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Frédéric Péchier, 53 ans, est jugé par la cour d'assises du Doubs à Besançon pour 30 empoisonnements de patients, dont 12 sont morts, entre 2008 et 2017 dans deux cliniques de Besançon.
Une histoire troublante
Déterminée, l'anesthésiste Anne-Sophie Balon a décrit la journée du 11 janvier 2017 où sa patiente, Sandra Simard, 36 ans, a été empoisonnée avec du potassium, injecté dans une poche de soluté de réhydratation.
La patiente est endormie pour une opération, puis à 08 h 56, Anne-Sophie Balon est appelée en urgence. Sandra Simard fait un arrêt cardiaque. La jeune médecin anesthésiste entame rapidement un massage cardiaque.
Frédéric Péchier entre alors dans la salle, « avant même le cardiologue de garde », et « injecte du gluconate de calcium » sans concertation. « Il ne m'en parle pas. Et il repart », se souvient-elle.
Le gluconate de calcium n'est pas un antidote à un excès de potassium (hyperkaliémie), mais aide le cœur à le supporter.
« J'ai été choquée par le timing » de l'arrivée de Frédéric Péchier, par « l'administration précoce » du gluconate de calcium et par « le fait qu'une hyperkaliémie » était envisagée alors qu'il n'y avait « pas le contexte pour » à ce moment-là, a témoigné la jeune femme.
Pour la défense, Randall Schwerdorffer note que « quand il y a de l'agitation dans un bloc, il est courant qu'on vienne prêter main forte ». « C'est vrai », admet Anne-Sophie Balon.
Mais « il n'est pas usuel d'administrer quelque chose à un patient sans même s'adresser à son médecin » ni échanger des informations capitales pour « comprendre ce qui se passe », selon elle.
D'après Randall Schwerdorffer, son client avait « annoncé l'administration du gluconate de calcium ».
Sandra Simard survivra à cet arrêt cardiaque.
Des gros doutes sur Péchier
Anne-Sophie Balon fera saisir et analyser les poches de perfusion utilisées pour l'anesthésie, dans lesquelles une dose de potassium 100 fois supérieure à la normale sera retrouvée.
Au sein de la clinique, « on avait identifié que ça pouvait être lui », Frédéric Péchier, l'auteur de l'empoisonnement, confie devant la cour la médecin, qui dit avoir « été grandement soulagée » lors de son interpellation.
La praticienne n'a « jamais » été confrontée à d'autres arrêts cardiaques, ni avant ni après celui de Sandra Simard.
L'avocate générale, Christine de Curraize, a relevé comme possible mobile que Frédéric Péchier, qui avait « le statut de leader » au sein de la clinique, était « déstabilisé » par l'arrivée d'une nouvelle génération de jeunes anesthésistes, dont Anne-Sophie Balon.
Lors de l'instruction, Frédéric Péchier avait mis en cause sa collègue en prétendant qu'elle aurait pu injecter le potassium a posteriori pour couvrir une erreur médicale.
« Et Sandra Simard, il est dû à quoi son arrêt cardiaque ? On n'a rien trouvé. C'est rocambolesque, ça ne tient pas ! », rétorque Anne-Sophie Balon.
L'accusé, qui a toujours clamé son innocence, comparaît libre, mais risque la réclusion criminelle à perpétuité.
Le verdict est attendu le 19 décembre.
Avec AFP
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