Patho mimi

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Critique de "Sick of myself", de Kristoffer Borgli (sortie le 31 mai 2023). Signe, une jeune femme en souffrance d'être dans l'ombre de son compagnon, un artiste à la carrière ascendante, se rend compte qu'être malade attire l'attention d'autrui. Forte d'avoir découvert l'eau chaude, elle va vite s'y brûler...

Patho mimi

Une fable contemporaine faiblarde qu'on a l'impression d'avoir vue mille fois. 

Sick of myself, l'ego comme maladie du siècle, psycho-pandémie de notre modernité. Ceci valait bien une fable, même si de tous temps le besoin d'être reconnu, d'être vu, et les recours pour y parvenir, ont été amplement décrits. Le réalisateur norvégien Kristoffer Borgli semble ainsi s'être contraint à "faire" moderne pour ne surtout pas "paraître" intemporel. Soit un couple tendance, celui de Sans Filtre mais en plus loser, qui n'a de cesse de vouloir réussir par les voies les plus rapides. Un propos dont l’originalité trouve écho dans notre actualité, où nos petites névroses, en cette ère déstigmatisante jusqu’à la dépathologisation, pourraient constituer un puissant levier adaptatif. A condition de savoir les rendre bankable et de disposer d’un minimum d’autocontrôle - car oui tout est toujours question de contrôle. Voilà pour la morale. Chacun a évidemment un intérêt qui lui est propre et dispose du symptôme qui y est rattaché : réussite facile et kleptomanie pour monsieur, besoin de reconnaissance et pathomimie pour madame. Un film qui fait genre, dans tous les sens du terme.

Mais n’est pas Ruben Östlund qui veut. Outre une réalisation brouillonne et des personnages dont le peu de consistance semble plus lié à des carences scénaristiques qu’à un choix délibéré, le propos tourne vite en rond, puis à vide. Cette maladie mystérieuse que Signe choisit de s'inoculer n'est autre qu'un bon vieux syndrome de Münchhausen dont l’auto-entretien ne résiderait pas tant sur l'attention médicale que sur celle de la société toute entière. Le film repose d’ailleurs sur un montage brouillant la frontière entre les fantasmes mégalomaniaques de la jeune femme et l'impact bien réel de son trouble factice. Une illustration assez peu subtile de la tendance actuelle à considérer le soi comme le plus grand centre d'intérêt collectif. Avec une outrance qui s’incarne dans la méticulosité avec laquelle l’actrice principale, aux faux airs de Naomi Watts, se voit infliger les transformations physiques les plus gore, décollement de peau pour la forme, peau de chagrin pour le fond. Tout ceci est à la fois bien convenu et fort grossier.

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