Classement des CHU : « Que Rennes soit le premier, c’est le résultat d’un réel engagement de fonds, ce n’est pas de la com’ tous azimuts »

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Le CHU de Rennes est premier au classement suite aux choix des internes. Et cela n’était jamais arrivé. Est-ce une surprise ? Le fruit d’une stratégie ?  Entretien avec Véronique Anatole-Touzet, directrice générale du CHU de Rennes et Eric Bellissant, doyen de la faculté, intarissable sur ses établissements.

Classement des CHU : « Que Rennes soit le premier, c’est le résultat d’un réel engagement de fonds, ce n’est pas de la com’ tous azimuts »

Cela fait quoi d’être premier, est-ce une surprise ?

Véronique Anatole-Touzet : Nous avons toujours été bien classés. C’est évidemment une grande fierté mais c’est aussi le résultat d’une politique vis-à-vis des internes que l’on mène depuis plusieurs années au CHU et avec la faculté de médecine et de manière conjointe.

Comment vous êtes-vous démarqués cette année ?

Eric Bellissant : Nous n’avons pas engagé de démarches particulières pour valoriser cette année plus que d’autres la faculté ou le CHU. C’est le résultat d’un engagement de fond qui existe depuis de nombreuses années. Progressivement il est de mieux en mieux connu des internes, qui du coup choisissent notre établissement plutôt qu’un autre.

Véronique Anatole-Touzet : C’est le résultat d’un travail de longue haleine. Nous ne communiquons pas tous azimuts en permanence.

Quels sont les points forts de votre CHU ?

Eric Bellissant :  Nous avons un établissement qui possède de nombreuses spécialités de recours avec un niveau d’expertise clinique hospitalo-universitaire vraiment exceptionnel. C’est de mieux en mieux perçu et diffusé au niveau des internes. Nous avons beaucoup de disciplines de recours.

Le rayonnement du CHU est régional, mais s’étend aussi sur les régions limitrophes. Nous avons beaucoup de spécialités très fortes. Nous sommes un centre de référence en chirurgie cardiaque, en chirurgie viscérale, et transplantation hépatique, en neurochirurgie, en urologie ... Toutes ces disciplines ont une visibilité qui dépasse largement la région Bretagne. Nous avons aussi des services reconnus unanimement en hépato-gastroentérologie, en maladies infectieuses, en cardiologie, en neurologie et en réanimation. Ceux sont des spécialités très fortes, avec une identité de qualité de soin et de recours sans équivalent sur un périmètre très large.

Un autre élément est la subdivision du CHU de Rennes et de la faculté qui possède cinq CH dont 4 très attractifs : Saint-Brieuc et Saint-Malo sur la côte nord et Lorient et Vannes sur la côte sud, ainsi que Noyal Pontivy dans le centre de la Bretagne. Ils pratiquent des médecines de très haut niveau dans plusieurs spécialités.

De plus, nous avons réussi à créer, avec le soutien de ces établissements, trois postes de professeurs associés, répartis dans chacun des trois hôpitaux de Lorient, St Brieuc et Vannes. Leur mission est de dynamiser l’universitarisation et c’est un renforcement de l’attractivité. Cela s’articule sur l’ensemble du cursus, en débutant par des PASS et des LAS délocalisés, et se poursuit en 1er cycle, 2 éme cycle et 3 ème cycle. Toute cette dynamique territoriale, mise en place depuis maintenant six ans, commence à être connue. Les établissements périphériques, particularité rennaise, participent très activement à la formation.

Grâce aux commissions locales nous avons associé les chefs de service au projet de formation. Ceux sont des acteurs qui participent à l’organisation et au suivi pédagogique de la formation des internes. Ils sont donc plus investis, et il me semble que nous sommes le seul CHU à avoir cette organisation : créer des interactions entre les CH, la fac, et les subdivisions.

