Les médecins font-ils de meilleurs directeurs d’hôpitaux ?

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Les médecins font-ils de meilleurs directeurs d’hôpitaux ?

D'après un article paru la semaine dernière dans la Harvard Business Review, les hôpitaux tenus par des médecins fonctionnent mieux. Faut-il que les toubibs prennent le pouvoir à l'hôpital ?

Les médecins seraient-ils de meilleurs dirigeants d'hôpitaux que les directeurs sans formation médicale ? C’est ce que suggère le Dr James Stoller, pneumologue à la Cleveland Clinic, dans un article paru la semaine dernière dans la Harvard Business Review. Ce praticien prend deux exemples : la Mayo Clinic et la Cleveland Clinic, considérées comme les deux meilleurs établissements des États-Unis. Il se trouve qu’ils sont pilotés par des médecins, et ce depuis toujours. De quoi, selon l’auteur, se poser des questions. D’autant plus que plusieurs études, dont une menée sur 100 hôpitaux américains, confirment sa théorie.

« Les médecins ont une meilleure vision stratégique »

Selon le directeur de la Cleveland Clinic, cité par James Stoller, il s’agit avant tout de crédibilité. Grâce à son expérience sur le terrain, le médecin est plus susceptible de comprendre les besoins de ses collègues. D’autre part, les médecins dirigeants mèneraient une stratégie davantage axée sur le patient. Ils sauraient aussi reconnaître les « bons médecins » à l’embauche et auraient plus tendance à accepter les idées novatrices.

Ces résultats sont-ils applicables à la France ? « Les médecins ont une meilleure vision stratégique grâce la connaissance du besoin des patients », déclare le Dr Hakim Chabane, qui est à la fois urgentiste et directeur en poste dans l’Océan indien. Il est l’un des rares médecins à avoir passé le concours de l’École nationale de santé publique (ENSP), qui permet d'accéder aux fonctions de directeur.

« Connaître l’avenir des techniques médicales est plus accessible aux médecins de formation qu’aux directeurs d’hôpitaux », indique-t-il. Autre avantage : le médecin dispose d’un réseau qui peut l’aider à structurer les filières de recrutement. Le PH reconnaît toutefois qu’il ne suffit pas d’être médecin pour diriger correctement. « Les médecins ne sont pas forcément de bons managers et travaillent mieux en compagnie d’un adjoint administratif », remarque-t-il.

Pas si tentant que ça

De son côté, Clara de Bort, directrice de la Réserve sanitaire, regrette ce constat catégorique. « En quoi la crédibilité médicale prévaudrait-elle sur une capacité à correctement arbitrer ? », rétorque-t-elle. « Ce ne sont pas les mêmes métiers. » Même si elle reconnaît que les médecins ont une bonne vision stratégique, beaucoup auraient d'après elle des idées inapplicables. « J’en ai vu qui étaient incapables d’évaluer le personnel nécessaire pour leur projet, et ne prenaient pas en compte le droit au repos », se souvient-elle. « Il y a certaines dimensions que les médecins n’ont pas en tête, comme le droit. »

Mais au final, les médecins ont-il vraiment envie d'accéder à de telles fonctions ? « J’ai croisé très peu de médecins souhaitant devenir directeur », note Clara de Bort. Malgré l'accueil chaleureux réservé à ceux qui se présentent, ils ne seraient qu’un ou deux chaque année sur une promo d’une centaine à se présenter au concours de l'ENSP. « La plus grande difficulté est d’abandonner la clinique pour faire autre chose », explique Hakim Chabane. « Je n’ai plus le temps d'exercer. »

Source:

Im`ene Hamchiche

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