Rwanda : l'Ircad se pose sur une colline

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Après l’Asie et l’Amérique latine, l’Institut de recherche contre les cancers digestifs (Ircad) installe ses robots chirurgicaux sur le continent africain à Kigali, la capitale du Rwanda. La première pierre de ce 5e Ircad ne sera posée qu’en mai prochain, mais les espoirs qu’il suscite sont déjà immenses. Comme à Strasbourg, Taïwan ou Rio de Janeiro, l’objectif de l’Ircad Africa sera de former les chirurgiens à la chirurgie laparoscopique et robotique. « L’Ircad vient combler un vide en Afrique, assure le Dr King Kayondo, chirurgien digestif et président de ce nouvel institut. L’implantation de ce centre d’excellence au Rwanda n’est pas seulement une chance pour mon pays, elle représente une opportunité pour le continent tout entier. Il permettra de lutter contre les inégalités de formation entre l’Occident et l’Afrique. »

Vue de l'Ircad au Rwanda.

Le Pr Jacques Marescaux, président fondateur de cet empire de la chirurgie mini-invasive, n’aurait pourtant jamais imaginer s’exporter en Afrique subsaharienne. Le chirurgien strasbourgeois a été très surpris quand la ministre rwandaise de la Santé, Dr Diane Gashumba, l’a contacté en mars 2017. « Je ne connaissais rien à l’Afrique, reconnaît-il humblement. J’ai accepté de rencontrer le Président Paul Kagamé et sa ministre de la santé par courtoisie. Mais à mon arrivée à Kigali, j’ai eu un choc. » Il faut dire que la capitale rwandaise n’a rien à voir avec de nombreuses métropoles africaines. Ses rues bitumées sont d’une propreté impeccable, les sacs plastiques y ont été bannis et l’air y est beaucoup moins pollué. Qualifiée de Silicon Valley africaine, la capitale rwandaise incarne la vision du pays. Elle illustre aussi tout le chemin parcouru depuis le génocide contre les Tutsis qui a coûté la vie à 800 000 personnes et fait 2 millions de déplacés. Un massacre d’une violence inouïe dont on commémore le 25e anniversaire. 

Assurance maladie publique

Depuis, le Rwanda a pansé ses plaies et a réussi à se relever. Ce petit pays enclavé de 12 millions d’habitants est aujourd’hui présenté comme l’une des économies les plus dynamiques d’Afrique avec une croissance d’environ 8% par an. Une vitalité due notamment à sa jeunesse : plus de deux tiers de la population a moins de 30 ans. Le Rwanda reste toutefois parmi les pays à faible revenu, et environ deux habitants sur cinq vivent avec moins de 1,80 euro par jour.

Vue de l'Ircad au Rwanda.

Pour autant, le Rwanda est un des seuls pays d’Afrique à disposer d’un système d’assurance maladie publique. « Aujourd’hui, 91% de la population est couverte. Pour 4 euros par an, les patients ne paient que 10% des soins. Aucun Rwandais ne craint de venir à l’hôpital pour être soigné désormais », assure la ministre de la santé. Résultat : la mortalité infantile et maternelle a régressé. L’accès à la vaccination s’est grandement amélioré, et les patients séropositifs reçoivent des antirétroviraux. Des progrès considérables alors que les 100 jours de massacre ont mis à mal le système de santé. « Après le génocide, le pays a beaucoup investi dans les infrastructures hospitalières pour reconstruire ce qui avait été détruit. Nous avons aujourd’hui 50 hôpitaux et 510 centres de santé, explique le Dr Diane Gashumba. Un effort important a aussi été fait pour renforcer les ressources humaines car le génocide nous a pris beaucoup de soignants. »

Rattraper l'Occident

Mais le Rwanda ne veut pas seulement reconstruire ce qu’il a perdu. Il veut rattraper l’Occident. Pour cela, le pays au Mille Collines mise sur la révolution technologique. Une stratégie à laquelle participe l’Ircad Africa qui devrait accueillir ses premiers étudiants en 2020. « L’enseignement de la chirurgie en Afrique ne doit pas être un enseignement de seconde zone. Nous n’avons pas à garder pour nous les technologies, et leur apprendre comment on opérait il y a 50 ans », affirme le Pr Jacques Marescaux. D’autant que le continent tirera un grand bénéfice de la chirurgie mini-invasive en réduisant la durée d’hospitalisation et les risques de complications ». « L’Afrique a déjà pris beaucoup de retard alors nous devons dès maintenant nous approprier les innovations », abonde le Dr King Kayondo.

