Décès d’un patient à Angers : manque d’effectifs ou instrumentalisation ?

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Un patient est décèdé après avoir attendu aux urgences au CHU d’Angers. Le collectif Inter-urgences conteste la version des faits de l’établissement tout en rappelant que le service était en sous-effectif au moment des faits.

Décès d’un patient à Angers : manque d’effectifs ou instrumentalisation ?

Samedi dernier à 19h30, un homme de 49 ans se présente aux urgences du CHU d’Angers avec une douleur à la poitrine. Faute d’être pris en charge rapidement (l’infirmier chargé d’examiner les patients à leur arrivée est déjà occupé avec un autre patient), il quitte l’hôpital pour se rendre dans une clinique de la ville, où il décède une vingtaine de minutes plus tard.
 
Pour Christian Lemaire du syndicat Sud du CHU d’Angers, « ce patient aurait dû être pris en charge. Même si les deux événements ne peuvent pas être directement liés, ce décès illustre malheureusement là où peut nous conduire le manque chronique de personnels dans les urgences », relate Le Figaro.
 
En effet, au moment des faits, un seul soignant était présent, contre les trois soignants habituellement prévus dans l’équipe du soir pour aiguiller les patients à leur arrivée aux urgences, selon le syndicaliste qui rappelle que « les effectifs étaient réduits en raison de plusieurs arrêts de travail programmés. La direction avait été alertée de la situation mais elle n’a pas apporté de solution. »

Instrumentalisation de l’affaire ?

La réaction du CHU d’Angers ne s’est pas faite attendre. L’établissement dénonce l'association que certains ont cherché à faire entre le décès de ce patient et le débat national sur l’organisation des urgences. Et donne sa version des faits :
 
« Les effectifs de l’accueil des urgences étaient aux normes et les compétences assurées. De même, à l’arrivée du patient l’activité à l’accueil des urgences était modérée. Le temps d’attente n’excédait donc pas 15 mn pour les patients venus par leurs propres moyens. Médiatiser le contraire serait profondément regrettable alors même qu’une famille est en deuil et que des hospitaliers sont affectés. »
 
Le Figaro donne également la parole à l’établissement dans son papier, en relayant les propos du professeur Sigismond Lasocki, chef de pôle ASUR : « Une seconde infirmière était en charge de l’orientation des patients, mais il se trouve qu’elle donnait un coup de main dans une autre unité, étant donné l’affluence modérée aux urgences ».

Le collectif Inter-urgences donne sa version des faits

Une explication qui n’est pas du goût du collectif Inter-urgences qui donne sa propre version dans un communiqué daté du 18 juin. Ce jour-là, neuf infirmières auraient dû assurer la journée. Mais trois arrêts maladies ont été déclarés le vendredi, suivis d’un courrier de l’équipe à la direction pour manifester son inquiétude sur les conditions d’exercice du week-end en question, selon le communiqué.

Et le collectif, de poursuivre : « Sur ces 3 arrêts, 2 infirmières ont été remplacées, le 3e poste étant assuré par une infirmière d’un autre service, en 12H, de 7H à 19H. Il manquait donc une infirmière entre 19H et 21H ».
 
En outre, le « coup de main » décrit par le professeur Sigismond Lasocki correspond pour le collectif Inter-urgences « à un transfert d’agent pour pallier le manque d’effectif » car « la seconde infirmière » a pris les transmissions de l’infirmière sortant.
 
Et d’expliquer qu’en général, une infirmière est postée à l’accueil. Or, « comme il en manquait pour brancarder, celle-ci a été déplacée. Et, quand le patient est arrivé, la seule infirmière d’accueil disponible était en secteur de médecine en train de prendre en charge un patient grave qui venait tout juste d’arriver. »

Pas d’affluence modérée ?

Le secteur était par ailleurs surchargé selon le collectif qui réfute « l’affluence modérée » décrite par le professeur Sigismond Lasocki, car elle tiendrait compte du nombre de passages sans tenir compte de la « qualité des patients présents ».
 
Or, « il y a eu plusieurs accidents sur la voie publique ce jour-là, plusieurs détresses respiratoires… Si le secteur n’était pas surchargé en nombre de patients, la charge de travail était bien très importante », conclut le communiqué qui s’interroge sur l’adéquation des moyens au regard de la demande de soins.
 
À ce stade, « aucun élément ne permet de lancer des poursuites pour non-assistance à personne en danger ou homicide involontaire », a précisé le magistrat.
 
Mais, une chose est sûre. Si le mouvement de grève des urgences se poursuit dans les semaines qui viennent, ce genre de drame ne manquera pas d’attiser de nouveau les tensions entre les directions d’établissement et le personnel en grève.

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