Martine Wonner : "On continue de faire confiance aux hauts fonctionnaires de la DGS""

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Psychiatre et parlementaire, Martine Wonner a voté contre la stratégie de déconfinement présentée par le Premier ministre Édouard Philippe le 28 avril dernier et a été exclue du groupe parlementaire LREM pour cette raison. Elle nous explique en quoi la stratégie de déconfinement du gouvernement lui parait lacunaire. 

Martine Wonner : "On continue de faire confiance aux hauts fonctionnaires de la DGS""

WUD. Vous avez justifié votre vote contre le plan de déconfinement en arguant du fait qu’il n’avait pas de pilier thérapeutique. Que vouliez-vous dire ? 

 

Martine Wonner. Depuis le début de cette épidémie, il n’y avait pas ou peu de protection pour les soignants et l’on ne va pas revenir sur la polémique concernant les masques, ou encore les tests. On aurait pu imaginer que le trépied "protéger, tester, confiner" soit étayé avec une stratégie un peu différente, car nous en somme là à 35 000 décès puisque l’on sait que les médecins libéraux ont fait une évaluation de 9000 morts. Or nous entendons en boucle ce message de prévention sur tous les médias : si vous avez des symptômes faites vous tester mais n’appelez le samu que si vous n’arrivez plus à respirer ! Je suis caricaturale mais c’est quand même le message que l’on continue d’adresser. Très vraisemblablement dès aujourd’hui des arrêtés vont être pris pour signifier à des citoyens français qu’ils doivent rester confinés. Mais ils n’auront comme thérapeutique que leur boite de doliprane et c’est cela que je dénonce. J’attends toujours de la part d’Olivier Véran une stratégie qui ne vient pas !!

 

WUD. Mais pour le moment aucun traitement n’a été validé, que le ministre de la santé puisse proposer aux patients atteints de Covid19 ? 

 

M. W. On continue de faire confiance aux hauts fonctionnaires de la direction générale de la santé qui continue à dire qu’il n’y a aucun traitement. Est-ce à eux de dire aux ministres s’il existe un traitement ou non contre le Covid19 ? Je m’étonne que les ministres de la Sanré restent sous la tutelle de cette direction générale de la santé qui du reste devra rendre des comptes sur cette insufisance dans la gestion de la crise. Je ne veux pas rentrer dans la polémique au sujet de la stratégie mise en place par l’IHU de Marseille, laquelle d’ailleurs était basée sur les premières tentatives des équipes de soins chinoises, mais nous avons d’autres études qui nous ont démontré tout l’intérêt d’une bithérapie azithromycine/hydroxychloroquine ou bien du seul antibiotique azithromycine dès la phase précoce. Dans le collectif auquel j’ai participé à la création il y a maintenant quatre semaines ("Laissons les prescrire", NDLR), nous avons nous-mêmes très modestement fait une étude rétrospective, puisque depuis le 28 mars, à partir de 88 dossiers. Cette étude porte sur trois cohortes : azithromycine, azithromycine/hydroxychloroquine et aucun traitement. Nous avons constaté une résolution de la virémie en quelques jours même lorsqu’il n’y a que de l’antibiotique. Alors qu’il faut attendre facilement 26 ou 27 jours lorsqu’il n’y a aucun traitement. Nous constatons aussi que pour certains patients il existe une résurgence cinq ou six semaines plus tard sous des formes cutanées ou encore des atteintes pulmonaires, même chez des gens asymptomatiques. D’autres études en faveur de l’hydroxychloroquine ont par ailleurs été publiées depuis, notamment une étude chinoise et une étude de l’IHU de Marseille. On ne peut pas dire qu’il n’y a pas de traitement : donner un antibiotique de façon prématurée peut éviter les effets secondaires, voire certains décès bien évidemment. Je pense que l’on aurait dû avoir une stratégie thérapeutique. En Grèce, on ne compte par exemple que 110 décès. Nous en sommes à 35000 en France.

 

WUD. Qu’auriez-vous proposé ? 

