Partir un jour…

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Les exercices hospitalier et libéral sont deux formes très différentes d’exercice de la médecine. Quitter le premier pour le second, c’est un saut vers un univers peu familier, qui demande d’assumer un rôle auquel vos études de médecine ne vous ont pas préparé : celui d’entrepreneur et de chef d’entreprise.

Partir un jour…

Pour réussir en tant que chef d’entreprise, il est essentiel de bien définir son projet et de s’appuyer sur les bons partenaires (sujet à venir…). Mais pour commencer, il faut d’abord quitter l’hôpital. Si vous avez évidemment le droit et la liberté de laisser la fonction publique hospitalière, il faudra être attentif au fait que, selon votre statut, votre départ sera plus ou moins encadré et soumis à conditions.
 
Vous êtes : 
 
1) Assistant des hôpitaux ou chef de clinique assistants (CCA) :
 
Ces contrats sont déjà une forme de CDD. Il est donc possible de partir à la fin de la durée du contrat. Vous pouvez même prétendre au bénéfice des allocations de chômage si vous êtes « involontairement privé d'emploi » c’est à dire à condition de ne pas avoir refusé le renouvellement. Ces allocations vous permettront de financer vos charges sociales et fiscales du début d’activité en libéral.
 
2) Praticien hospitalier :
 
Deux options existent :
 
La dispo
 
C’est une cessation de l’activité dans la fonction publique pendant une période donnée - de durée variable selon le motif de la demande -, avec pour vocation de retrouver son poste à l’issue de la période.
Elle peut être « de droit », par exemple pour s’occuper d’un enfant de moins de 8 ans ou d’un enfant malade. Elle peut aussi être accordée sur demande pour convenance personnelle, pour suivre un conjoint par exemple. Et bien sûr pour tester la viabilité économique de son exercice libéral avant d’envisager une démission… Lorsque la dispo n’est pas de droit, l’accord se fait « sous réserve des nécessités du service ». Le risque de refus par l’administration est réel et il existe peu de chance de succès en cas de contentieux.
Comme en cas de démission, toutes les activités ne sont pas autorisées pendant la dispo. Dès lors qu’elles portent atteinte au bon fonctionnement, à la neutralité ou à l’indépendance du service public, le praticien doit préalablement informer son administration. Et cette dernière peut saisir la Commission de déontologie de la Fonction publique comme pour une dem’.

La dem’
 
Choix irrémédiable nécessitant un préavis de 3 mois. Si ce fait est rarissime, l’administration peut refuser la démission pour l’intérêt du service. Elle peut demander l’avis de la Commission de déontologie de la Fonction publique sur la compatibilité du projet d’activité du praticien avec celles qu’il occupait. En cas d’incompatibilité, l’administration est contrainte de suivre l’avis de la commission. De son côté le praticien peut réaliser un recours devant la commission administrative paritaire.
 

Cas de jurisprudence : refus de dem’
Tel fut le cas pour le projet d’un praticien hospitalier, chef du service orthopédique et traumatologique d’un centre hospitalier, qui souhaitait exercer à titre libéral sa profession et faire de la chirurgie traumatique dans une clinique privée établie dans une ville peu éloignée du centre hospitalier. Compte tenu du potentiel chirurgical de l’établissement public de santé, le départ de ce praticien expérimenté était susceptible de mettre en cause l’activité́ même de chirurgie traumatique et orthopédique et ainsi de risquer d’altérer le bon fonctionnement du service public de santé.
Avis n° 14H0288 du 13 mars 2014.

 

Warning
Dans tous les cas, il faut être extrêmement attentif à la clause de non concurrence qui peut désormais être intégrée, depuis 2016, dans les contrats pour les PH qui ont également une activité libérale à l’hôpital dans la limite de 20% de leur temps de travail hebdomadaire.

En conclusion, le projet de s’installer en libéral est un chemin qui peut rapidement se retrouver semé d’embuches. Il vous faudra donc peut-être patienter plus longtemps que prévu pour organiser votre pot de départ…
 
*Maître Julie Kappler est avocate en droit des sociétés, spécialisée dans l’accompagnement des professionnels de santé.

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