« Urgentistes, médecins de ville, chef de service… On peut venir de tous les univers pour devenir médecin de terrain à l’ARS, si on a de la curiosité et du bon sens »

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Il en parle avec passion et réalisme. Mathieu Nguyen est médecin responsable du pôle 33 à l’ARS Nouvelle-Aquitaine depuis 7 ans. Comme tous les médecins, à son arrivée, il ne savait pas trop ce que l’exercice à l’ARS serait réellement… et ça a été une très belle surprise sur tous les plans, qu’il nous partage aujourd’hui.

« Urgentistes, médecins de ville, chef de service… On peut venir de tous les univers pour devenir médecin de terrain à l’ARS, si on a de la curiosité et du bon sens »

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« Je suis âgé de 47 ans, j’ai fait mes études de médecine à l’université de Bordeaux, j’ai passé une thèse de médecine générale en 2007. Avant mon arrivée à l’ARS en 2016, j’ai fait quelques années de remplacement dans des cabinets de ville ou en campagne puis j’ai rejoint une clinique privée. Je m’occupais de la prise en charge en médecine générale de patients atteints de cancer. Je me suis spécialisé dans les soins palliatifs et les douleurs complexes. Ensuite j’ai été chef d’un service de SSR à orientation oncologique, à l’hôpital public, au CH de Libourne.

A côté de mes temps cliniques, j’embrassais déjà des responsabilités administratives, qui m’ont fait connaitre des acteurs de l’AFDAS (Association française pour le développement des approches spécialisée), et de l’ARH (Agence Régionale d’Hospitalisation), devenue l’ARS (Agence Régionale de Santé) en 2010. Et de fil en aiguille, mes échanges avec les conseillers médicaux de l’ARS, m’ont amené à recevoir une proposition de poste que j’ai acceptée.

 

« Nous sommes 5 médecins au pôle médical 33 : un généraliste spécialisé en oncologie, un médecin clinicien issu du SSR, une médecin de Santé Publique, une ex chef de service d’urgence… »

 

Il y a des médecins à l’ARS qui ont plusieurs profils et plusieurs missions : je suis un médecin de délégation départementale, c’est un métier radicalement différent des conseillers médicaux du siège. Je suis au plus près du terrain. On rencontre les acteurs. On déploie la politique nationale et régionale en santé, en proposant une offre de soins adaptée aux ressources et aux besoins du territoire.

Je suis le responsable du pôle médical 33. Nous sommes actuellement 5 médecins. Et tous mes confrères viennent d’horizons bien différents :

  • Le Dr David Goossens est un médecin clinicien, spécialisé en médecine physique et de rééducation. Il était clinicien, directeur médical et même président de CME. Là, il a pris la thématique du SSR, mais comme l’exercice en ARS demande curiosité et agilité à passer d’un thématique à l’autre, il est aussi référent thématique de la périnatalité, référent premier recours et référent précarité. Ainsi il a un poste large, qui lui permet de mener plusieurs projets de fond, et une vraie diversité.
  • La Dr Bruna Alves est une médecin de santé publique. Elle est plus sur l’analyse de la santé des populations ou l’analyse de performance des établissements de santé et nos regards et nos expertises sont totalement complémentaires.
  • La Dr Catherine Cerfontaine est clinicienne. Elle était chef d’un service d’urgence en région parisienne, et elle fait un cumul emploi retraite, elle s’occupe de la gestion des services d’urgence de la Gironde à mi-temps.
  • Et le dernier arrivé est un médecin généraliste qui avait monté son cabinet, une MSP. Il est au fait de la compréhension des difficultés des médecins traitants, des déserts médicaux, des remplacements, de la permanence de soins. On va profiter de sa lecture. Il va aussi s’occuper du handicap.

 

« Notre rôle, avoir un œil vigilant pour offrir à l’ensemble de la population une offre de soin équitable et qualitative »

 

Pour expliquer nos actions, je vais prendre un exemple concret : il y a une maternité en souffrance dans un territoire excentré, dans le Haut-Médoc. La pénurie de gynécologue frappe l’ensemble du territoire. Et pour un fonctionnement en adéquation avec le code de santé publique, il faut un minimum d’obstétriciens en poste pour garder une maternité ouverte. Or cet été, pendant deux semaines, les médecins n’étaient pas assez nombreux au planning. Donc on a anticipé. L’ARS s’est rapprochée des autres établissements, pour établir un plan, informer les patientes, assurer la continuité des soins des femmes enceintes. Il a fallu gérer 6 accouchements sur cette période de fermeture. Les patientes sont contactées, les maternités les plus proches aussi, les dossiers sont transmis, les chambres d’hôtel prévues… En fait nous devons avoir un œil vigilant pour offrir à l’ensemble de la population une offre de soin équitable et qualitative.

