HENRI LOO

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PU-PH de psychiatrie au centre hospitalier Sainte-Anne À Paris

HENRI LOO

Les premières fois...

Quelle est la première fois où tu as souhaité faire de la psychiatrie ?

HL Mon père était médecin des hôpitaux psychiatriques. Il avait une maison de fonction à l’intérieur de l’hôpital, à La-Charité-sur-Loire dans la Nièvre. Très tôt, j’ai été élevé par des malades mentaux… À l’époque, il y avait des patients employés dans les hôpitaux psychiatriques. La cuisinière était une grande schizophrène. Celle qui s’occupait de nous était une grande délirante paranoïaque. Ça m’a toujours séduit!

Quelle est la première fois où tu as examiné un patient ?

HL J’aurais presque envie de dire «quand je parlais avec la cuisinière»! Je n’étais pas encore médecin, mais c’était déjà une confrontation aux malades psychiatriques. De temps en temps, elle s’agitait et je l’interrogeais : «Françoise, est-ce que vous entendez des voix ? Qu’est-ce qu’elles disent ? Qu’est-ce qu’elles veulent ?Est-ce que vous avez pris votre Largactil® ?».J’ai fait ça très tôt !

Quelle est la première fois où tu as eu raison contre ton chef ?

HL Je ne me suis jamais vraiment opposé à mes supérieurs. J’avais un patron exceptionnel, Pierre Deniker, et j’étais en admiration devant lui. Un jour, nous discutions au sujet d’une patiente hallucinée, d’origine maghrébine ; lui pensait à une psychose hallucinatoire chronique. J’ai émis une réserve car les syndromes dépressifs chez les maghrébins peuvent simuler des syndromes hallucinatoires. Nous n’étions donc pas d’accord sur le diagnostic. Mais il a trouvé que c’était une très bonne idée! Finalement, nous l’avons mise sous thérapeutique antidépressive et non neuroleptique, et elle a guéri…

Quelle est la première fois où tu as envisagé une carrière hospitalo-universitaire ?

HL Lors de mon arrivée chez Pierre Deniker pour mon dernier semestre d’interne. Il m’a rapidement proposé un poste de chef de clinique. Je me suis tellement bien entendu avec lui que la carrière hospitalo-universitaire qui était la sienne m’a séduit aussi.

Quelle est la première fois où tu as pensé à arrêter la clinique ?

HL Je n’ai encore jamais pensé à arrêter. Je continue toujours !

 

Les dernières fois...

Quelle est la dernière fois où tu t’es senti dépassé ?

HL Très récemment, devant une grande agitation résistante à toutes les thérapeutiques, et même à la sismothérapie. Nous étions complètement dépassés. Nous avons même envisagé une lobotomie !

Quelle est la dernière fois où tu es allé aux urgences voir un patient ?

HL Il y a plus de 10 ans. Les patients que je vois maintenant sont des patients du service qui posent des problèmes diagnostiques ou thérapeutiques à nos jeunes collaborateurs, internes ou chefs de clinique.

Quelle est la dernière fois où tu as été ému par un patient ?

HL Oh, ça, ça m’arrive souvent! La dernière fois, c’était il y a à peine 8 jours. Un malade dans une grande régression, à la dérive. Une situation génératrice d'un profond désarroi, pour le sujet comme pour son entourage, très émouvant. Ils paraissaient perdus, et nous n’avions aucune réponse univoque et assurée à leur proposer.

Désarmant.

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