Médecin à Porquerolles : Entre prison et paradis

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Après une année en Nouvelle Calédonie sur l’île de Lifou, Philippe Lentz devient le médecin urgentiste et attitré de l’île de Porquerolles. Il a récemment signé un livre à la fois didactique et culturel intitulé « Carnet de santé à Porquerolles ». Résumant avec précision et charme l’historique de cette région et ses bienfaits sur la santé, il agrémente son ouvrage d’anecdotes piquantes, d’histoires d’interventions et de réflexions amusantes venant de ses patients. On y retrouve également des personnalités ayant gravité autour de Porquerolles comme Jean Rochefort, Mylène Demongeot, ou encore l’abbé Bozon qui soignait avec les plantes recueillies sur place.

Médecin à Porquerolles : Entre prison et paradis

Doté d’une expérience professionnelle assez atypique, ayant soigné ministres, comédiens, peoples ou personnes de la «  haute », il considère ses patients un peu comme les membres de sa famille. Jouant tous les rôles de vétérinaire à propharmacien, il a exercé pendant plus de 15 ans au sein d’un cabinet bien pittoresque sans plaque vissée à l’entrée. Un brancard entier ne pouvait même pas y entrer et la manière dont il le décrit ne manque pas d’humour.… Humour aussi lorsqu’il affirme que lorsqu’il traverse le village, il a parfois autant de consultations qu’à son cabinet. Longtemps joignable jour et nuit, week-end et fériés compris, il compare sa condition à un homme ayant pris perpette « j’étais au paradis certes mais emprisonné »… Selon lui, la médecine générale traverse une vraie crise de reconnaissance et il cite des exemples de personnes peu délicates à son égard...

De précieux conseils

La deuxième partie du livre peut s’apparenter à un guide où conseils de santé sur les maladies relatives au soleil ou à la mer fourmillent. Coups de soleil, piqûres de méduses, de vives ou de taons, ou de scorpions très fréquents sur l’île… et même mosure de couleuvre, celle nommée « couleuvre de Montpellier » dont le venin est neurotoxique ! Il fournit des astuces pour éviter qu’une sortie en mer ne tourne au cauchemar.

Un texte « Santé à la table porquellaise… », une description des plantes médicinales de l’ile et celle de ses plantes toxiques ou allergisantes sont également présentes…

Ce médecin dont la femme a tenu bon et dont les enfants l’ont toujours vu travailler, témoigne de ce que représente son travail au sein d’un endroit très touristique où plus de 200.000 vélos sont loués par an et qui implique de « toucher un peu à tout »…

 

Philippe Lentz nous répond

Comment gérez-vous la crise du Covid ?

Déjà la gestion du Covid est beaucoup plus souple que la gestion du H1N1 que l’on a trop rapidement oublié. J’ai eu des cas terribles il y a 11 ans. Des jeunes de 20 à 30 ans qui étaient en détresse respiratoire aigüe et l’année dernière, j’avais vraiment peur de me retrouver dans des situations où la vie de personnes serait entre mes mains. Faire des actes de réanimation que l’on fait très rarement, ce n’est pas simple. Le covid, je trouve que c’est souple, c’est même trompeur. C’est-à-dire qu’on est en grand air, le virus est là mais c’est asymptomatique. Je ne perds pas une occasion pour rappeler aux uns et aux autres l’intérêt de se faire vacciner. Aujourd’hui j’ai vacciné une dizaine de personnes donc ça avance quand même…

Si vous deviez vous adresser à de jeunes médecins que leur diriez-vous ?

Soit on a la vocation et la foi pour ce métier et c’est très bien, sinon, mieux vaut faire autre chose. Je parle d’un médecin urgentiste. Si c’est un médecin généraliste homéopathe, c’est autre chose…

Comment faire pour ne pas être victime du burn-out ?

Il faut que les autorités reconnaissent la réalité de ce métier complexe, prenant et lourd. J’ai failli ne pas avoir d’interne cet été et si ça avait été le cas, je n’aurais pas tenu. J’ai fait ostéopathie avant de faire médecine et un ami ostéopathe m’a dit « Tu es le loupé de la promotion, tu gagnes 2 à 3 fois moins d’argent. » Si le SAMU m’appelle à 2h du matin, et que le patient est bourré, je ne suis pas payé. Il existe une non reconnaissance financière du métier, de l’astreinte et de certaines situations. Si c’était reconnu, cela permettrait de pratiquer cette activité davantage à la demande. Là par exemple, c’est la haute saison, et je n’ai le temps de rien faire parce que je suis tout seul…

Source:

Carnet de santé à Porquerolles. Philippe Lentz, Presses Du Midi.

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