Conte à rebout

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Critique de "Des mains en or", d'Isabelle Mergault (sortie le 7 juin 2023). La vie de François, écrivain renommé promis à l'Académie Française, est gâchée par des dorsalgies chroniques. A moins que ces douleurs ne soient que la conséquence de ses choix et de son rapport à la vie. Tout change radicalement pour lui le jour où il passe des mains de sa femme et prescriptrice d'antalgiques, à celles de Martha, guérisseuse croquant la vie à pleines dents.

Conte à rebout

Isabelle Mergault signe un film surgi d'un autre temps, un « Nuit d’ivresse » post-Covid constamment mal fichu et régulièrement gênant.

Voilà un film qui ne manque de nous surprendre tant il va à rebours de toute modernité, à un point tel qu’il ne peut s'expliquer que par l'opiniâtreté de sa réalisatrice à ce qu’il en soit ainsi. C'est bien simple, hormis le téléphone portable, absolument rien dans les décors et les situations ne pourrait nous suggérer que nous avons dépassé les années 80. Isabelle Mergault décrit des univers d’un autre âge, que notre accélération technologique rend encore plus révolus. La province, entre manoir et troquets, se pare d’archétypes télévisuels et théâtraux, entre « Maguy » et « Au théâtre ce soir », avec ses serviteurs dociles et ses rupins confits en idiotie.

Ce refus de l'air du temps, cette nostalgie de celui qui était bon et vieux, imprègnent tout, la forme, mais également le sujet, tant il y a, dans cette histoire de guérisseuse dont le don et la simplicité s'avèrent tellement plus efficaces que ces poisons modernes que sont la médecine et le progrès, un fond de complotisme jamais assumé, adouci par une bonhommie qui réussit à passer en loucedé certains messages bien limite sur les vertus d’un libertarisme absolu. 

Inévitablement, se confronter à la nostalgie conduit Mergault à un tiraillement entre une tendresse réelle, qu'elle voudrait imposer, et un penchant aigre pour la caricature à gros traits, autant simpliste que méchante, de tout ce qui ne lui conviendrait pas. Le problème, c'est que cette lutte avec elle-même empêche totalement la matérialisation de l'humanité dont elle voudrait se faire l'étendard. Hormis Josiane Balasko qui semble se donner corps et âme à ce personnage de Cendrillon mâtinée de Bécassine maintes fois joué mais qu'elle arrive à ne jamais rendre déplaisant, tout le reste de la distribution l'est. Mention spéciale à Sylvie Testud, incroyable erreur de casting qui, en chirurgienne imbuvable, se vautre dans tous les sens du terme.

Vu comme ça, le film a tout du repoussoir. Mais sa vision va au-delà de toute émotion négative, tant il y a dans ce geste radical, assorti de multiples maladresses de réalisation, de rythme, d'absence totale de direction d'acteurs, une trajectoire sidérante, la bonne franquette mi sitcom d'antan mi Patrick Sébastien des débuts évoluant vers des sommets de what the fuck - personnellement, alors qu’un cameo totalement improbable de Caroline Loeb nous avait mis la puce à l’oreille, Mergault nous a définitivement perdus lors d’une inénarrable scène de Lotobouse... Cette sidération vaut à elle seule une séance chez le magnétiseur!

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