Quand les médecins militaires forment à la gestion des victimes d’attentats

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Après les événements du 13 novembre 2015, les médecins militaires ont été sollicités pour former leurs confrères civils à la prise en charge des victimes d’attentats terroristes. Des gestes de sauvetage sur le terrain aux techniques du « damage control », ces formations utilisent souvent la simulation et permettent aux équipes ainsi qu’aux hôpitaux d’améliorer leur stratégie face à un afflux massif de blessés.

Quand les médecins militaires forment à la gestion des victimes d’attentats

Poser un garrot « tourniquet », un pansement hémostatique, faire une exsufflation de pneumothorax, une coniotomie (cricothyroïdotomie), voilà les gestes qui sauvent les blessés de guerre. Bruno Debien, ancien anesthésiste-réanimateur militaire, les a mis au programme des formations à la prise en charge des victimes d’attentats dispensées par Emergensim (organisme de formations opérationnelles à l'urgence par la simu).

Se former avec les militaires pour mieux se préparer

Lors du retour d’expérience (Retex) concernant les attentats du 13 novembre, Marisol Touraine a insisté sur deux éléments majeurs : la nécessité d’effectuer des exercices préparatoires à l’échelle régionale et nationale, et de mettre à jour les Plans blancs. Elle a pour cela « saisi le Centre national de l’urgence hospitalière et le Service de santé des Armées pour qu’ils élaborent un dispositif de formation spécifique des professionnels de santé », et chargé les ARS de diffuser cet enseignement par un système pyramidal de formateurs, via les CESU (centres d’enseignement des soins d’urgence) notamment.

Un système débordé par la demande

Guillaume de Saint Maurice, chef de la fédération anesthésie-réanimation-brûlés-bloc opératoire de l’hôpital militaire Percy, est très régulièrement sollicité, avec d’autres praticiens militaires, par des directeurs d’hôpitaux pour faire des formations auprès d’urgentistes, d’anest’-réas et de chir’ dans toute la France. « Ce qui me surprend, c’est que la demande ne s’épuise pas, ce qui montre que le système de diffusion via les ARS est débordé par les besoins ». Des modèles mixtes publics-privés se mettent d’ailleurs en place pour y répondre, comme en région Bourgogne où Emergensim et le CESU 21 assurent de manière complémentaire des formations financées par l’ANFH (Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier).

Guillaume de Saint Maurice était de garde la nuit du 13 novembre, et a assumé le rôle de directeur médical. « À chaque fois que nous faisons des formations nous avons des questions sur la nuit du 13 novembre; les médecins sont très demandeurs de retours d’expérience. Mais à mon avis ce que les militaires peuvent enseigner de plus important, en dehors de leur expérience de gestion d’un afflux massif de victimes, c’est la bascule intellectuelle, le "changement de logiciel" qui doit s’opérer dans ces situations, dont le damage control fait partie. »

Le meilleur entraînement : la simulation in situ en équipes

Lors des formations, les intervenants sont souvent sollicités pour mettre à jour le Plan blanc local. Dans le cadre d’Emergensim, Bruno Debien effectue des stress tests pour valider ou modifier les procédures déjà mises en place. Guillaume de Saint Maurice souligne de son côté l’importance de ces exercices grandeur nature : « les équipes de Nice avaient effectué une simulation à grande échelle quelques semaines avant l’attentat du 14 juillet, et lorsqu’elles se sont retrouvées dans les mêmes conditions, cela leur a beaucoup facilité la tâche pour gérer les victimes. D’où l’importance de former les gens en équipe, et sur leur lieu d’exercice. »

Le « damage control », c’est quoi ?

Le damage control est un protocole de priorisation des actions médicales à entreprendre, inspiré de la marine américaine qui privilégie la réparation immédiate des avaries les plus graves en attendant les réparations définitives une fois en sécurité au port. En matière de gestion des victimes, il comprend 2 volets :

-damage control resuscitation : réanimation précoce destinée à rompre le cercle vicieux de l’hémorragie (hypothermie, coagulopathie, acidose)

-damage control surgery : chirurgie initiale limitée à la stabilisation des lésions menaçant le pronostic vital ou fonctionnel (une chirurgie courte implique moins de complications pour l’opéré et plus de patients pris en charge rapidement), second temps opératoire une fois le patient stabilisé et l’afflux de victimes jugulé.

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À qui s’adresser pour organiser des formations à la prise en charge des victimes d’attentats ?

-CESU ou ARS de référence

-École du Val-de-Grâce qui regroupe des CESimMO (Centres d'enseignement et de simulation à la médecine opérationnelle) : Brest, Bordeaux, Lyon, Paris, Toulon et le CESimCO (Centre de simulation médicochirurgicale opérationnelle) : Lyon Valbonne - Emergensim (www.emergensim.fr)

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