Dr Henry Mercoli : « J'ai testé en avant-première le nouveau robot chirurgical Maestro, voici mon retour d'expérience après une centaine d'opérations »

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Moins encombrant, moins complexe et moins coûteux, Maestro, le robot de la start-up franco-américaine Moon Surgical pourrait débarquer dès cette année dans les blocs opératoires. On en discute avec le Dr Henry Mercoli, chirurgien digestif à la polyclinique de Franche-Comté (Besançon) et consultant pour l'entreprise, qui l’a expérimenté en avant-première.

Dr Henry Mercoli : « J'ai testé en avant-première le nouveau robot chirurgical Maestro, voici mon retour d'expérience après une centaine d'opérations »

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What’s up Doc : Quelle est la particularité du robot Maestro ? 

Henry Mercoli : Historiquement et majoritairement, les robots sont des télémanipulateurs, le robot est manipulé par le chirurgien, à distance du lit du patient. 

Avec Maestro, on change complètement de paradigme : le robot est au chevet du patient pendant l’opération, son empreinte au sol est faible (moins d’un mètre carré). Il va augmenter le chirurgien en lui fournissant deux bras supplémentaires, l’un va soutenir la caméra de célioscopie et le second va produire une assistance opératoire dynamique (rétraction et exposition des tissus…) 

Cela permet d’avoir une vision plus précise et une rétraction des tissus très stable, par rapport à un assistant opératoire qui peut être sujet à des mouvements parasites, de la fatigue… 

"Avec un système type Da Vinci, on estime que le coût par procédure les mille euros. Sur Maestro, on va diviser le coût par au moins cinq ou dix"

 

Qu’est-ce qui le distingue des autres robots du marché ? 

HM : Il est moins encombrant, moins couteux et moins complexe que les autres robots télémanipulateurs, adaptés à des chirurgies dites complexes. On sait qu'un grand nombre de procédures coelioscopiques ne nécessitent pas l’utilisation de robot d’une telle complexité.

Le robot Maestro va venir combler ce gap entre la célioscopie standard et la chirurgie robotique avancée. Il va permettre de réaliser un très grand nombre d'interventions chirurgicales beaucoup plus simples sans avoir besoin de mettre en place un système robotique extrêmement complexe là où ce n’est pas nécessaire (ablation de la vésicule biliaire, hernie, appendicite, chirurgie de l'obésité standard…).

 

Maestro est vraiment moins coûteux ? 

HM : Avec un système type Da Vinci, on estime que le coût par procédure avoisine les mille euros. Avec Moon Surgical, le coût va être divisé par au moins cinq ou dix. 

Dans certains cas d’opérations très simples, on peut également s’affranchir d’un assistant opératoire, ce qu’on appelle une « solo surgery ». Sur les 200 procédures expérimentées, on a pratiqué une quinzaine de solo surgeries.

Ça permet de pallier, en partie, le manque de personnel et pouvoir opérer en cas d’absence d’assistant, ça apporte vraiment de la valeur pour les établissements de soins.

Et c’est un avantage y compris pour les patients qui gagnent du temps : on n'est pas obligé d'attendre le lendemain, que l’équipe soit au complet pour nous aider à la manœuvre, on peut opérer le jour-même. 

"Il n’y a que 14 chirurgiens dans le monde qui ont testé le système : trois aux États-Unis et onze en Europe… pour un total d’un peu plus de 200 procédures" 

 

Côté patient justement, il y a d’autres avantages ? 

 HM : Côté patient et côté soignant ! On est en train de réaliser les statistiques, mais on peut s’attendre à une meilleure qualité d'intervention parce qu'on a une meilleure vision, une rétraction du tissu vraiment satisfaisante, meilleure même qu'avec un assistant humain. 

On note aussi une tendance à la diminution de la durée de certaines interventions chirurgicales. Grâce à ce système-là, l'assistant opératoire n'a plus ses deux mains bloquées à tenir des instruments de façon statique, c’est le robot qui le fait. Il peut donc participer à des tâches beaucoup plus « valorisantes », qui en plus, font gagner du temps. 

Maestro a aussi une action sur les éventuels troubles musculo-squelettiques des assistants opératoires, liées à l'action de tenir la caméra (douleurs au dos, aux épaules, à la nuque). 

 

Vous êtes parmi les premiers chirurgiens dans le monde à l’utiliser, qu’est-ce que ça donne ? 

HM : Effectivement, il n’y a que 14 chirurgiens dans le monde qui ont testé le système : trois aux États-Unis et onze en Europe… pour un total d’un peu plus de 200 procédures. 

La première opération a été réalisée avec succès en Belgique par le professeur Guy-Bernard Cadière. Ensuite, on a eu l'autorisation de mettre en place deux études pilotes uniques dans le monde : l’une à Besançon où je travaille, l’autre à l'institut A.Tzanck de Nice. 

Entre octobre et début mars, on a donc réalisé un peu plus de 200 interventions (une centaine par structure), dont des cholécystectomies (ablation de la vésicule biliaire), des hernies inguinales, des opérations du côlon et de l'œsophage, des chirurgies de l’obésité... et mêmes des chirurgies gynéco. 

"Le déploiement du système dans notre établissement a pris moins d'une semaine, de la livraison jusqu’à la formation. La formation  pour les chirurgiens a duré une heure et demie, c’est extrêmement rapide"

 

Quelle formation l’utilisation du robot nécessite-elle ? 

HM : C’est extrêmement rapide ! Aujourd’hui, la courbe d'apprentissage pour un robot classique est évaluée à au minimum cinq ans de procédure. 

Le déploiement du système Maestro dans notre établissement a pris moins d'une semaine en tout, de la livraison jusqu’à la formation. La formation à l’utilisation pour les chirurgiens a duré une heure et demie, c’est extrêmement rapide. Et on estime la courbe d’apprentissage à moins de dix cas. 

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/video/comment-le-chu-de-nice-forme-100-de-ses-jeunes-chirurgiens-la-robotique

 

Quand Maesto sera-t-il disponible pour tous ? 

HM : La start-up Moon Surgical a obtenu le marquage CE, donc espère commercialiser le système cette année en Europe. Aux Etats-Unis, il est attendu pour septembre. 

Le business model penche plutôt vers une sorte de leasing : un coût initial d'installation plutôt faible, puis un coût par procédure qui va diminuer en fonction du volume de procédure. 

Mais la société est tout à fait flexible : si des établissements veulent acheter le système de façon classique, c'est tout à fait envisageable. 

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