COVAX : pourquoi un tel retard ?

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L’Europe tente de jouer un rôle moteur dans la distribution de doses de vaccins aux pays les plus pauvres. Mais entre protectionnisme, tensions d’approvisionnement et retards de distribution, les obstacles sont nombreux.

COVAX : pourquoi un tel retard ?

A l’heure où nous écrivons ces lignes, seuls 8% des habitants des pays les plus pauvres ont reçu leur première dose de vaccin contre le Covid-19, alors que 67% de la population des pays les plus riches est vaccinée (chiffres OMS).
Comment un tel écart peut-il se creuser alors que le programme COVAX lancé à l’été 2020 sous l’égide de l’OMS, de l’Unicef et de l’Alliance du vaccin (Gavi), avait pour objectif de le réduire rapidement ? Au lieu des 2 milliards de doses prévues au départ, l’objectif a déjà été abaissé en 2021. Les causes de ce retard sont multiples.

Tensions d’approvisionnement en Inde

Lors d’un colloque sur l’Europe de la Santé organisé par la Chaire santé de Sciences Po ce jeudi 13 janvier, la députée Chrysoula Zacharopoulou, LREM, co-présidente du Conseil des actionnaires de COVAX a tenu à saluer les dons de vaccins français et européens. Mais elle a aussi souligné les retards : « Le président Macron a été leader en Europe sur la solidarité vaccinale et a été suivi par les 26. Trois milliards d’euros ont déjà été investis dans ce programme par l’Europe pour acheter et distribuer des vaccins aux pays les plus pauvres. Mais l’Inde a fermé certaines de ses usines de production et nous nous sommes retrouvés à court de doses (…) A fin 2021, l’Europe avait donné 380 millions de doses, se plaçant ainsi comme premier exportateur de vaccins au monde ».
De fait, en Inde, en mars-avril 2021, alors que le pays est touché de plein fouet par la pandémie, le gouvernement annonce qu’il stoppe les exportations. Cette situation fera prendre plusieurs mois de retard aux pays dépendants de l’aide internationale. « Dans la mesure où 90% de la chaine d’approvisionnement du COVAX repose sur des fournisseurs indiens (une stratégie plutôt imprudente), la fragilité du système a été pleinement exposée », écrivait en août 2021 Magali Chelpi-den Hamer, chercheuse à l’IRIS.  
En octobre 2021, un article paru dans The Lancet soulignait qu’en raison des difficultés d’approvisionnement, seuls 39 pays sur les 89 initialement éligibles au programme COVAX en raison de leurs faibles revenus, allaient recevoir des doses de vaccins.
 

Doses presque périmées

Un autre problème a été mis à jour récemment : certaines doses de vaccins données dans le cadre du programme COVAX ont une date d’expiration tellement proche que les pays bénéficiaires ont dû rejeter ou détruire en décembre 2021 plus de 100 millions de doses, a indiqué l'agence Reuters le 14 janvier. Le Nigeria a ainsi détruit le 22 décembre 2021 plus d’un million de doses de vaccins Astrazeneca qui arrivaient à leur date d’expiration et ne pouvaient pas être utilisées sans danger.
Si la mise en oeuvre logistique du programme COVAX est très lourde et complexe, comme le décrivait dès le départ l'Unicef cette information laisse néanmoins perplexe compte-tenu de la tension persistante sur la demande mondiale en vaccins.
A ce jour, COVAX a délivré 987 millions de doses à 144 pays, soit un peu moins de la moitié de l’objectif initial des 2 milliards de doses qui était fixé pour fin 2021. Cependant, à chaque émergence d’un nouveau variant, l’ensemble de la communauté scientifique s’élève pour rappeler que nous ne vaincrons pas cette épidémie tant que la population mondiale ne sera pas majoritairement vaccinée.
 

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