 

M. W. Sur le plan de l’organisation, j’aurais orienté tous les patients Covid vers les structures publiques en garantissant la prise en charge de toute la médecine dans les structures privées. Il faut avoir une vraie gestion de crise et non pas une gestion administrative. 

 

WUD. Vous avez dit ne plus faire confiance au gouvernement ? 

 

M. W. Oui, complètement ! Ni au premier ministre, ni au ministre de la Santé !! La non-remise en cause de cette gestion de crise est aberrante ! La DGS a mis quatre semaines avant de penser commander des masques !! On a retrouvé des arbres décisionnels et des conduites à tenir en date du 22 janvier dans les ARS concernant le covid19, et qui pronaient le confinement : que s’est-il passé entre janvier et mars ? Pourquoi n’y a-t-il pas eu de confinement ? Nous avons perdu énormément de vies, de par cet immobilisme administratif. 

 

WUD. Vous êtes combien de médecins dans votre collectif « Laissons les prescrire » ? 

 

M. W. Actuellement nous sommes plus de 2000 médecins. Il y a aussi d’autres soignants. Ce sont beaucoup de médecins libéraux tout simplement parce qu’ils ont pour nombre d’entre eux payé de leur vie cette épidémie de Covid19. Le président de la Carmf Thierry Lardenois a comptabilisé plus d’une trentaine de médecins qui ont perdu la vie, contre 4 hospitaliers. Les libéraux n’avaient quasiment pas de protections face à leurs patients. C’est aussi la première fois en France que l’on interdit aux médecins libéraux de prescrire une molécule. C’est du jamais vu ! Je suis effarée de ce qui a été décidé en matière de déresponsabilisation des médecins ! Dans cette phase de déconfinement, c’est pareil : on leur demande dans un premier temps de dépister puis on leur enlève toute responsabilité sur le devenir de ces patients que l’on confie à des brigades sanitaires. Les médecins connaissent la procédure en matière de pathologie à déclaration obligatoire, ils ne découvrent pas cela, ils savent faire !! Ils peuvent aussi mener l’enquête comme ils le font pour des patients atteints de MST ! C’est le B.A. BA de la médecine ! Le médecin dans ce plan de déconfinement est exclu de cette procédure ! Des cas contacts vont être appelés par des salariés de ces brigades qu’ils ne connaissent pas, puis privés de liberté par des arrêtés préfectoraux… Sans rien leur proposer. C’est une aberration !

 

WUD. Comment voyez-vous l’avenir de cette épidémie ? 

 

M. W. Je vais rester prudente car ce n’est pas ma spécialité. Moi je suis en Alsace mais jeudi dernier l’ARS et la préfecture nous ont encore annnoncé quelque 56 nouveaux cas dépistés en Alsace. En Allemagne, certains Lands ont été confinés de nouveau. Sur le plan météo ce 11 mai, on passe à 6 degrés et je crois savoir que le virus aime bien les températures fraiches… Donc beaucoup de prudence, d’autant que les masques ne sont pas encore là pour tout le monde…. 

 

WUD. Des parlementaires dissidents de la République en marche vont peut-être monter un nouveau groupe parlementaire allez-vous les rejoindre ? 

 

M. W. J’ai appris cela par la presse ce week-end. Je pense qu’il y a eu confusion avec les parlementaires qui ont lancé la plateforme « le jour d’après » où nous étions plus de 50… Personnellement je me laisse un peu de temps car ma vie politique a été bouleversée de manière brutale. J’ai pu apprécier avec quelle rapidité le groupe LREM s’est débarrassée de moi : j’ai été convoquée mercredi et dans l’heure qui a suivi on m’a signifié que je ne faisais plus partie du groupe LREM. D’habitude ils se laissent une semaine avant de statuer mais j’ai bien compris qu’il fallait me sortir avant le vote de la loi sur la prolongation de l’état d’urgence sanitaire. J’ai d’ailleurs voté contre et j’ai quitté le mouvement. Je vais sans doute rejoindre un groupe car la position de non-inscrite est inconfortable. Je reste fidèle à mes valeurs, la protection des plus vulnérables, l’environnement… 

 

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