Elsa Fayad, administratrice du Divan des médecins dénonce "une polémique montée de toute pièce"

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L'enquête publiée par Le Nouvel Obs sur certains propos licencieux postés sur le groupe Le Divan des médecins, ayant trait à ce que l'on peut nommer du patient bashing, a provoqué une grosse polémique. Elsa Fayad, l'administratrice du groupe Le Divan des médecins, répond à nos questions. 

Elsa Fayad, administratrice du Divan des médecins dénonce "une polémique montée de toute pièce"

What's up Doc. Depuis la création de ce groupe Facebook, avez-vous déjà été interpellée par les manquements (patient bashing, manquements à la déontologie médicale) constatés par le Nouvel Obs ? 

Dr Elsa Fayad. Interpellée au sens choquée par une supposée fréquence scandaleuse de propos condamnables, clairement, non, lorsque j'ouvre la page du groupe, je tombe principalement sur un contenu parfaitement correct, intéressant et agréable.

J'ai parfois reçu quelques signalements de publications ou commentaires incorrects, par exemple lors de débats houleux d'où quelques mots inappropriés pouvaient échapper, un peu comme dans la vraie vie en somme. Rien de systématique et généralisé de type "patient bashing" ou autre. Une poignée d'énergumènes a du être exclue, oui.

 

WUD. J’imagine que vous avez mis en place une modération a posteriori ? 

E. F. Oui, oui bien sûr, comme dans la majorité des groupes et pages FB d'ailleurs ; et si nous avions mis en place une modération a priori pour valider chaque nouvelle publication, le groupe aurait perdu tout son intérêt, qui se base notamment sur la qualité de sa réactivité face à des questions médicales le nécessitant. Sans compter que je n'ai pas à policer ou infantiliser mes confrères.

WUD. Et quid des posts dérangeants ? Y en a-t-il autant que cela ? 

E. F. Il y en a très peu, en tout cas si l'on souhaite être rigoureux et scientifique. Je n'ai pas fait les comptes, mais par chance le Nouvel Obs' semble l'avoir fait pour nous en parlant d'une centaine de captures d'écran "à caractère pénal", semble-t-il (chiffre à prendre avec des pincettes, au vu de leur partialité manifeste. Donc, sur les 28 derniers jours, il y a eu 3137 publications et 55 000 commentaires. Extrapoler ça sur plus de deux ans, je vous laisse faire le calcul.

WUD. Vous étiez combien de modérateurs ?

E. F. À la base, nous étions deux administrateurs et quelques modérateurs, dont certains ont refusé les règles de base édictées à la création du groupe. Alors nous avons restreint le pôle administration/modération, pour arriver à deux administrateurs et deux modérateurs, plus ou moins actifs. (Facebook met à disposition des internautes une fonction signalement qui permet d'un simple clic de relever des posts ou commentaires dérangeants, NDLR).

WUD. Pourquoi ne vous a-t-on pas signalé ces posts relevés par Le Nouvel Obs ? 

E. F. Il est regrettable que des personnes qui ont été dérangées par certains propos aient préféré partir en parler ailleurs (sur Twitter, au Nouvel Obs, NDLR), plutôt que de venir nous le signaler et régler les problèmes en interne. Mais peut-être ne connaissaient-ils pas la fonction "signalements", ou "envoyer un message"... Il semble également que certains messages soient passés à la trappe, et que certaines décisions (ou absence de réaction) aient été prises unilatéralement (par d'autres administrateur / modérateurs). Je me suis rendue compte ne pas avoir été au courant à temps, j'ai donc décidé de reprendre la main et rester administratrice unique, pour éviter ce genre d'incident.

WUD. Pourquoi avoir créé ce groupe le Divan des médecins ? 

