Une mamie pas très gâteau

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Mme Louise, 78 ans, est amenée aux urgences pour des troubles du comportement. Elle a cassé des objets qu’elle lancait sur son mari, après avoir essayé de l’étrangler au cours du dessert. Il a dû appeler les secours.

Depuis quelques semaines, elle est agressive avec son mari notamment, l’accusant de lui vouloir du mal, de la tromper, l’appelant du nom de son ex-mari.

Elle se montre opposante aux soins, déniant tout problème. Elle est mal orientée dans le temps et l’espace, reste vague sur ses dernières années et parle toujours de sa jeunesse. Elle a aussi un manque du mot.

Les proches décrivent une perte d’autonomie progressive avec des troubles mnésiques, un arrêt de ses anciens loisirs, des sautes d’humeur avec violence. La famille s’est organisée en fonction depuis un an sans en parler au médecin. Mais cela ne peut durer, même s’ils ont du mal à parler de maladie.

Le retour à domicile est clairement compromis. L’urgentiste s’interroge sur l’orientation, l’évaluation diagnostique et les soins. Il sollicite alors trois confrères.

L’avis psy

Bon, a priori, il est dément. Ça relève surtout de la gériatrie ou de la neuro : bilan diagnostique, traitement au besoin et prise en charge. Ses troubles du comportement ne signifient pas qu’il relève d’une admission en psy !

C’est sûr que s’il s’oppose, s’il est agressif, ce ne sera pas facile en service classique. De mon côté, je n’aurai jamais de place en géronto-psy en urgence. Avant de vouloir parler d’HDT*, il faudrait au moins essayer en médecine ou gériatrie. Avec un traitement sédatif comme du tiapride si besoin. Pourquoi pas discuter aussi un relais avec une équipe
de géronto-psy. Si vraiment on n’y arrive pas autrement, l’HDT restera la prise de décision extrême…

*HDT = hospitalisation à la demande d’un tiers

    L’avis géronto

    La situation clinique paraît claire.
    On aura besoin de réaliser le bilan bio et d’imagerie habituel, sans oublier les divers tests neurocognitifs, pour poser un diagnostic précis. Mais ce n’est pas la priorité. Au contraire même, il faut un cadre stable pour le patient.

    Étant donné ce qui se passe, il faut qu’on le garde, même s’il n’est pas d’accord, avec son anosognosie. Il faudra peut-être un traitement sédatif s’il est agressif
    ou angoissé.

    Mais ça ne va pas être facile de lui trouver une place. De mon côté, on a déjà deux déambulants dans l’unité, donc je ne peux pas le prendre. I faudra contacter d’autres services. Je ne peux rien te proposer de mieux.

    L’avis neuro

    Je ne retrouve pas de symptômes neurologiques spécifiques à l’examen clinique. Il faudrait éliminer tout de même un processus aigu, même si cela paraît bien être une démence : TDM cérébrale, EEG, bilan bio de débrouillage. Pour l’IRM et le reste du bilan de démence, ce sera à programmer ensuite.

    Il faut éviter de lui donner des neuroleptiques. On peut proposer tout de même du Risperdal®, ou de l’Equanyl®.

    S’il n’y a pas de pathologie aiguë, la prise en charge neuro ne sera pas hospitalière.

    Avec tout ça, reste à trouver, seul, où hospitaliser Mme Louise…

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