Le déficit de la Sécurité sociale est plus important que prévu dans la dernière loi de financement en avril: il est estimé à 8,7 milliards d'euros en 2023, puis 10,5 milliards en 2024. Les comptes sont plombés notamment par la hausse des dépenses de l'Assurance maladie.
1) Économies en santé
Pour atteindre ses objectifs, le gouvernement prévoit de trouver 3,5 milliards d'économies dans les dépenses de l'Assurance maladie, dont :
- 600 millions d'euros liés aux dépenses hospitalières
-1,3 milliard sur les produits de santé (essentiellement des baisses de prix des médicaments)
- 300 millions sur les soins de ville, en particulier les laboratoires d'analyses
- 1,25 milliard lié à la "responsabilisation" des professionnels et des patients.
Malgré cet effort, les dépenses d'assurance maladie (ONDAM) représenteront 8,7% du PIB en 2024, contre 8,2% avant la crise sanitaire du Covid-19.
2) Lutte contre la fraude
Pour lutter contre la fraude aux cotisations sociales, le gouvernement veut s'attaquer à la "sous-déclaration" de chiffre d'affaires des micro-entrepreneurs employés par les plateformes numériques, un manque à gagner évalué à 800 millions d'euros. D'ici à 2027, les plateformes devront directement prélever ces cotisations.
Le texte crée aussi des délits d'incitation à la fraude sociale, et de promotion et de facilitation de la fraude.
3) Plus de contrôle sur les arrêts maladies
Pour lutter contre l'augmentation des dépenses liées aux arrêts maladie, le gouvernement renforce les pouvoirs de contrôle des entreprises. Le médecin contrôleur mandaté par l’employeur - médecin agréé - pourra faire suspendre le versement des indemnités au patient lorsqu'il estime l'arrêt injustifié. La caisse d'assurance maladie pourra éventuellement décider de procéder à un deuxième examen.
Le texte limite aussi à trois jours la durée des arrêts prescrits par téléconsultation (sauf exceptions, notamment pour le médecin traitant).
4) Incitation aux transports partagés
Les patients qui refuseront une offre de transport sanitaire (véhicule sanitaire léger ou taxi conventionné) partagée avec un autre patient, sans raison médicale valable, devront faire l'avance de frais, et ne seront remboursés que sur la base du prix d'un transport partagé.
5) Délivrance d’une quantité adaptée de médicaments
En cas de ruptures d'approvisionnement sur un médicament, la délivrance à l’unité pourra être rendue obligatoire par arrêté. Les pharmaciens devront alors délivrer "la quantité adaptée" plutôt qu'une boîte entière.
Le gouvernement pourra aussi rendre obligatoire la réalisation d’un test rapide d’orientation diagnostique (TROD), pour délivrer par exemple certains antibiotiques.
6) Dépistage du cytomégalovirus pour les femmes enceintes
Le texte rend systématique le dépistage chez les femmes enceintes du cytomégalovirus, un virus pouvant affecter le développement du fœtus.
Une expérimentation de trois ans d'un parcours de soins dédié aux "dépressions post-partum" a également été ajoutée.
7) Remboursement du matériel menstruel réutilisable
Les protections périodiques réutilisables, c'est-à-dire les culottes et coupes menstruelles, seront désormais remboursées pour les femmes de moins de 26 ans et toutes les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire.
Le texte grave aussi dans la loi la gratuité des préservatifs pour tous les assurés de moins de 26 ans.
8) Autorisation temporaire du cannabis thérapeutique
Un "statut temporaire" de cinq ans est accordé au cannabis thérapeutique, dans l'attente d'une décision d'autorisation de mise sur le marché par les autorités européennes.
Déjà autorisé dans d'autres pays européens pour calmer la douleur et l'anxiété de certains patients, le cannabis médical ne l'est en France que dans le cadre d'une expérimentation qui doit se terminer le 26 mars.
9) Maintien du régime de retraite Agirc-Arrco
Le gouvernement n'a pas ponctionné le régime de retraite complémentaire des salariés du privé Agirc-Arrco comme il en avait brandi la menace. Les partenaires sociaux se sont eux engagés à travailler sur d'éventuelles mesures pour contribuer au financement de la hausse des petites pensions de leurs allocataires.
10) Remboursement temporaire des séances d’activité physique adaptée
Pendant deux ans et à titre expérimental, l'Assurance maladie pourra rembourser des séances d'activité physique adaptée pour les malades du cancer.
11) Consultation du parlement avant l’augmentation des franchises médicales
Le gouvernement devra venir s'expliquer devant les commissions des Affaires sociales de l'Assemblée nationale et du Sénat avant tout projet qui consisterait à augmenter les franchises médicales, c'est-à-dire le reste à charge des assurés sociaux sur les boîtes de médicaments ou consultations chez le médecin.
12) Réduction de la tarification des hôpitaux
Le président Emmanuel Macron veut réduire la tarification à l'acte dans les hôpitaux. Introduite en 2003, elle est souvent accusée d'avoir poussé les établissements dans une course aux actes lucratifs et aux rendements.
Le budget de la Sécurité sociale 2024 introduit deux autres modes de financement, l'un basé sur des "objectifs de santé publique" et l'autre sur "des missions spécifiques". Mais cette réforme complexe ne commencera vraiment à être appliquée qu'au 1er janvier 2025.
Avec AFP