Ophtalmologie : la téléconsultation, une arme contre les déserts médicaux

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En partenariat avec la CNAM, le groupe Point Vision vient de lancer un centre de téléconsultation ophtalmologique. Une expérimentation débutée il y a trois mois à Saint-Quentin dans l’Aisne.

Ophtalmologie : la téléconsultation, une arme contre les déserts médicaux

Le groupe Point Vision a décidé de voir grand. En partenariat avec la Caisse Nationale d’Assurance Maladie, ce groupe, qui recense 48 centres libéraux d’ophtalmologie, a inauguré le 15 juin un centre expérimental pensé pour lutter contre les déserts médicaux. « Lorsque la téléconsultation s’est ouverte, nous nous sommes dit qu’il y avait quelque chose à faire avec un orthoptiste sur place et un ophtalmologiste en téléconsultation », explique François Pelen, co-fondateur du groupe, qui a vu la première structure s’installer à Saint Quentin dans l’Aisne.

Comme dans de nombreuses autres spécialités, la démographie médicale ophtalmologiste inquiète depuis de nombreuses années. Il y a cinq ans, on dénombrait 5.055 ophtalmologues sur l’intégralité du territoire. Un panel restreint qui a diminué de 5,4 % par rapport à 2007. Si le SNOF (Syndicat National des Ophtalmologistes de France) estime que le délai d’attente moyen est de 33 jours en France, certains territoires voient parfois ce temps s’allonger drastiquement. La faute notamment aux départs en retraite sans remplacement. « Notre projet a pour objectif de s’inscrire dans les déserts médicaux dans lesquels on ne trouve pas de jeunes médecins pour remplacer ceux qui partent », atteste François Pelen.

Terrain d’expérimentation choisi par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie, Saint-Quentin (Aisne), ne fait pas exception à la règle. En moyenne, il faut six mois pour décrocher un rendez-vous chez un spécialiste. Un temps trop long que Point Vision est parvenu à raccourcir à trois semaines. « En moyenne, quarante patients sont vus chaque jour. Comme il faut leur expliquer le concept, c’est un peu moins que dans un centre en présentiel. Avec l’expérience, on compte bien augmenter peu à peu », détaille François Pelen. Des consultations qui bénéficient, de manière dérogatoire, d’un remboursement de la CPAM. « Pour en bénéficier, il faut normalement déjà être un patient du médecin », explique le co-fondateur.

Point Vision

C’est dans les locaux de l’Hôpital privé Saint Claude d’Elsan que cette expérimentation prend place. « En ophtalmologie, on ne peut pas faire de la téléconsultation depuis un salon, explique François Pelen. Il faut un site, car nous avons besoin de machines pour faire les mesures. » Une charge, mêlant expertise et contact avec le patient, qui incombe à un orthoptiste présent sur place. « Prise de tension oculaire, photo de fond de l’oeil, acuité visuelle… Tous les résultats obtenus par l’orthoptiste sont ensuite transmis au médecin en téléconsultation », détaille le co-fondateur, qui souligne que Point Vision s’est attaché à préserver la qualité de l’échange entre le médecin et le patient. « Grand écran de qualité professionnelle, salle fermée… Il y a vraiment un colloque singulier entre le praticien et le patient. »

Point Vision

À la mi-septembre, cette expérimentation avait déjà permis de rapprocher 500 patients du parcours ophtalmologique. Un rythme important accompagné d’une contrainte imposée, celle de la proximité régionale du praticien et du patient. « Nous avons fixé comme règle que tout poste avancé doit être à une heure maximum de distance », explique François Pelen. Une limite mise en place pour permettre, en cas de problème, la tenue d’examens complémentaires. « Si une investigation plus complète est nécessaire, le patient doit pouvoir venir consulter au centre auquel nous sommes rattachés à Lille ou à Saint-Quentin, où le médecin vient tous les quinze jours. »

Pour l’heure, ce modèle semble d’ailleurs séduire les patients. « La satisfaction est très élevée », s’enthousiasme le-cofondateur. Mais également la praticienne qui se prête à ce nouveau mode d’exercice. « En tant que mère de famille, elle apprécie de pouvoir travailler de chez elle », explique François Pelen. Et d’insister : « Ce modèle permet à un jeune médecin d’avoir une activité sans avoir à déménager ou à faire des longs trajets tous les jours ».

Un confort de vie qui s’accompagne d’un enrichissement quotidien. « C’est gratifiant pour l’ophtalmo de rendre service à des gens qui n’avaient plus d’offre de soins », explique François Pelen. Contre toutes attentes, ce centre expérimental a en effet permis de déceler de nombreuses pathologies non-traitées. « En tout, une centaine de patients avait par exemple une cataracte », indique le co-fondateur. Un ratio important qui s’explique par leur éloignement du système de santé. « Pour de nombreux patients, cela faisait des années qu’ils n’avaient pas été pris en charge », explique François Pelen.

Débutée en juin, l’expérimentation doit prendre fin dans neuf mois. Un temps que le co-fondateur de Point Vision espère voir suivi d’une multiplication de ces structures. « Notre volonté est d’ouvrir dans chacun de nos grands centres deux ou trois postes avancés de téléconsultation. » De quoi complètement bousculer le paysage ophtalmologique français.

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