"J’ai gagné le prix Casden mais pour moi la recherche ne doit être que complémentaire à la clinique"

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Etienne Gouton, oncologue, a reçu le prix Casden 2022 pour ses recherches autour de l'identification de marqueurs de réussite des traitements dans le cancer du poumon métastasé. Rencontre avec un médecin primé.

"J’ai gagné le prix Casden mais pour moi la recherche ne doit être que complémentaire à la clinique"

Etienne Gouton, a reçu le prix Casden pour ses recherches sur l’implication du microbiote dans le développement de certaines pathologies. 

What’s up doc : Quels travaux vous ont valu le prix Casden ?

Etienne Gouton : Ce prix nous a été remis par la fondation Casden dans le cadre d’une bourse qui nous avait déjà été attribuée par la Fondation de l’Avenir. Les travaux consistent à essayer de déterminer l’implication du microbiote dans le développement de certaines pathologies : le rétrécissement aortique du sujet âgé. Cela fait suite à des travaux qui ont déjà montré l’implication de ces microbiotes dans d’autres pathologies chroniques comme le diabète par exemple ou leur relation avec des comorbidités comme l’obésité.

Le rétrécissement aortique dégénératif concerne les sujets de plus de 60 ans. Nous pensons que la présence chronique de ces bactéries au sein du tissu valvulaire va participer petit à petit à la formation de lésions. La maladie n’arrive pas d’un coup.

En pratique, nous allons essayer d’étayer le rôle du microbiote dans le développement de cette maladie chronique de la valve.

Il est difficile d’affirmer avec certitude que l’ensemble du tissu pathologique est réséqué au moment où on implante la prothèse. Est-ce qu’une partie du tissu qui reste en place peuvent avoir un effet sur les complications sur le long terme comme l’infection ou la dégénérescence de la prothèse, des phénomènes de thrombose. Ce sont des phénomènes rares mais qui restent graves sur le long terme.

Nous savons, que dans 50 % des cas, on retrouve du microbiote chez les patients opérés au niveau de la valve. Ce qui nous intéresse c’est de savoir si nous sommes capables de dépister ce portage valvulaire par un test sanguin c’est-à-dire est ce qu’on est capable de retrouver du microbiote sanguin. Si c’est le cas, peut-on prédire la présence de microbiote au niveau de la valve ?  Nous aimerions aboutir à un dépistage sanguin du microbiote valvulaire.

Le prix Casden octroie une somme de 16 000 €, cette somme sera-t-elle suffisante ?

EG. : Ces 16 000 € viennent en complément des 35 000 € qui nous avez déjà été octroyés par la Fondation de l’Avenir. Nous allons pouvoir inclure le nombre de patients qui avait été initialement déterminé et faire l’ensemble des tests sanguins biologiques, génétiques qui vont nous permettre de mettre en place notre étude. Nous allons pouvoir garder la cohorte calculée par nos statisticiens, avoir une puissance optimale pour mettre en évidence les résultats que l’on cherchait à prouver. C’est à la fois une reconnaissance pour l’équipe, pour la valeur scientifique du projet, mais cela a aussi un impact très pratique sur la logistique du projet.

Je ne me suis pas du tout destiné à être plus dans la recherche que dans la clinique car je suis avant tout un clinicien

Vous êtes-vous toujours destiné à la recherche ?

EG. : Je ne me suis pas du tout destiné à être plus dans la recherche que dans la clinique car je suis avant tout un clinicien, un chirurgien. Pour moi la recherche est une activité qui doit rester en lien étroit avec notre pratique clinique, qui doit partir de problèmes posés par notre pratique clinique, pour progressivement essayer d’y répondre. Cette casquette recherche est complémentaire.

Dans le domaine de la chirurgie, la recherche est-elle indissociable ?

EG. : Mon sentiment c’est que la recherche devrait être éclairé par notre pratique clinique pour nous médecin, l’idée finale est d’avoir les meilleures pratiques pour une réponse optimale pour le patient.

Comment est réparti votre temps ?

EG. : Je consacre la majorité de mon temps à ma pratique clinique et une journée par semaine à la recherche. C’est difficile de le quantifier. Ce sont des projets qui font appel à une équipe.

Vous attendiez-vous à remporter ce prix ?

EG. : La Fondation de l’Avenir nous a proposés de concourir car nous avions des chances d’être sélectionnés. Cela a été une bonne nouvelle. Ce prix vient récompenser une équipe pluridisciplinaire, puisque l’équipe de chirurgie est impliquée mais aussi l’équipe de cardiologie du CHU, les équipes Inserm, des prestataires extérieurs.

Quels résultats attendez-vous ? Dans combien de temps ?

EG. : Nous allons inclure 100 patients opérés d’un remplacement valvulaire aortique pour une maladie dégénérative pendant 1 an. Ils vont être suivis sur un an également. On espère avoir nos résultats courant 2024.

Avez-vous toujours voulu être chirurgien cardiaque ?

EG. : C’est une spécialité que je n’avais pas spécialement appréhendé pendant mes études. Je me destinais à être orthopédiste. J’ai découvert cette spécialité, un peu par hasard, au cours d’un stage au premier semestre dans le service de chirurgie cardiovasculaire. J’ai eu la chance d’être accueilli par une équipe qui m’a poussé, m’a aidé à grandir et qui m’a donné envie de poursuivre dans cette spécialité.

Malgré les doutes qui peuvent exister sur le fonctionnement de nos structures, les tensions sur les ressources humaines, il faut garder confiance en notre système hospitalo-universitaire

Quelles sont les perspectives futures ?

EG. : Mettre en place des stratégies de prévention pour limiter le rétrécissement valvulaire aortique ou d’autres maladie dégénérative de la valve. Être capable de dépister pour voir les personnes qui portent un microbiote et anticiper les populations les plus à risque sur le long terme, améliorer la chirurgie sur le long terme.

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Actuellement vous travaillez à l’hôpital ? Envisagez-vous y rester toute votre carrière ?

EG. : Mon objectif est de rester au CHU. Malgré les doutes qui peuvent exister sur le fonctionnement de nos structures, les tensions sur les ressources humaines, il faut garder confiance en notre système hospitalo-universitaire. Nous avons une mission d’intérêt général et de formation des jeunes praticiens. C’est un message d’espoir. Il faut rester confiant et investir dans notre avenir c’est notre plus belle mission.

Avez-vous d’autres passions ?

EG. : Je suis un passionné de polo et de ski.

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