Urgences : à deux, c’est mieux

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Le cross-checking fonctionne

Urgences : à deux, c’est mieux

Une étude menée à l’AP-HP suggère que trois réunions en binômes de 10 minutes par jour, destinées à échanger sur les cas respectifs des médecins, suffiraient à faire baisser le nombre d’erreurs médicales de 40 %.

Des erreurs médicales aux urgences ? Non, jamais entendu parler… Le rythme de consultations laisse tout le loisir à des médecins et des internes en pleine forme de bien examiner leurs patients, et même de revenir sur les cas qui peuvent leur laisser un doute.

Bon, admettons que ça puisse arriver, exceptionnellement.

En fait, environ 10 % des passages aux urgences seraient concernés, d'après les résultats d'une étude datant de 2013. De la petite sans conséquence à la plus grave. Et les staffs ne suffisent pas toujours à rectifier le tir. Mais l’étude Charmed, menée à l’AP-HP et publiée le 23 avril dans le Jama Internal medicine, apporte une solution. Selon ses résultats, des réunions d’une dizaine de minutes, trois fois par jour, en binômes, suffiraient à réduire les erreurs médicales de 40 %.

Oups, une fracture

L’étude a été menée sur des dossiers de patients majeurs traités dans les services d’urgences d’Avicenne, Lariboisière, Saint-Antoine, Tenon, Pompidou et au CHU Grenoble-Alpes. Chaque jour, durant deux périodes de 10 jours, 14 étaient sélectionnés au hasard afin de détecter d’éventuelles erreurs médicales ou des évènements indésirables. La moitié des cas avait été prise en charge normalement, et pour les autres, les médecins devaient se retrouver trois fois par jour avec un confrère pour échanger pendant 10 minutes.

En moyenne, 8,6 % des patients ont connu un évènement indésirable. Dans le groupe standard, ce taux montait à 10,7 %. Et pour les patients qui ont fait l’objet d’un échange entre médecins, il descendait à 6,4 %, soit un gain de 40 %. Plus précisément, les erreurs sans gravité ont chuté de 47 %, et les évènements indésirables graves – ayant entraîné une prolongation de l’hospitalisation ou des dommages définitifs – de 29 %.

Parmi ces derniers, sont par exemple comptés la prise en charge des infections ou de l’insuffisance cardiaque, ou encore les fractures passées inaperçues ou les erreurs de diagnostic pour les douleurs thoraciques.

Perdre du temps pour en gagner ?

« Certains urgentistes se demandent s’ils auront le temps », a expliqué Yonathan Freund, urgentiste à la Pitié-Salpêtrière et auteur principal de l’étude. « Mais une fois mises en place, les médecins apprécient ces réunions car ils se rendent compte qu’elles améliorent la gestion des urgences, plus efficaces et productives ».

Sur France Inter, le 24 avril, Martin Hirsch, le patron de l'AP-HP, a lui-aussi validé ce cross-checking systématique. « Quand on m'a mis il y a quelques semaines cet article sous les yeux, la première chose que j'ai dite est faisons-le dans tous les services et soyons partageurs, suggérons aux autres services de le faire », a-t-il déclaré.

Source:

Jonathan Herchkovitch

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