En démissionnant de leurs responsabilités de chef de service ou de chef d’unité fonctionnelle, les médecins démissionnaires de l’AP-HP ont souhaité « lancer ou prolonger un cri d’alarme » qui aurait été « entendu » par Martin Hirsch, expliquait le directeur général de l’Assistance publique, dans un courrier envoyé aux démissionnaires le 4 février dernier. Pour donner encore un peu plus de force à ses propos, celui-ci aurait pu également reprendre à son compte la célèbre formule du général De Gaulle en son temps : « Je vous ai compris. »
Un cri d’alarme ! https://t.co/jX7f33Zwxl
— COLLECTIF INTER-HOPITAUX (@CollectInterHop) February 5, 2020
La suite du courrier ressemble à un passage de pommade en règle. Martin Hirsch évoque tour à tour « la nécessité d’un respect mutuel et du plus haut degré de compréhension entre les équipes de direction et les équipes médicales ». Avant d’interpréter les démissions comme une demande « de soutien », « d’implication plus forte dans les décisions », « d’écoute des propositions », « d’attention aux solutions ». Puis, d’enfoncer le clou en disant que « l’écoute est primordiale ». Les démissionnaires avaient compris…
Le directeur général de l’AP-HP a ensuite fait part de quatre propositions pour répondre au « geste » des démissionnaires. Premièrement, il s’engage sur la mise en œuvre « la plus rapide et la plus large » de l’ensemble des mesures à à sa disposition. En particulier celles résultant du plan "Investir pour l’hôpital" qui peuvent « contribuer à recruter et fidéliser, notamment celles qui concernent les rémunérations et les conditions de reprise partielle de la dette », selon Martin Hirsch. Or, ce plan annoncé en novembre dernier avait déjà fait l’objet d’une mise en œuvre accélérée par Agnès Buzyn mi-janvier.
Deuxième proposition, « être à l’écoute » de toutes les propositions qui pourront être faites dans les services pour être « plus attractif et plus réactifs pour les recrutements ».
Troisièmement, le directeur général de l’AP-HP suggère de « s’inscrire collectivement dans la démarche de travail proposée par la ministre le 17 janvier » pour préparer « un deuxième paquet de mesures » pour « accélérer (décidemment, NDLR) le rétablissement de l’hôpital public ». Cette démarche de travail avait été évoquée par la ministre suite à une rencontre avec les représentants du collectif Inter-Hôpitaux (CIH). Cette rencontre avait provoqué à son issue la colère des médecins qui avaient annoncé dans la foulée : "Nous irons au bout des démissions car la ministre ne prend pas la mesure de l’état urgence". Ce qu’ils ont fait.
J'ai reçu cet après-midi les représentants des médecins chefs de service désignés par le collectif inter-hôpitaux
1/2— Agnès Buzyn (@agnesbuzyn) January 17, 2020
Ma priorité est la mise en œuvre rapide des mesures du plan "Investir pour l'hôpital", afin que les soignants bénéficient pleinement de l'engagement massif que nous lançons pour l'hôpital public. 2/2
— Agnès Buzyn (@agnesbuzyn) January 17, 2020
Dernière mesure enfin, « traduire en acte les intentions sur les améliorations des équilibres sur la gouvernance ». Un sujet qui avait été évoqué le 17 janvier en compagnie des représentants du CIH, et qui, une fois n’est pas coutume, n’avait pas complètement déçu les médecins. Car la ministre n’aurait pas écarté la possibilité de modifier la loi HPST, tout en affirmant « sa volonté de redonner de l’importance aux services », sans en préciser les modalités.
Bref, dans son courrier, le DG de l’AP-HP ne répond pas véritablement aux demandes du CIH qui demande toujours l’ouverture immédiate de négociations visant à la mise en place rapide de quatre mesures essentielles : une revalorisation significative des salaires des personnels ; un Ondam 2020 n’imposant pas de nouvelles économies aux hôpitaux ; une révision profonde du mode de financement de l’hôpital ; une modification du mode de gouvernance.
On peut donc être plus que sceptique quand Martin Hirsch conclut son courrier en écrivant : « Nous ne voulons pas que ces cris ne débouchent que sur des mots mais sur des changements réels ».