Autre décision, les internes en phase socle, quand c’est compatible avec la maquette, doivent répartir leur première année d’internat entre la périphérie et le CHU. Souvent, ils font un stage dans une spécialité connexe en périphérie et un stage dans la spécialité choisie au CHU. Cela répartit tous les internes à 50/50 entre la périphérie et le centre. C’est un message très fort qui est passé à la périphérie et qui lui permet aussi de s’impliquer dès le début. Cette politique très pro-active est aujourd’hui reconnue et son intérêt pédagogique est perçu par les internes. Au CHU, ils voient du recours de très haut niveau, et en périphérie, ils voient de la médecine de très haut niveau sans être du recours. Je pense que c’est une des raisons pour lesquelles nous faisons la différence.

Concernant les spécialités chirurgicales et médico-technique, nous avons aussi investi, depuis 8 ans, des l’équipements de simulation basse et haute-fidélité. Nous avons des simulateurs dont le système SimLife. Il recrée des conditions de circulation sanguine qui permettent à nos étudiants-chirurgiens d’être dans des conditions proches de celles d’un patient vivant lorsqu'ils travaillent sur sujet anatomique. Ce système est très peu diffusé au niveau des facs de médecine. Il est très prisé des étudiants qui veulent faire de la chirurgie.

Nous avons aussi investi dans des simulateurs numériques en arthoscopie, celioscopie, hystéroscopie, tous ces simulateurs qui permettent l’exploration de la cavité abdominale, dans le domaine de la chirurgie digestive, la gynécologique, l’urologie. Tous ces appareils nous permettent d’avoir un parc important pour se former au laboratoire d’anatomie. Et de mettre en place des cursus de formation de troisième cycle.

Une autre explication peut-être aussi une offre de master très importante, différenciante par rapport à ce qui se fait dans les facs de médecine de France. La fac de médecine de Rennes pilote trois mention de master et une vingtaine de parcours de masters 2.

Sans oublier la qualité de vie à Rennes, très universitaire, 60 000 étudiants. Il y a une ambiance particulière. Elle est proche de la mer et proche de Paris. Cette ville a beaucoup d’atouts.

De plus nous sommes particulièrement attentifs au suivi des étudiants et des internes. Ceux qui se sont mal orientés, nous essayons de les accompagner dans une autre spécialité, tout cela avec beaucoup de bienveillance. J’ai mis en place trois commissions. La commission, Ariane pour le suivi des étudiants et des internes en difficulté, une autre pour les discriminations, violences sexistes et sexuelles et la dernière consacrée au bien-être des étudiants.

Véronique Anatole-Touzet : Nous veillons à la qualité de la formation, à l’intégration dans les équipes. Nous respectons les règles de repos de sécurité entre les gardes. Nous avons aussi créé beaucoup de postes médicaux, 100 postes de praticiens hospitaliers et augmenté de 20 % le nombre d’ internes. Cela améliore donc l’environnement des internes, leur capacité de travail et leur offre un bon équilibre entre le temps de formation et le temps clinique. C’est un travail conjoint entre le doyen, les praticiens et la direction. Et bien sûr la région de Rennes est dynamique et attractive et en même temps à taille humaine. Il y a des valeurs très forte comme l’innovation, la solidarité, l’écologie.

Voyez-vous encore des choses à améliorer ?

Eric Bellissant : On peut toujours s’améliorer. Nous pourrions améliorer encore le suivi des internes. Parfois nous détectons des internes en difficulté un petit peu tardivement. Nos temps de réaction ne sont pas toujours optimaux. Renforcer l’attractivité des hôpitaux périphériques en y développant la recherche et l’universitarisation.

Véronique Anatole-Touzet : Comme nous sommes premiers, ça va être compliqué. Je pense qu’il faut poursuivre cette dynamique dans l’attention porté aux internes et la qualité d’encadrement. Dans l’attention à maintenir l’équilibre entre vie pro et vie perso.

 

 

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