Témoignage d'un PH Covid-19 référent : "les annonces de décès sont d'une violence inouïe"

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Un praticien hospitalier, qui exerce dans une unité Covid-19 d'un centre hospitalier référent en région parisienne, nous a livré son témoignage, anonyme, sur les conditions de travail des médecins sur le front de l'épidémie.

Témoignage d'un PH Covid-19 référent : "les annonces de décès sont d'une violence inouïe"

« Je suis dégoûté quand je vois que l’IHU de Marseille fait des tests en veux-tu en voilà... Chez nous, établissement référent Covid-19, nous sommes limités à 30 tests par semaine ! Si bien que lorsque l’on a plus assez de tests, on fait passer des scanners pour repérer des patients Covid-19. Et quand on n’a pu faire ni tests ni scanners, alors on ne note pas comme cause de la mort Covid-19, mais pneumopathie. Certains labos pratiquent des tests PCR mais qui ne sont pas certifiés. On les appelles les « black PCR ». 

De plus en plus, nous recevons des patients compris dans la tranche d’âge 45-60 ans. Ce sont des gens actifs qui circulent dehors, et qui à un moment donné sont en contact avec le virus. Il leur suffit d’avoir une pathologie de type asthme pour les retrouver en réanimation...

Les instructions que l’on nous donne en cas de décès ou de décès attendu d’un patient Covid-19 sont d’une violence inouïe. Nous devons sans plus attendre, dès qu’un patient est en train de « basculer », appeler les familles pour les avertir qu’elles n’auront que peu de temps pour habiller le défunt et choisir le cercueil. Si les familles ne sont pas assez rapides et que le patient est décédé, alors nous devons «emballer » le patient et l’évacuer le plus rapidement possible. C’est certainement la chose la plus dure que j’aie eu à faire. 

Face à l’épidémie qui arrivait et de peur de rester confinés à plusieurs dans des appartements exigus, de nombreuses familles maghrébines envoyaient leurs chibanis (vieux en arabe) au « bled ». Mais certains d’entre eux sont tombés malades, au Maroc entre autres et maintenant les familles s’échinent à les faire revenir, ce qui n’est pas une mince affaire. 

Notre quotidien n’est pas non plus sombre en permanence. Nous recevons beaucoup de gestes de solidarité de la part de nos concitoyens. Ainsi nous avons réceptionné avant hier plus de 40 pizzas qui nous ont été offertes par les pizzaïolos du coins. Cela réchauffe le cœur. »

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