Les médecins libéraux redoutent un retour de l'obligation de garde

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Déjà remontés contre leur charge de travail, les médecins libéraux redoutent que les gardes redeviennent obligatoires, au risque selon eux d’aggraver les problèmes d’attractivité et de creuser, contre le but recherché, les difficultés d’accès aux soins.

Les médecins libéraux redoutent un retour de l'obligation de garde

© IStock

Fini le volontariat, place à une "obligation collective" de garde le soir, le week-end et les jours fériés pour l'ensemble des médecins et soignants libéraux : c'est le sens d'un amendement à une proposition de loi portée par la députée Renaissance Stéphanie Rist, votée le 19 janvier à l'Assemblée.

En 2002, à la suite d'une longue grève, l'obligation de garde avait été retirée du code de déontologie de la profession médicale. Elle avait été remplacée par un système collectif de permanence des soins ambulatoires (PDSA) fondé sur le volontariat, avec une rémunération sous forme de forfaits.

Deux décennies plus tard, alors que les urgences hospitalières débordent, la pression monte à nouveau sur les libéraux, de la part de l'exécutif comme dans le cadre de la négociation de la convention qui doit les lier à l'Assurance maladie pour les cinq années à venir.

Quand la permanence des soins relevant des praticiens libéraux "est mal assurée ou plus assurée, tout arrive à l'hôpital", a souligné Emmanuel Macron lors de ses vœux au monde de la santé, le 6 janvier.

Il faut donc "reresponsabiliser et inciter à avoir une permanence des soins en ville. Les Français doivent trouver facilement un médecin de garde", a tancé le président de la République. Des propos peu goûtés par les syndicats de praticiens libéraux, même si le chef de l’État a précisé que ces gardes seraient "mieux rémunérées".

Les représentants des médecins s'étonnent de la menace de nouvelles "contraintes" alors que selon eux la PDSA, telle qu'elle est actuellement organisée, fonctionne.

Certes, à peine 40% des généralistes ont participé à des gardes en 2020, selon un rapport de l'Ordre des médecins. Mais cela n'a pas empêché que plus de 90% du territoire national soit couvert par la permanence des soins jusqu'à minuit et le week-end.

« Quand je termine à 8h du matin, je n’ai pas de repos compensateur. À 9h15, je suis à la maison de retraite auprès de mes patients »

Certains médecins assurent aussi des gardes de "nuit profonde" (Minuit-8h), même si elles sont rares pour les libéraux et généralement très calmes.

"Quand je termine à 8h du matin, je n'ai pas de repos compensateur. A 9h15, je suis à la maison de retraite auprès de mes patients", souligne Luc Duquesnel, représentant des généralistes au sein du syndicat CSMF.

"On a un métier qui attire de moins en moins les jeunes et on est en train de nous charger la barque... C'est humiliant parce que le travail, on le fait", assure ce médecin de Mayenne, qui fait valoir que la durée de travail hebdomadaire d'un généraliste a été évaluée à 55 heures.

Pour le syndicat SML, "il est particulièrement grave de contraindre des médecins libéraux, dont une très grande partie ont plus de 60 ans, à prendre des gardes".

"Reprendre les consultations après une nuit sans sommeil, c'est comme travailler en alcoolémie positive", appuie Corinne Le Sauder, présidente de la Fédération des médecins de France (FMF) et généraliste dans le Loiret.

Pour exprimer leur mécontentement, les syndicats ont appelé à une grève des gardes depuis le 23 janvier, les participants au mouvement s'exposant à des réquisitions. Ils ont désormais en ligne de mire l'examen de la proposition de loi Rist par le Sénat à partir du 14 février, et ont d'ores et déjà prévu un rassemblement ce jour-là devant le palais du Luxembourg.

Parallèlement, ils fourbissent leurs propositions. Ils aimeraient notamment que le samedi matin soit aussi pris en compte au titre de la permanence des soins, afin d'obtenir une meilleure rémunération et parce que "les médecins veulent pouvoir avoir deux jours de repos, comme tout le monde", souligne MG France, premier syndicat de généralistes.

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Une perspective que le ministre de la Santé, François Braun, a semblé écarter, "pas certain que ce soit la meilleure solution" aux difficultés d'accès aux soins.

Avec AFP

 

 

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