Expérimentation du cannabis médical : quel rôle pour les professionnels de santé ?

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L’expérimentation sur le cannabis médical est prête à être lancée. D’ici le 31 mars, les premiers patients et professionnels de santé vont intégrer les registres pour les prochains 24 mois. Comment cela se passe-t-il concrètement pour les médecins et pharmaciens participants ?

Expérimentation du cannabis médical : quel rôle pour les professionnels de santé ?

L’ANSM y travaille depuis 2018. L’expérimentation est prête pour son top départ. D’ici le 31 mars, les premiers patients vont pouvoir participer à l’essai pour le cannabis médical.

Pour quels patients ? 

« Ce traitement n'est jamais envisagé en première intention. Il est indiqué en cas de douleur neuropathique réfractaire aux traitements conventionnels, à la spasticité douloureuse qelle que soit l’étiologie, à l'épilepsie pharmacorésistante, certaines complications liées aux cancers et chimothérapies anticancéreuses (lorsque les patients ne sont plus en traitement). Et dernier cas, les situations palliatives, on raisonne alors en termes de qualité de vie plutôt que de symptômes», détaille Nicolas Authierpsychiatre pharmacologue au CHU de Clermont-Ferrand, et président du comité scientifique de l’expérimentation du cannabis médical de l’ANSM, contacté par WUD. 

Quels professionnels  concernés ? 

« Cela fonctionne par structures hospitalières notamment les structures des douleurs chroniques, centres experts épilepsie ou scléroses, services de soins de support en oncologie et structures de soins palliatifs. Ensuite sont concernés les médecins qui exercent dans ces structures, quelle que soit la spécialité (souvent des neurologues, médecins rééducateurs ou oncologues). Il y en aura 2, 3 ou 4 dans ces structures, mais rappelons que l'expérimentation ne comporte que 3 000 places en France donc une dizaine de places dans chaque établissement », explique Nicolas Authier. « Ensuite, il est possible d'organiser un relai auprès du médecin traitant, on peut même lui confier la fin de l’adaptation posologique. Il s'agit souvent du généraliste mais cela peut être le neurologue libéral par exemple

Idem du côté des pharmacies. Si la première prescription se fait par celle de la structure, les officines de ville peuvent ensuite prendre le relai, à conditions d'avoir suivi la formation et d'être inscrites sur le registre. 

La formation des professionnels, un élément capital 

La formation est un élément indispensable au bon fonctionnement de l’expérimentation mais également qui conditionne la capacité de prescrire pour les médecins et celle de délivrer pour les pharmaciens.

La formation prendra la forme d’une session gratuite de e-learning de 2h30. « Elle comporte des éléments sur la prescription, la délivrance et la titration des patients. Tout est téléchargeable sur le site. Le lien est mis en place, les professionnels de santé peuvent déjà se positionner. Cette formation est validante. Il y a par exemple des QCM suivant les différents chapitres. Les personnes doivent valider obligatoirement un certain nombre de modules pour être éligibles à l’inscription », explique Nathalie Richard, directrice du projet à l’ANSM lors d’un point presse le 4 mars.

Le choix du e-learning s'est fait pour toucher plus facilement les 4 500 professionnels concernés, « si on veut le faire rapidement et en plus en temps de Covid, c'était le format évident.  Cela permet aussi une souplesse d’utilisation, la suivre en plusieurs temps», ajoute Nicolas Authier.  

La formation démarre le 9 mars. A cette date, la liste des structures de référence volontaires seront également publiées ainsi que le registre de suivi des patients et l'approvisionnement des pharmarcies. 

« Les médecins hospitaliers sont déjà inscrits à la formation, tous les volontaires. Il est nécessaire de l'avoir validée pour inclure le premier patient. Ensuite les pharmaciens de ville et médecins libéraux seront formés quand ils devront prendre la main. Il est préférable de contacter le médecin traitant avant d’intégrer le  patient pour savoir s’il est prêt à prendre la suite», illustre Nicolas Authier.

Le rôle du médecin

Le médecin doit avant toute chose vérifier que le patient remplit bien les critères d’inclusion. Les médecins des structures référentes doivent assurer des consultations longues dans la structure au cours du 1er, 3è, 6è, 12è et 18è mois. Au cours de l’expérimentation, le médecin de ville devra aussi assurer des consultations de suivi régulières.

Autre point, la prescription doit suivre les mêmes règles que pour n'importe quel produit stupéfiant : préscription sur ordonnance sécurisée, rédaction en toutes lettres, renouvellement tous les 28 jours. 

Le rôle du pharmacien

Le pharmacien est le dernier verrou pour que l’application soit sécurisée. Il doit vérifier la formation et l’inscription du médecin prescripteur ainsi que l’inclusion du patient dans l’expérimentation.

La première délivrance doit s’effectuer dans un centre de référence volontaire, les suivantes pourront se faire dans des pharmacies de villes si celles-ci sont inscrites sur le registre. Il est nécessaire d’avoir plusieurs professionnels formés dans une même officine pour assurer la continuité de la délivrance.

Les médicaments en question seront délivrés sous forme d’huiles par voie orale ou de fleur séchée pour inhalation après vaporisation.

L’inscription des professionnels de santé sur le registre, se fait à partir de l’inclusion de premier patient dans l’expérimentation.

Une synergie entre les différents professionnels  

« Cette expérimentation teste un accès à un médicament, une nouvelle classe thérapeutique. Mais cela permet de mettre le doigt sur la nécessité d’une grande collaboration entre les différents professionnels de santé, d'échanger, y compris avant la prescription du traitement. La clé de la réussite est la communication entre ces différents professionnels impliqués. Il ne s'agit pas d'un traitement qui se met en place en urgence, il faut prendre le temps de s’appeler pour voir si toute l’équipe est d’accord », conclut Nicolas Authier.  

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