Le rire médecin : les clowns fêtent leurs 30 ans à l’hôpital

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En 1991, Caroline Simonds, comédienne, a fait ce pari, un peu fou, de faire rentrer des clowns à l’hôpital. Le but, accompagner les patients et ajouter un peu de légèreté à un quotidien difficile. 30 ans plus tard, quel est l’impact des comédiens sur les patients et les soignants ?

Le rire médecin : les clowns fêtent leurs 30 ans à l’hôpital

Le 22 juin, le Rire médecin organisait une conférence de presse à l’occasion de son 30ème anniversaire. Un bilan qui a permis de revenir sur la genèse et les effets de la présence de ces compagnons de chambre au nez rouge.

Un bénéfice pour les patients

Des témoignages présentés lors de la conférence font état d’un apaisement des jeunes patients et de leurs proches. Laurent Ali, papa d’un petit garçon qui a connu les clowns médecins est venu témoigner : « Cela nous a permis de vivre l’hôpital en essayant de garder le sourire, on s’est senti encore mieux entouré, on essayait de venir quand les clowns étaient là ».

Mais au-delà des témoignages, comment quantifier les effets de ces animations ? Cette année, le rire médecin se penche en effet sur cette évaluation. Au CHRU de Nancy, une étude est mise en place pour évaluer les bénéfices de la présence des clowns lors de la réalisation de soins douloureux. Le Pr Pascal Chastagner, directeur du service d’onco-pédiatrie au CHRU Nancy a présenté cette étude. « Il s’agit d’une étude randomisée en cross over, où l’enfant est son propre témoin. Nous allons alterner les gestes avec et sans présence des clowns, avec une évaluation après chaque geste. Il est prévu d’inclure 74 enfants pour 24 mois, ils auront de 5 à 16 ans. Les retombées sont attendues : il s’agira de la première étude scientifique nationale réalisée en France, sur les effets de la distraction par les clowns. »

… et les soignants

Une collaboration qui semble aujourd’hui entrée dans les mœurs mais qui a pu être surprenante les premières années. « Au départ, la présence de clowns n’est pas évidente, le personnel trouvait les clowns bruyants et vice versa. Pourtant, quand les clowns sont arrivés dans le service, ils ont apporté des éclats de rire dans un univers sérieux et protocolaire, grâce à leur façon d’interagir, le rire a pris place dans le service, autorisé à rire même dans un univers difficile. Mais aussi un autre regard sur l’hôpital, une autre façon de vivre l’hospitalisation. Il fallait s’ouvrir à d’autres cultures. Il y a eu un échange des clowns vers nous et nous vers eux, nous avons appris de leur regard, leur façon d’être des professionnels et communiquer. J’ai changé ma façon d’examiner les enfants et d’interagir avec eux. Cela permet de faire progresser notre prise en charge, de mieux faire pour les enfants et leurs familles », se rappelle le Dr Dominique Valteau-Couanet, cheffe du département de pédiatrie à Gustave Roussy.

Les comédiens pour former à l’annonce des mauvaises nouvelles

Derrière le clown, il y a un comédien. Et ce dernier est aussi un allié lorsqu’il faut apprendre. Hubert Lardy est chirurgien pédiatrique et responsable pôle enfant CHU Tour, chef de service et chargé de la gestion des ateliers de simulation à l’annonce des mauvaises nouvelles auxquels participent les comédiens du Rire médecin.

« Les internes ont passé le concours dans leur spé. Pour les aspects humains, on a monté un programme à Tour, notamment pour la formation à l’annonce des événements indésirables associés aux soins. Il y a un briefing de l’apprenant et des comédiens, situation souvent issue d’un fait réel pour augmenter le réalisme des situations. Il y a un scénario puis un débriefing avec les acteurs qui vont donner leur impression. » 

Selon les chiffres présentés par le Dr Thomas Baugnon, Anesthésiste réanimateur pédiatrique, Hôpital Necker Enfants malades, 75% des internes ont déjà annoncé une mauvaise novelle, mais dans 51% des cas, ils n’ont pas eu accès à un débriefing par la suite pour voir les axes d’amélioration. 98% des soignants recommandent une telle formation à leur collègues et 89% pensent que cela aura un impact sur leur pratique.

Le Dr Marion Grimaux, pédiatre à Necker, a eu l’occasion d’en bénéficier. « Cela m’a aidée car on n’a pas forcément les clés au départ. Avoir un débriefing est très enrichissant, cela m’a été utile pour la suite car dans la vraie vie, nous n’avons que rarement un retour en direct ».

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