Un jour, quand j’exerçais à l’hôpital, un médecin m’a dit : “est-ce que ça t’intéresserait de troquer ton stéthoscope, et au lieu de voir 20 ou 30 patients par jour, tu viendrais participer à la prise en charge d’une population d’1,5 million d’habitants sur 365 jours…”

 

« Je ne pensais pas que l’exercice de conseiller médical serait si divers, c’est très varié et donc très attractif pour moi »

 

Je ne pensais pas alors que l’exercice de conseiller médical serait si divers. Mon agenda est très mouvant. Je peux être appelé sur une situation de crise à tout moment. Je suis très dépendant de l’actualité, et donc je ne me lasse jamais, car il y a une part d’inattendu, des sujets sur lesquels je vais devoir me renseigner, me documenter auprès de mes confrères, chercher de l’information pour exercer mon rôle. Car je n’ai pas une expertise sur 100% des sujets, mais je dois être en capacité de donner des avis étayés sur tous les dossiers. C’est aussi le grand écart qui me motive, entre un appel téléphonique avec un journaliste et un appel à la mairie pour gérer l’incendie d’un bloc opératoire d’un établissement de santé suite à un court-circuit, gérer l’évacuation, ça s’est encore passé la semaine dernière. C’est très varié. Et donc très attractif pour moi.

 

« Mon évolution salariale en 7 ans à l’ARS est bien plus nette que durant les 7 années qui ont précédé mon arrivée »

 

Je suis fils de médecin généraliste. A l’époque, on s’installait à un endroit et on y restait toute sa vie. Pendant mes études, on nous avait dit qu’on aurait plusieurs postes. Là, je suis à ma troisième vie professionnelle, entre le public, le privé, l’ARS. Je m’éclate et je n’ai aucune aspiration à changer. Je reçois des offres mais je suis bien. J’ai un équilibre professionnel et familial qui est parfaitement en adéquation avec mes attentes. Et je n’ai pas un horizon bouché, j’ai une progression salariale bien plus nette en 7 ans au sein de l’ARS, qu’en 7 ans dans l’établissement privé où j’ai travaillé. J’ai monté d’échelon, des formations m’ont été proposées. Si je veux, je peux envisager une mobilité et candidater au sein d’autres ARS.

L’adéquation entre vie personnelle et professionnelle est très importante pour moi. J’ai quatre enfants, et mon épouse a repris ses études. Elle était infirmière, désormais elle est en dentaire. Et donc avec ma direction, nous avons organisé mon poste partiellement en télétravail. Je vais chercher mes enfants à l’école et je travaille ensuite avec eux à mes côtés et cela ne m’a pas empêché d’évoluer dans la hiérarchie. Si j’étais resté hospitalier, ou généraliste en libéral, je n’aurais pas pu faire cela.

 

« Ce n’est pas une honte d’être père, de vouloir s’occuper de ses enfants, et d’avoir une belle évolution de carrière »

 

Ce n’est pas une honte, et on n’a pas à se cacher d’être père et de vouloir s’occuper de ses enfants. Je pense que certains de mes confrères hommes ont les mêmes aspirations. La société évolue et le métier de conseiller médical en ARS permet cette opportunité-là.

Je ne veux pas vendre du rêve, en arrivant il faut faire ses preuves et s’investir. Mais une fois qu’on s’est intégré, qu’on a montré sa motivation et son efficacité, tout est possible. Mais bien sûr un médecin ne peut pas débarquer et réclamer 4 jours de télétravail, aucune d’astreinte, juste parce qu’il vit sur le bassin d’Arcachon et qu’il y a des bouchons. Ben non, il faut travailler.

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/page/agence-regionale-de-sante

Les deux qualités pour exercer ce métier de conseiller médical, sont la curiosité et le bon sens. Curiosité, car on ne s’enferme pas dans un seul sujet. Bon sens car nous sommes face à des acteurs de terrain et il faut trouver des solutions concrètes et pas hors sol. Après on peut venir de tous les horizons : des directeurs médicaux, des cliniciens, des chefs de service, des médecins de santé publique, des généralistes, les profils sont variés. Mais tous partagent ces deux qualités. »

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