend-il presque. « J’ai juste constaté que je voyais toujours les écolos dans les combats que je trouvais importants. Bref, j’ai accepté ».

Politique et déterminants de la santé

Le voici donc bombardé adjoint au maire du 19e, en charge de la santé. Ce mandat le mènera, une dizaine d’années plus tard, au poste qu’il occupe actuellement auprès d’Anne Hidalgo. A ces fonctions, il aura un mantra : la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé, et la santé environnementale. Parmi ses faits d’armes : la lutte contre le saturnisme dans les logements insalubres avec une enquête menée dans un îlot du quartier, l’appel des médecins de Paris pour dénoncer les effets de la pollution atmosphérique sur les patients qu’il reçoit…

« Je crois qu’une grande partie de notre état de santé est fondée sur des déterminants vieux comme le monde », explique l’élu. Et celui-ci de citer « la nourriture qu’on mange, l’air qu’on respire, la manière dont on se déplace… » Autant de facteurs qui doivent pousser le médecin à mettre le nez dehors.

Un soignant doit faire émerger les difficultés qu’il rencontre

Et qu’on ne lui oppose pas le fait que des praticiens aux salles d’attentes blindées ont déjà fort à faire à l’intérieur de leur cabinet. « Le cadre d’exercice, les revenus, les conditions de travail, tout cela est essentiel pour que le médecin remplisse sa mission », concède-t-il. « Mais on ne peut pas opposer ces questions à la nécessité absolue pour un soignant de faire émerger les difficultés qu’il rencontre ».

Mais alors, on fait comment ? « Bien rémunérer les médecins, ça n’est pas forcément poursuivre la rémunération à l’acte », avance l’élu qui se dit en faveur d’une augmentation de la part forfaitaire dans le revenu des praticiens. Un sujet d’actualité à l’heure des négociations conventionnelles qui se tiennent jusqu’à l’été.

What’s up Doc a entamé une série de portraits sur les médecins en politique. Pour lire le deuxième épisode sur Jacqueline Fraysse, députée Front de gauche et cardiologue, c’est par ici.

Source:

Adrien Renaud

Les gros dossiers

+ De gros dossiers