Ibode : le spectre de la paralysie des blocs opératoires ressurgit

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À cinq semaines de l'entrée en vigueur du décret conférant des actes exclusifs aux Ibode (infirmières de bloc opératoire diplômées d'État), l’UCDF et le Bloc appellent le gouvernement à mettre en place de nouvelles mesures transitoires, pour permettre la poursuite de la totalité de l'activité opératoire dans les hôpitaux et les cliniques.

Ibode : le spectre de la paralysie des blocs opératoires ressurgit

« Nous sommes dans une situation rocambolesque, car il y a 15 000 infirmiers de diplôme général exerçant au bloc opératoire qui ne pourront pas faire d’actes au 1er janvier », enrage le Dr Philippe Cuq, président de l'Union des chirurgiens de France (UCDF) et co-président du syndicat Le Bloc.
 
À cinq semaines de l'entrée en vigueur du décret du 27 janvier 2015 qui donne des actes exclusifs aux Ibode (infirmières de bloc opératoire diplômées d'État), l’UCDF et le Bloc appellent le gouvernement à mettre en place de nouvelles mesures transitoires, pour permettre la poursuite de la totalité de l'activité opératoire dans les hôpitaux et les cliniques.
 
L’histoire semble malheureusement se répéter, puisque les deux syndicats s’étaient déjà mobilisés en avril dernier pour réclamer « la validation massive des actes exclusifs pour les infirmiers diplômés d’État (IDE) en poste de façon à disposer d’assez de personnels pour opérer dans des conditions légales à partir du 1er juillet 2019 ».

Une situation ubuesque

Les chirurgiens et les anesthésistes déclaraient à l’époque se retrouver « dans la situation ubuesque de ne plus pouvoir exercer leur métier à compter du 1er juillet 2019 dans les nouvelles conditions requises par la réglementation ».
 
L’UCDF et le Bloc avaient donc menacé de paralyser les blocs opératoires, ce qui avait fini par payer car le gouvernement avait publié un décret qui reportait au 1er janvier 2020 l'entrée en vigueur de trois actes exclusifs aux IBODE (l'aide à l'exposition, l'hémostase et l'aspiration).
 
Pour continuer à exercer au bloc opératoire, l'infirmière (non Ibode) avait jusqu’au 31 octobre 2019 pour s'inscrire à une épreuve de vérification des connaissances, avant de la valider par la suite. Pour passer ces épreuves, elle devait avoir rempli trois conditions au préalable : être en poste d’IDE (Infirmier diplômé d'État) de bloc opératoire au 30 juin 2019, avoir un temps plein d’un an à cette date et réaliser ces trois gestes (une aide à l'exposition, à l'hémostase et à l'aspiration) de manière régulière.

Une dizaine d’actes exclusifs

Sauf que « les mesures transitoires que nous avions demandées n’ont pas résolu le problème, car elles sont réservées à trois actes uniquement», explique le Dr Philippe Cuq. Or, à partir du 1er janvier 2020, « les actes exclusifs réservés aux Ibode concerneront une dizaine d’actes qui sont aujourd’hui pratiqués par les IDE. Comme, par exemple, tenir le fil d’un surjet (d’une suture) qui permet de faire la couture de l’artère ou de la prothèse par exemple. Cet acte sera désormais uniquement réservé aux Ibode », poursuit le Dr Philippe Cuq.
 
En clair, les infirmiers (non Ibode) qui étaient formés à faire cette dizaine de gestes depuis plusieurs années ne seront plus autorisés à les faire à partir du 1er janvier 2020. Seuls les Ibode pourront les faire. Ce qui fait dire au Dr Philippe Cuq que « le système sera bloqué puisqu’il n’y a pas assez d’infirmiers diplômés d’Ibode en France pour pouvoir faire fonctionner les blocs opératoires ».

Insécurité juridique

Celui-ci considère donc que « nous sommes dans une situation d’incurie administrative. Tout le monde est aujourd’hui dans l’insécurité juridique et on se demande si on pourra continuer à opérer en janvier 2020 »,
 
Par ailleurs, l'organisation des blocs opératoires demande plusieurs semaines d'anticipation de programmation des opérations, de préparation des patients et d'organisation préalable des plannings pour les personnels infirmiers, expliquent UCDF et le Bloc qui estiment qu’il est « inacceptable d'attendre les derniers jours pour annuler ou repousser les interventions des patients ».
 
Et le Dr Philippe Cuq de compléter : « Nous sommes engagés auprès des patients. Notre responsabilité, c’est de les opérer si l’on veut éviter les pertes de chance pour les patients. »

Une catastrophe pour les patients

L’UCDF et Le Bloc appellent donc le gouvernement « à régler l'insécurité juridique qui se profile dans les blocs opératoires au 1er janvier 2020, en prenant au plus vite les mesures nécessaires »
 
Si tel n’était pas le cas, « cela serait une catastrophe pour les patients, met en garde le Dr Philippe Cuq. Nous sommes alertés par nos assureurs qui nous disent « attention, vous ne pouvez pas travailler avec des infirmières qui n’ont pas le diplôme d’Ibode ». Donc on est coincés, on est dans une situation extrêmement difficile ».
 
Et si la situation n’était pas réglée dans les semaines qui viennent ? Il y aurait à coup sûr « des catastrophes, des reports et des annulations d’interventions prévues en janvier 2020 », met en garde le Dr Philippe Cuq.
 

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