Trompette de la mort

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Ciné week-end: Born to be blue, de R. Budreau (sortie le 11 janvier 2017)

Trompette de la mort

Fin des années 60. Le trompettiste Chet Baker, empêtré dans des affaires de drogue, tente un come-back rapidement avorté par un passage à tabac endommageant gravement sa mâchoire. Il va pourtant réapprendre à jouer et se réinsérer, grâce à l'amour de sa compagne et à un nouveau programme de soins: la substitution par methadone...

La saison des biopics continue, avec une belle surprise au programme de cette semaine. Un épisode méconnu de la vie - mouvementée - de Chet Baker, probablement romancé, résolument optimiste et apaisé comme une mélodie dont il avait le secret. 
Il s'agit en effet de la seule période pendant laquelle il réussira à tenir réellement à distance ses démons, avec à la fois la crainte de ne plus retrouver son talent et sa motivation constante à y parvenir. 

Le film est porté par un Ethan Hawke restituant magistralement les fêlures et la complexité de son personnage, pouvant passer des tourments ravageurs de son addiction à l'héroïne à une légèreté cabotine en une fraction de secondes. Sa partenaire ne manque pas de caractère et est suffisamment solaire pour nous faire croire à la possibilité d'un décrochage durable. 

Sous ses airs de film classique de rédemption, Born To Be Blue apparaît comme un éloge discret des programmes de substitution, restituant parfaitement le glissement d'une époque fortement "prohibitionniste" - où les toxicomanes n'étaient bons qu'à être jetés en prison - vers une politique médico-sociale engagée bien que balbutiante (rappelons que les programmes de substitution n'apparaîtront réellement que plusieurs décennies plus tard dans notre bon pays!). 

Brassant des thématiques telles que la résilience et la motivation, le film montre cependant à quel point la toxicomanie de Baker reste un fantôme qui le hante, une bête tapie dans l'ombre et prête à bondir, un combat constant entre deux parts de lui-même. Et suggère de façon subtile que ce n'est pas l'autodestruction qui assure la fécondité et la force d'une oeuvre, mais plutôt la mobilisation psychique qui en résulte. Optimiste, mais pas angélique....

Source:

Guillaume de la Chapelle

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