Et pour y arriver, le pays n’a pas lésiné sur les moyens. Seize millions d’euros ont été débloqués pour la construction du bâtiment de 7000m2. Celui-ci comportera, entre autres, un auditorium dans lequel les cours seront donnés par visio-conférence, ainsi qu’une salle de 345 m2 équipée de 18 tables de chirurgie laparoscopique dédiées à la formation pratique.  « Pour la première année nous espérons accueillir au moins 1000 chirurgiens de tout le continent, indique David Kamanda, le directeur général de l’Ircad Africa. Le prix de la formation n’a pas encore été fixé. Nous sommes encore en discussion avec les sociétés savantes et les universités. Néanmoins, une partie sera vraisemblablement prise en charge par les hôpitaux, qui seront je suis sûr, très motivés par cette nouvelle technologie. » 

Recherche en chirurgie robotique et informatique

Outre la formation, l'Ircad Africa aura aussi pour mission de participer à la recherche en chirurgie robotique et informatique. Trois ingénieurs rwandais travaillent déjà sur des projets débutés par l’équipe française. « Au cours des deux prochaines années, nous devrions engager une quinzaine d’ingénieurs supplémentaires. Cette équipe rwandaise est une extension de l’équipe basée à Strasbourg. Nous formons une seule et même équipe », explique Alexandre Hostettler, directeur du développement et de la recherche à l'Ircad France. 
 

Les ingénieurs rwandais se concentrent sur 3 grandes thématiques : la vision augmentée grâce à la réalité virtuelle, le développement d’outils de prédiction des erreurs lors d’intervention chirurgicale et d’aide à la décision en s’appuyant sur l’intelligence artificielle, ainsi que la robotisation de certains actes chirurgicaux. « L’un des objectifs de nos travaux est également de s’adapter aux problématiques de la région, notamment en termes d’équipements car les besoins ne sont pas les mêmes qu’ailleurs. Nous aimerions donc travailler avec des chirurgiens africains et développer des solutions avec eux », ajoute David Sixela, l’un des ingénieurs, qui espère que l’Ircad Africa stimulera la recherche en Afrique et fera naître des vocations chez les étudiants en informatique. 

En attendant, ce nouvel institut fait déjà des envieux. « La Côte d’Ivoire et l’Ethiopie nous ont approchés. Mais nous avons refusé car nous voulons nous concentrer sur ce projet pour l’instant », confie le Pr Marescaux, qui vient de signer la construction d’un Ircad en Chine. 

Après l’Asie et l’Amérique latine, l’Institut de recherche contre les cancers digestifs (Ircad) installe ses robots chirurgicaux sur le continent africain à Kigali, la capitale du Rwanda. La première pierre de ce 5e Ircad ne sera posée qu’en mai prochain, mais les espoirs qu’il suscite sont déjà immenses. Comme à Strasbourg, Taïwan ou Rio de Janeiro, l’objectif de l’Ircad Africa sera de former les chirurgiens à la chirurgie laparoscopique et robotique. « L’Ircad vient combler un vide en Afrique, assure le Dr King Kayondo, chirurgien digestif et président de ce nouvel institut. L’implantation de ce centre d’excellence au Rwanda n’est pas seulement une chance pour mon pays, elle représente une opportunité pour le continent tout entier. Il permettra de lutter contre les inégalités de formation entre l’Occident et l’Afrique. »

Vue de l'Ircad au Rwanda.

Le Pr Jacques Marescaux, président fondateur de cet empire de la chirurgie mini-invasive, n’aurait pourtant jamais imaginer s’exporter en Afrique subsaharienne. Le chirurgien strasbourgeois a été très surpris quand la ministre rwandaise de la Santé, Dr Diane Gashumba, l’a contacté en mars 2017. « Je ne connaissais rien à l’Afrique, reconnaît-il humblement. J’ai accepté de rencontrer le Président Paul Kagamé et sa ministre de la santé par courtoisie. Mais à mon arrivée à Kigali, j’ai eu un choc. » Il faut dire que la capitale rwandaise n’a rien à voir avec de nombreuses métropoles africaines. Ses rues bitumées sont d’une propreté impeccable, les sacs plastiques y ont été bannis et l’air y est beaucoup moins pollué. Qualifiée de Silicon Valley africaine, la capitale rwandaise incarne la vision du pays. Elle illustre aussi tout le chemin parcouru depuis le génocide contre les Tutsis qui a coûté la vie à 800 000 personnes et fait 2 millions de déplacés. Un massacre d’une violence inouïe dont on commémore le 25e anniversaire. 

Assurance maladie publique

Depuis, le Rwanda a pansé ses plaies et a réussi à se relever. Ce petit pays enclavé de 12 millions d’habitants est aujourd’hui présenté comme l’une des économies les plus dynamiques d’Afrique avec une croissance d’environ 8% par an. Une vitalité due notamment à sa jeunesse : plus de deux tiers de la population a moins de 30 ans. Le Rwanda reste toutefois parmi les pays à faible revenu, et environ deux habitants sur cinq vivent avec moins de 1,80 euro par jour.

Vue de l'Ircad au Rwanda.

