C'est l'histoire d'un mec qui s'est réveillé un samedi matin et s'est dit qu'il fallait absolument lancer une deuxième concertation sur l'hôpital public, avant que celui-ci ne flanche. Ce mec, c'est le Dr Arnaud Chiche, anesthésiste-réanimateur à la polyclinique d'Henin Beaumont, fondateur depuis lundi dernier du groupe Facebook "Collectif santé en danger". Très impliqué dans la prise en charge des patients Covid dans son établissement de santé, non syndiqué, pas politisé, plutôt sportif et heureux dans son existence, le Dr Arnaud Chiche ne pensait pas, il y a encore une dizaine de jours, qu'il allait piloter un groupe Facebook de plus de 30 000 membres.
Mais comment donc cette histoire a-t-elle commencé ? "Samedi 11 juillet, je suis en vacances en Corse, je me réveille un bon matin, et je me rends compte que le Ségur est planté. Dans une fulgurance, j’écris un post un peu provoc sur mon mur Facebook, où je me plaignais de n'avoir pas été invité au Ségur de la santé, parce qu'avec moi ce serait allé très vite : j’aurais dit vous signez là à chaque demande sinon en dix points je leur auraix expliqué ce que l'on n'était plus prêt à faire.
J’aurais expliqué qu’il ne faut pas nous emmerder."
Le post est partagé et devient viral, mais gentiment, un poco ma non troppo. Jusqu'à ce que le médecin Sabrina Aurora décide de l'afficher sur son mur : "Dimanche Sabrina Aurora a partagé ce poste qui était devenu viral. Et là ça a été l’emballement. Elle ne veut pas le reconnaître mais c’est Sabrina qui a tout déclenché. Le partage de mon poste est devenu exponentiel."
Arnaud Chiche, qui s'attendait à se faire insulter, reçoit des marques de sympathie et des félicitations par dizaines. L'idée de créer un collectif s'impose à lui : "Les gens me disaient merci de dire ce que l’on a tous dans la tête. Dimanche soir, je reçois tellement de témoignages que cela s’impose à moi. J’ai été responsabilisé, même si je n’en avais pas envie. Je décide de créer un collectif et je mets cinq heures pour lui trouver un nom. Je l’ai appelé collectif santé en danger et l'ai créé lundi matin."
Mardi, Arnaud Chiche réunissait un premier bureau et décidait de faire connaitre son initiative. Les médias locaux (La Voix du Nord, France 3) lui consacraient des articles, tandis que le nombre d'adhérents n'arrêtaient pas d'augmenter. Parallèlement, Arnaud Chiche précisait ses revendications : "Nous voulons réouvrir le Ségur, nous voulons la signature de toutes les revendications initiales, avec un focus particulier sur la pénibilité due à la continuité des soins. Il faut que tous les personnels impliqués dans la continuité des soins soient pris en compte, de l’hôtesse d’accueil à l’agent de régulation médicale au 15, tous ! Il faut que ce travail soit revalorisé et reconnu. Il faut que les sages-femmes soient intégrés à la table des négociations. Les syndicats signataires du premier Ségur seront évincés, par contre j’ai confiance dans les syndicats non signataires", explique-t-il.
À l'endroit des médecins hospitaliers, même s'il reconnaît que le doublement de la prime de service public exclusif est un pas en avant, Arnaud Chiche milite surtout pour un doublement du tarif des gardes : "On ne tient pas compte de la revalorisation des gardes de nuit, c’est cela qu’il fallait faire ! Il fallait du temps médical continu pour tout le monde ! Ils ont oublié le travail de nuit, ils ont oublié les revalorisation de carrière".
Après un démarrage en trombe, Arnaud Chiche souhaite maintenant que le Collectif Santé en danger soit représentatif de l'ensemble des corporations du monde de la santé, mais aussi du médico-social. Il a reçu des marques d'intérêt de nombreux syndicalistes en santé, mais aussi de sociétés savantes. Et des politiques s'intéressent maintenant à son initiative…. Vers un nouveau Ségur ?