Tunisie : la moitié des nouveaux médecins quitte le pays

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Le vrai désert médical n’est pas dans la Creuse

Tunisie : la moitié des nouveaux médecins quitte le pays

Le secrétaire général de l’Ordre des médecins en Tunisie a récemment jeté un froid en annonçant que 45 % des praticiens inscrits en 2017 avaient déjà quitté le pays du jasmin. Une situation qui s’explique par l’état déplorable du système de santé tunisien.

Il y a des chiffres qui font mal. La douleur fut particulièrement intense quand Nezih Zghal, secrétaire général de l’Ordre tunisien des médecins, a annoncé en janvier dernier sur la radio tunisienne RTCI que 45 % des médecins qui avaient été inscrits en 2017 au tableau se trouvaient à l’étranger. Le pire étant que les perspectives d’une amélioration de la situation sont quasi inexistantes.

« Ces jeunes médecins ne voient aucune issue à leur avenir ici, ni dans le secteur public, ni dans le secteur privé », dénonce l’ordinal, qui explique que l’exode ne fait qu’empirer : les nouveaux inscrits n’étaient « que » 9 % à émigrer en 2012, soit cinq fois moins qu’en 2017. Et le phénomène ne concerne pas que les jeunes. « On a aussi des médecins expérimentés qui quittent l’hôpital public, non pas pour le privé, mais pour les pays du Golfe, parce que l’Etat est incapable de les payer convenablement », déplore Nezih Zghal.

Une formation amputée

Bien sûr, pour des raisons linguistiques, de nombreux praticiens tunisiens choisissent la France. C'est le cas d'Ali (1), jeune chirurgien qui souhaite garder l’anonymat et qui exerce actuellement dans une grande ville universitaire hexagonale. « La formation en Tunisie est amputée, elle équivaut à environ 20 ou 30 % de ce qu’on peut avoir en France », estime ce praticien. Là où il exerce, il fait de la robotique, ce qu’il estime impossible dans son pays d’origine. « Avec la crise économique qui règne en Tunisie, je ne vois pas comment des robots chirurgicaux pourraient être installés en nombre significatif dans un avenir proche », juge-t-il.

D’ailleurs, Ali ne s’imagine pas retourner dans son pays. « Si je suis venu ici, c’est pour y rester », affirme-t-il. Et comment le blâmer quand on voit que l’exode touche les médecins tunisiens les plus haut placés ? Rappelons que le Pr Mohamed Salah Ben Ammar, ex-ministre de la Santé tunisien et universitaire respecté, exerce actuellement à temps partiel en anesthésie… à l’Hôpital Avicenne de Bobigny.

(1) Le prénom a été modifié.

Source:

Adrien Renaud

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