Pour autant, le Rwanda est un des seuls pays d’Afrique à disposer d’un système d’assurance maladie publique. « Aujourd’hui, 91% de la population est couverte. Pour 4 euros par an, les patients ne paient que 10% des soins. Aucun Rwandais ne craint de venir à l’hôpital pour être soigné désormais », assure la ministre de la santé. Résultat : la mortalité infantile et maternelle a régressé. L’accès à la vaccination s’est grandement amélioré, et les patients séropositifs reçoivent des antirétroviraux. Des progrès considérables alors que les 100 jours de massacre ont mis à mal le système de santé. « Après le génocide, le pays a beaucoup investi dans les infrastructures hospitalières pour reconstruire ce qui avait été détruit. Nous avons aujourd’hui 50 hôpitaux et 510 centres de santé, explique le Dr Diane Gashumba. Un effort important a aussi été fait pour renforcer les ressources humaines car le génocide nous a pris beaucoup de soignants. »

Rattraper l'Occident

Mais le Rwanda ne veut pas seulement reconstruire ce qu’il a perdu. Il veut rattraper l’Occident. Pour cela, le pays au Mille Collines mise sur la révolution technologique. Une stratégie à laquelle participe l’Ircad Africa qui devrait accueillir ses premiers étudiants en 2020. « L’enseignement de la chirurgie en Afrique ne doit pas être un enseignement de seconde zone. Nous n’avons pas à garder pour nous les technologies, et leur apprendre comment on opérait il y a 50 ans », affirme le Pr Jacques Marescaux. D’autant que le continent tirera un grand bénéfice de la chirurgie mini-invasive en réduisant la durée d’hospitalisation et les risques de complications ». « L’Afrique a déjà pris beaucoup de retard alors nous devons dès maintenant nous approprier les innovations », abonde le Dr King Kayondo.

Et pour y arriver, le pays n’a pas lésiné sur les moyens. Seize millions d’euros ont été débloqués pour la construction du bâtiment de 7000m2. Celui-ci comportera, entre autres, un auditorium dans lequel les cours seront donnés par visio-conférence, ainsi qu’une salle de 345 m2 équipée de 18 tables de chirurgie laparoscopique dédiées à la formation pratique.  « Pour la première année nous espérons accueillir au moins 1000 chirurgiens de tout le continent, indique David Kamanda, le directeur général de l’Ircad Africa. Le prix de la formation n’a pas encore été fixé. Nous sommes encore en discussion avec les sociétés savantes et les universités. Néanmoins, une partie sera vraisemblablement prise en charge par les hôpitaux, qui seront je suis sûr, très motivés par cette nouvelle technologie. » 

Recherche en chirurgie robotique et informatique

Outre la formation, l'Ircad Africa aura aussi pour mission de participer à la recherche en chirurgie robotique et informatique. Trois ingénieurs rwandais travaillent déjà sur des projets débutés par l’équipe française. « Au cours des deux prochaines années, nous devrions engager une quinzaine d’ingénieurs supplémentaires. Cette équipe rwandaise est une extension de l’équipe basée à Strasbourg. Nous formons une seule et même équipe », explique Alexandre Hostettler, directeur du développement et de la recherche à l'Ircad France. 
 

Les ingénieurs rwandais se concentrent sur 3 grandes thématiques : la vision augmentée grâce à la réalité virtuelle, le développement d’outils de prédiction des erreurs lors d’intervention chirurgicale et d’aide à la décision en s’appuyant sur l’intelligence artificielle, ainsi que la robotisation de certains actes chirurgicaux. « L’un des objectifs de nos travaux est également de s’adapter aux problématiques de la région, notamment en termes d’équipements car les besoins ne sont pas les mêmes qu’ailleurs. Nous aimerions donc travailler avec des chirurgiens africains et développer des solutions avec eux », ajoute David Sixela, l’un des ingénieurs, qui espère que l’Ircad Africa stimulera la recherche en Afrique et fera naître des vocations chez les étudiants en informatique. 

En attendant, ce nouvel institut fait déjà des envieux. « La Côte d’Ivoire et l’Ethiopie nous ont approchés. Mais nous avons refusé car nous voulons nous concentrer sur ce projet pour l’instant », confie le Pr Marescaux, qui vient de signer la construction d’un Ircad en Chine. 

C’est en 1994 que le professeur Jacques Marescaux ouvrait les portes de l’Ircad (Institut de Recherche contre les Cancers de l’Appareil Digestif) dans l’enceinte des hôpitaux universitaires de Strasbourg. La même année, le Rwanda était le théâtre du dernier génocide du XXe siècle. 25 ans plus tard, l’Ircad installe sa première antenne africaine dans ce petit pays d’Afrique, surnommé le pays des mille collines. Une coïncidence troublante. Quoi qu’il en soit, les équipes du professeur Marescaux mettront à profit leur savoir-faire en matière de recherche et de formation, dans le domaine de la chirurgie laparoscopique et mini-invasive. Outre le centre strasbourgeois, l’Ircad est actuellement implanté à Taiwan, Rio de janeiro, ainsi qu’à Barretos, dans l’État de Sao Paulo au Brésil. 

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