E. F. Quand j’étais étudiante, je voyais passer les publications du groupe"les médecins ne sont pas des pigeons" ; je pensais au début qu'il s'agissait d'un groupe de médecins, d'étudiants, permettant de discuter médecine, pratique et quotidienne, pour apprendre et échanger. Ce n'était pas le cas : il s'agissait d'un groupe ouvert qui semblait avoir perdu sa ligne directrice, et qui était plus politisé qu'un groupe purement médical. Alors un jour j'ai franchi le pas, en quelques clics.
 

WUD. Au-delà de la polémique soulevée par le Nouvel Obs, cela sert à quoi le Divan des médecins ? 

E. F. Le Divan sert, comme sa description le dit, à échanger sur la pratique médicale, la vie quotidienne d'un médecin, les difficultés, les échecs et les succès ; c'est devenu un véritable réseau d'entraide qui a permis le partage de connaissances et la résolution de cas cliniques difficiles, parfois même une évolution des pratiques, des échanges positifs entre diverses spécialités parfois trop cloisonnées, et également, ce qui n'était pas forcément attendu, de très belles actions de solidarité entre membres en grande difficulté.

WUD. Avez-vous enregistré une hausse ou une baisse des demandes d’adhésion ? 

E. F. Nous avons enregistré énormément de nouvelles demandes d’adhésion, cette affaire nous a fait beaucoup de publicité !!

WUD. Puisque vous avez reçu beaucoup plus de demandes, pensez-vous vous faire aider d’un modérateur ? 

Il n'est pas indispensable de s'entourer d'une armée de modérateurs, les membres sont adultes, et pour l'écrasante majorité, se modèrent tout seuls, comme on peut le constater en notant la faible proportion de publications "épinglées" sur la totalité de l'activité du groupe. Je vais simplement communiquer davantage sur la fonction "signaler", et, même si cela peut paraître paradoxal, recentrer l'administration du groupe afin d'avoir une visibilité parfaite sur ce qui s'y passe et éviter de passer à côté d'incidents.

WUD. Avez-vous été contactée par des instances comme le conseil national de l’Ordre des médecins ? 

E. F. Non. C’est quand même un pseudo "scandale journalistico-journalistique" monté de toutes pièces, se basant sur quelques fautes épisodiques et qui n'engagent que leurs rares auteurs pour jeter l'opprobre sur plus de 10 000 médecins qui n'ont rien à se reprocher. Curieuse pratique, et grave. Et d'autres journalistes reprennent compulsivement les informations du Nouvel Obs sans faire d’enquêtes supplémentaires, pour surfer sur la vague médiatique et faire du clic. 

WUD. Vous ne comptez donc pas changer grand chose au fonctionnement de la page Facebook, à part le fait que vous êtes maintenant la seule administratrice ? 

E. F. J’ai pour le moment gardé un modérateur. Je centralise la prise de décision mais rend, chacun responsable de ce qu’il publie, et de la modération du groupe par la fonction "signaler". 

WUD. Comment expliquez-vous le succès du Divan des médecins ? 

E. F. Le Divan des médecins est un lieu de discussion assez unique, moi je l’ai créé en 2017 alors que facebook existait depuis longtemps, et il est étonnant qu’un groupe n’ait pas été créé avant que j'en prenne l'initiative. Il y avait bien le groupe des pigeons mais ça n’avait jamais été un groupe de médecins.

WUD. Que dire de l'échange de photos de patients sur Le Divan ? 

Rien d'étonnant à cela, un des objectif principal de ce groupe est le partage de cas clinique, forcément, il y a souvent besoin d'images. Et il est tout à fait légal de partager des photos anonymisées. Que ce soit des bras, des dos, ou même des seins ou des anus. Les médecins traitent également ces zones-là, rien de particulièrement choquant, c'est un peu comme si on s'offusquait qu'un médecin demande à son patient de se déshabiller... Curieuse polémique.

 

WUD. Et les nude challenges c’est vrai cette histoire ? 

E. F. Au risque d'en décevoir certains, non ! Mais quand bien même, je ne suis pas certaine que ce soit une activité "à caractère pénal" (rires)

 

 

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