Crisis Data Hub, un rempart de données pour contrer les crises

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Et si les données personnelles pouvaient nous aider à mieux lutter contre les futures crises ? C’est la conviction de la délégation sénatoriale à la prospective qui invite la France à fonder un « Crisis Data Hub ».

Crisis Data Hub, un rempart de données pour contrer les crises

Agréger des données pour mieux lutter contre les crises. Le 3 juin dernier, la délégation sénatoriale à la prospective présentait l’unique proposition de son rapport baptisé « Le recours aux outils numériques dans la prévention et la gestion des épidémies ». « Nous aimerions créer une plateforme qui agrégerait des données de manière graduée en fonction de la gravité d’une crise », a expliqué lors d’une conférence de presse l’un de ses rapporteurs, le sénateur Les Républicains René-Paul Savary (Marne).

Une proposition audacieuse, surnommée le Crisis Data Hub, qui est née de l’expérience acquise pendant la crise sanitaire. « Au début de la pandémie, de nombreux outils numériques ont émergé. SI-DEP, Contact-Covid… Étant donné qu’ils ne sont pas interconnectés et qu’ils ne sont pas liés à des données de santé, ils ont pourtant un usage très limité », constate la sénatrice Véronique Guillotin (Rassemblement Démocratique Social et Européen - Meurthe-et-Moselle) qui pointe du doigt notamment l’absence d’information sur le statut infectieux des « cas contacts ». « Est-il normal qu’un informaticien de 24 ans, Guillaume Rozier, fasse mieux que Santé publique France avec son CovidTracker ? », déplore la délégation. Des failles d’autant plus béantes qu’elles se heurteraient à l’exemple des puissances étrangères. « Les faits sont là : les pays qui ont le plus utilisé ces outils sont aussi ceux qui ont, de loin compté le moins de morts », assurent les rapporteurs dans un communiqué de presse, citant à plusieurs reprises l’Estonie. « La prochaine fois, surtout face à une crise plus grave, nous devrons être capables d’aller plus loin et de réagir plus vite », poursuivent-ils.

Une conviction qui prend donc la forme d’une proposition.  « Ce que nous proposons n’est pas la création d’une base de données, mais une boite à outil », explique une autre rapporteuse, Christine Lavarde (Les Républicains - Hauts-de-Seine). Données de géolocalisation, des établissements financiers, des opérateurs de téléphonie ou encore des entreprises de transports pourraient être croisées aux données médicales afin de permettre aux pouvoirs publics de prendre les meilleures décisions possibles.  « Pandémie, chute de débris spatiaux, attaque bactériologique… L’idée est de pouvoir croiser les données personnelles afin de répondre à une situation de crise de façon générale », explique le Président de cette délégation, Mathieu Darnaud. Et Christine Lavarde d’ajouter : « Les ARS, les préfectures et l’État seraient les récepteurs de ces données. Mais seules les données dont ils ont besoin pour réaliser leurs missions seront utilisées ».

Loin du grand pompage d’informations personnelles, la délégation, qui rappelle son attachement à la défense des libertés individuelles, préconise plutôt l’usage de la « proportionnalité ». « En fonction des circonstances, il serait possible de recourir [aux données de cette boîte à outils] de façon graduée », écrivent-ils. Un principe que les trois rapporteurs illustrent par l’exemple : « Face à une crise « modérée », nous pourrions nous limiter à quelques outils d’information et de coordination. Face à une menace un peu plus grave, on pourrait imaginer l’envoi automatique d’un SMS à tout individu qui s’éloignerait de son domicile pendant le couvre-feu. Dans les cas les plus extrêmes, des mesures plus fortes pourraient s’avérer indispensables ». Information des forces de l’Ordre en temps réel, désactivation du titre de transport, amende prélevée automatiquement sont notamment citées.

Un outil « très puissant » que les pouvoirs publics ne pourraient solliciter qu’ « au bon moment ». « Le parlement pourrait donner l’autorisation d’utiliser cet outil, avec un contrôle permanent d’agents de la CNIL, de l’ANSSI ou encore de la société civile », détaille Christine Lavarde. Une précision utile quand on connaît la défiance française face aux dérives que peuvent parfois induire la captation de données personnelles… « Il sera important de communiquer sur les citoyens sur le fait que cet abandon temporaire de leurs données personnelles doit leur permettre de recouvrir plus de libertés individuelles », insiste Christine Lavarde.

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