La constitutionnalisation de l’IVG toujours en suspens

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La commission des Lois de l’Assemblée nationale a voté en faveur de la constitutionnalisation du droit à l’IVG, mais le parcours de l’éventuelle loi constitutionnelle reste semé d’embûches.

La constitutionnalisation de l’IVG toujours en suspens

© IStock

« Nulle femme ne peut être privée du droit à l’interruption volontaire de grossesse ». Cette phrase figurera peut-être un jour dans un futur article 66-2 de notre Constitution. Telle est la volonté exprimée en tous les cas par les députés de la commission des Lois de l’Assemblée nationale qui ont adopté mercredi dernier la proposition de loi visant à constitutionnaliser le droit à l’interruption volontaire de grossesse portée par Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale.

Cette proposition de loi sera débattue dans l’hémicycle à compter du 28 novembre prochain. Entre temps, l’Assemblée nationale examinera, à l’occasion de la niche parlementaire de l’opposition, prévue pour le 24 novembre, une proposition de loi de la Nupes allant dans le même sens, mais rédigée en des termes plus larges. Elle prévoit en effet d’inscrire dans le marbre de la Constitution que « nul ne peut porter atteinte à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception » et que « la loi garantit à toute personne qui en fait la demande l’accès libre et effectif à ces droits ».

Le RN partagé sur la constitutionnalisation de l’IVG

La proposition de loi constitutionnelle de la majorité a de fortes chances d’être adoptée à l’Assemblée où seuls Les Républicains y sont clairement opposés. Même le Rassemblement National, qui compte pourtant en ses rangs de nombreux militants anti-avortement, reste pour le moment sur « une ligne de crête » reconnait un des députés du parti.

Le parti d’extrême-droite a finalement renoncé à déposer des amendements lors de l’examen du texte en commission et aucune consigne de vote n’a été donnée aux élus du parti. Marine Le Pen aurait même demandé à ses troupes de s’abstenir de toute critique frontale contre le droit à l’avortement.

Malgré ce vote favorable probable, cette révision constitutionnelle a bien peu de chances d’aboutir. En effet, l’article 89 de notre Constitution dispose que toute révision constitutionnelle doit être adoptée dans les mêmes termes par l’Assemblée Nationale et le Sénat, sans possibilité de donner le dernier mot à la chambre basse comme pour une loi ordinaire.

Or, le 19 octobre dernier, la chambre haute a, par 172 voix contre 139, rejeté une proposition de loi constitutionnelle portée par la sénatrice écologiste Mélanie Vogel, rédigée en des termes identiques à la proposition de la Nupes. Pour justifier leur vote, les sénateurs, à majorité de droite, avaient expliqué que, bien qu’attachés au droit à l’avortement, ils n’estimaient pas nécessaire une révision constitutionnelle dans le contexte actuel.

S’inspirer des Etats-Unis oui, mais pas sur la démocratie

Si, par extraordinaire, la proposition de loi venait à être adoptée en termes identiques par les deux chambres, elle devrait ensuite faire l’objet d’un référendum. Une procédure que les partisans de la révision constitutionnelle préféreraient éviter. Pour cela, il faudrait que le gouvernement s’empare du sujet pour transformer la proposition en projet de loi.

Dès lors, le texte pourrait être adopté par le Congrès à la majorité des trois cinquièmes, sans passer par l’étape du référendum. Mais si l’exécutif s’est dit favorable à la constitutionnalisation du droit à l’IVG, il n’a pour le moment pas exprimé la volonté de faire sienne cette proposition de loi.

Rappelons que ces diverses propositions de révisions constitutionnelles ont été lancées à la suite de la décision du 24 juin dernier de la Cour Suprême des Etats-Unis de mettre fin à la protection constitutionnelle du droit à l’IVG, permettant ainsi à des Etats conservateurs de criminaliser à nouveau l’avortement. Mardi dernier, les habitants de Californie, du Vermont et du Michigan ont justement voté pour inscrire le droit à l’avortement dans la Constitution de leurs Etats.

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/diaporama/les-vrais-chiffres-de-la-medecine-et-la-feminisation

Utilisant ainsi cette voie du référendum qui fait si peur sur notre rive de l’Atlantique.

Nicolas Barbet
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