Attentats : les chirurgiens mal préparés

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Les chirurgiens manquent de préparation et de formation pour gérer des patients dans le contexte d’attentat, selon une étude récente de l’Association Française de Chirurgie.
 

Attentats : les chirurgiens mal préparés

Seuls 38 % des chirurgiens se disent préparés à gérer des patients dans le contexte d’attentat. Un sur cinq méconnait les protocoles d’organisation de type plan blanc et 45 % disent n’avoir aucune formation complémentaire en traumatologie.
 
Telles sont les principales conclusions d’une étude récente publiée par l’Association Française de Chirurgie (AFC) menée auprès de 317 chirurgiens. Son objectif ? Dresser un état des lieux des connaissances et compétences chirurgicales dans le domaine de la traumatologie en situation d’attentat.
 

22,5 % ne connaissant pas les exercices

 
Si la majorité des répondants se sentent impliqués dans la prise en charge des traumatisés graves, « l’implication dans l’organisation des soins en traumatologie dans le cadre d’un plan blanc d’établissement est faible », déplore l’étude.
 
En effet, 38 % des chirurgiens ont déjà participé à un exercice et/ou participé à leur élaboration, tandis que 22,5 % d’entre eux ont déclaré ne pas connaître l’existence de tels exercices.
 
Cette méconnaissance des exercices plan blanc inquiète notamment Paul Balandraud, professeur de chirurgie de l'hôpital militaire du Val-de-Grâce:
 
« Nous vivons une ère où le terrorisme est devenu une menace permanente avec des attentats imprévisibles par le nombre de victimes et le profil des blessures, dans les grandes villes comme dans les plus petites… Les chirurgiens risquent d’être confrontés à des situations exceptionnelles. Leur participation aux exercices de simulation de leur établissement devrait être mieux encadrée et obligatoire. »
 

S’inspirer des chirurgiens militaires

 
L’ AFC considère donc que « les chirurgiens du civil doivent s’inspirer des chirurgiens militaires, plus structurés et plus préparés à gérer le flux des patients en situation d’attentats. »
 
Les principaux axes d’amélioration sont les suivants :
- Favoriser le binôme médecin anesthésiste-réanimateur / chirurgien pour optimiser la gestion des flux des patients. Le premier a un point de vue sur la réserve fonctionnelle de chaque blessé, le second sur les lésions anatomiques et les procédures techniques requises pour les traiter.
- Garder dans la formation des chirurgiens une part « généraliste » dédiée à l’urgence et la gestion des afflux massifs. Cette question est d’autant plus légitime que la « réforme des formations de santé s’oriente vers des spécialisations qui excluent définitivement la chirurgie générale », explique l’étude.
- Simuler des situations d’attentats via de nouveaux « serious game ». Dans un proche avenir les exercices plans blancs pourront se faire par l’intermédiaire de « serious games » multi-acteurs, rappelle l’étude. Ils permettront de simuler différents types d’afflux massifs, où les praticiens « joueurs » auront chacun un rôle.
 

Vers l’organisation d’un trauma system français

 
Le retard français est principalement dû « à des défauts d’organisation et de prise en compte de la traumatologie comme un enjeu de santé publique », estime Emmanuel Benizri, professeur au CHU Nice, persuadé qu’en situation d’attentat, « les chirurgiens, comme leurs équipes et collègues d’autres spécialités, ne pourront pas improviser leur organisation sur le moment ».
 
Mais les choses sont en train de changer. L’étude rappelle qu’un trauma system français est en cours de gestation, « avec la création toute prochaine d’un registre national de traumatologie, qui sera accessible à un grand nombre de professionnels de santé concernés par la traumatologie, quelle que soit leur spécialité, médecins urgentistes, anesthésistes-réanimateurs et chirurgiens. »
 
Enfin, dans le cadre de la réforme actuelle, la FST (Faculté des Sciences et Techniques de chirurgie) en situation de guerre et de catastrophe, qui ne remplacera certes pas le DES de chirurgie générale, « attestera d’une formation multidisciplinaire dans le domaine de la traumatologie en contexte d’attentat ».
 
 

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