Blouses blanches, nuits blanches

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Les soignants sont de petits dormeurs

Blouses blanches, nuits blanches

Une enquête du Réseau Morphée sur le sommeil des soignants pointe, sans grande surprise, des habitudes différentes du reste de la population : 60 % d’entre eux déclarent dormir moins de 6 heures par nuit.

Journées de consultation à rallonge, gardes, horaires décalées… Les professions médicales exposent les soignants à des contraintes temporelles particulières. Et, logiquement, ces contraintes ont des conséquences sur leur vie hors de l’hôpital ou du cabinet, et notamment sur le sommeil.

Une enquête en ligne du Réseau Morphée, spécialiste de la prise en charge des troubles du sommeil, relayée par Le Quotidien du Médecin, montre des habitudes de sommeil inquiétantes. Les professionnels de santé passent en moyenne 6 heures par jour sous la couette, contre 6h45 en moyenne pour le reste de la population française.

Les médecins sont des warriors

L’étude repose sur un questionnaire en ligne auquel 880 soignants (infirmiers et médecins) âgés en moyenne de 42 ans ont répondu entre janvier et septembre 2017. Elle n’est pas exhaustive ni randomisée, et donc pas à l’épreuve des balles, mais montre quelques tendances (à noter que 82 % des sondés étaient des femmes). Les participants sont ainsi 60 % à déclarer dormir moins de six heures en semaine, au lieu des sept recommandées, au minimum. C’est 15 points de plus que la moyenne des Français.

Une question d’habitude ? Pas forcément, à en croire leur ressenti. La moitié des soignants ressentent ce manque de sommeil, et l’attribuent à leur travail. C’est un peu moins chez les médecins (40 %), qui sont plus résistants ou font les malins, et plus chez les infirmiers (70 %). Et parmi ceux qui dorment moins de six heures, cette part monte à 75 %.

24 heures, c’est trop court

Certains, comme Michael, chirurgien de 33 ans contacté par What's up Doc, gèrent plutôt bien, et ne souffrent que ponctuellement d’un léger manque de sommeil. Il suffit d’une petite sortie un peu tardive pour que la fatigue s’installe. « Comme tout le monde, je pense ». Il dort en moyenne entre 6h et 7h30 par nuit, ce qui le place du côté des plus sérieux, mais tout de même légèrement en dessous de ses besoins, reconnaît-il.

Pour d’autres, qui sont biologiquement de gros dormeurs, la gestion peut être beaucoup plus délicate. Comme pour Sara, interne en 1ère année de MG qui, idéalement, a besoin de neuf heures par nuit. « Pour l’instant, je suis aux Urgences avec beaucoup de gardes, donc je peux récupérer sur les jours de repos. Mais pour les stages où il faudra faire du 8h-20h, ça risque d’être plus compliqué. Je m’organise en priorité pour gérer mon temps de sommeil, au détriment de la vie sociale en dehors de l’hôpital ». À l’exception de quelques mini-dormeurs, tous doivent faire des sacrifices soit sur leur sommeil, soit sur le reste. Et la tâche se complique avec les enfants.

Fais dodo, conseil de confrère

Si les spécialistes recommandent un minimum de sept heures de sommeil par nuit, avec des horaires de coucher et de lever régulières, certains peuvent s’en affranchir partiellement. Mais ceux qui sentent des effets dans leur vie quotidienne s’exposent à de nombreux risques, qu’ils connaissent bien, d’ailleurs. Infections, troubles du rythme cardiaque, AVC… Le manque de sommeil extrême fait grimper les risques : des études réalisées sur l’animal ont montré une surmortalité infectieuse et cardiaque importante. Et pour la privation modérée, les risques cardiaques demeurent, ainsi que d’autres troubles métaboliques, notamment du côté de la régulation thermique.

Le manque de sommeil tue aussi indirectement, sur la route. Il y serait responsable d’un décès sur trois, d’après le Réseau Morphée. Et « 37 % des soignants se plaignent d’un risque d’endormissement au volant », souligne le Dr Sylvie Royant-Parola, présidente du réseau. Dans tous les cas, un simple manque de sommeil peut conduire à l’hôpital. Ça serait quand même dommage, pour ceux qui viennent enfin d’en sortir…

Crédits photo : g-stockstudio/Thinkstock

Source:

Jonathan Herchkovitch

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