Les médecins contre les pleins pouvoirs donnés aux directeurs d’hôpital 

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La loi de prorogation de l'état d'urgence sanitaire, adoptée définitivement le 6 novembre prochain, devrait permettre aux directeurs d'hôpital de se passer de l'avis des instances représentatives du personnel pour prendre des décisions. Les syndicats de médecins s'y opposent. 

Les médecins contre les pleins pouvoirs donnés aux directeurs d’hôpital 

Une fois n’est pas coutume : l’ensemble des syndicats de médecins (Snam-HP, INPH, APH, Jeunes médecins, CMH) viennent de signer un communiqué commun pour s’opposer à l’adoption dans le cadre de l’examen de loi de prorogation de l’état d’urgence sanitaire, votée définitivement le 6 novembre prochain, d’un amendement qui accorde les pleins pouvoirs aux directeurs d’hôpital. Tel qu’il est formulé et rédigé, cet amendement autorise les directions d’hôpital à déroger « aux règles de fonctionnement et de gouvernance de ces établissements de santé s’agissant notamment de leurs assemblées délibérantes, de leurs exécutifs et de leurs instances représentatives du personnel ». Exit le dialogue social en pleine épidémie de Covid19 ! Cet amendement permet aussi aux directions hospitalières de déroger à « l’approbation et la publication des comptes », aux « règles d’adoption et d’exécution des budgets ainsi que de communication des informations indispensables et d’analyse de leurs activités prévues par la loi ». En guise d’explication, le législateur ajoute que «le présent amendement vise donc à assouplir les contraintes pesant sur les hôpitaux et à leur permettre de ne se préoccuper que de la santé de nos concitoyens »
 

"C'est inimaginable"

Toutefois, tous les députés présents lors de la discussion de cet amendement ne partageait pas forcément l’avis du gouvernement. Ainsi la députée George Pau-Langevin s’est notamment exclamée : « On peut comprendre qu’il y ait besoin de délais pour remplir certaines obligations, mais on ne peut pas déréguler complètement le fonctionnement des hôpitaux, la comptabilité publique et le droit du travail ! Car cette mesure est aussi large que cela : hop ! on supprime tout ce qui fait la réglementation dans notre pays ! C’est inimaginable. » Pascal Brindeau abonde : « Vous ne pourrez pas permettre qu’on fasse totalement fi de l’avis des soignants et des représentants du personnel sur le mode d’organisation des établissements publics et privés hospitaliers. C’est très dangereux. » 

Les syndicats de médecins, dans leur communiqué commun rappelle que « lors de la première vague, les plans blancs avaient déjà fait l’objet de dérives autoritaires des directions d’établissements notamment en psychiatrie ». Les médecins refusent ainsi que « l’on puisse autoriser tout directeur d’hôpital ou d’ARS à prendre des décisions sans avis des soignants même, et surtout, pendant la crise sanitaire. Les instances consultatives internes et de représentation des personnels et, a minima le bureau de la CME pour le personnel médical, doivent continuer à exercer leurs rôles et leurs missions dans les établissements de santé pour que la crise sanitaire, probablement destinée à durer, ne balaie pas les outils d’une gouvernance démocratique et équilibrée. Cette crise ne doit en aucun cas servir de prétexte pour un renforcement décisionnel uniquement à la main de l’administration ». 

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