L'autisme au cinéma

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Longtemps psychiatrisé car défini avant tout par le handicap qu’il induit et assimilé par la psychanalyse aux pathologies psychotiques – et souvent pris en charge comme telle dans les institutions – l’autisme repose sur un développement neurologique atypique autant pourvoyeur de troubles – langage, communication, compréhension, adaptation au changement – que de compétences spécifiques – souvent lorsque ce mode de pensée rencontre un centre d’intérêt particulier. En résulte, pour le cinéma, une mine d’or en termes d’histoires touchantes, mais souvent prises dans un grand écart entre pathétique et fantastique pouvant nuire à sa compréhension et être pourvoyeur de caricatures. WUD fait rapidement le tour des films consacrés au sujet.

L'autisme au cinéma

 

Rain Man (1988)

Dans ce classique du cinéma, Barry Levinson applique à la maladie mentale – l’autisme était à l’époque largement présenté ainsi – la recette de la success story hollywoodienne reposant sur des duos improbables. Si le film a beaucoup fait pour que les troubles du spectre autistique (TSA) soient connus du grand public, en tout cas autrement que sous l’angle de la déficience profonde, il l’a aussi enfermé dans une vision stéréotypée entraînant une confusion avec la surdouance, dans une vision binaire où l’autisme se partagerait entre déficients mentaux et génies.

Elle s’appelle Sabine (2007) & Shine (1996)

Le docu de Sandrine Bonnaire à propos de sa sœur aborde les ravages d’une prise en charge non adaptée et d’une errance diagnostique autour de l’autisme. En cela, la trajectoire de Sabine évoque, en plus terrible, celle du pianiste David Helfgott dans le biopic romancé qui lui est consacré (Shine, réalisé par Scott Hicks) : ce prodige musical aux traits autistiques, détruit par les sévices éducatifs de son père et qui finit, comme la jeune Sabine, surmédiqué dans une institution psychiatrique. Si la décompensation d’Helfgott est souvent attribuée à la schizophrénie, son rapport à la musique comme au monde ou à l’autre, d’une innocence sans filtre, évoque plutôt un TSA sur lequel s’est greffée une pathologie psychotraumatique, tant cette complication est fréquente.

Le Goût des merveilles (2015) & Monsieur Je-sais-tout (2018)

Deux jolis films français qui, en plus de proposer une vision pertinente des personnes autistes et de leurs spécificités, battent en brèche l’idée reçue selon laquelle la difficulté d’accès à l’empathie serait le « symptôme » cardinal de l’autisme. En décrivant l’attachement qui se développe entre leur personnage principal et une personne « neurotypique », Éric Besnard (Le Goût des merveilles), de même que François Prévôt-Leygonie et Stephan Archinard (Monsieur Je-sais-tout), explorent avec beaucoup de nuances et de délicatesse la profondeur des liens qui peuvent se créer au-delà des barrières, voire des murs que constituent les difficultés de communication et les centres d’intérêt restreints.

Quelle folie (2019)

Le réalisateur Diego Governatori filme en roue libre le discours de son ami d’enfance Aurélien Deschamps, autiste de haut niveau. Mais en tentant de capter, via la caméra, l’« objet autistique », en voulant explorer la complexité de sa pensée et surtout de son cours, il enferme le spectateur dans une vision d’où n’échappent pas des influences philosophico-psychanalytiques. Malgré tout, le film réussit à montrer mieux que n’importe quel manuel les efforts constants que représente pour la personne autiste l’adaptabilité, nécessaire autant qu’impossible, à un monde régi par des codes qui lui échappent.

 

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