Générations de médecins : quand je serai grand, je serai docteur ?

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Ce sont 8 membres d’une même famille qui témoignent pour What’s up Doc, de la Métropole aux Antilles, dans une interview inédite de membres d’une lignée de médecins. Chez certains, un petit doute (de rien du tout) s’est immiscé avant de remplir les choix post-bac mais pour beaucoup, il n’a pas fait long feu . . .

Générations de médecins : quand je serai grand, je serai docteur ?

UN UNIVERS QUI SE CONSTRUIT DÈS L’ENFANCE

Fille, petite-fille et arrière-petite-fille de médecins, Marielle, interne en anesthésieréanimation à Brest, nous ouvre les portes de son univers familial pour mieux nous montrer comment il a influé sur les orientations professionnelles de chacun.

« Ce n’est pas anodin d’avoir eu des parents médecins car je les entendais beaucoup parler de leur métier quand j’étais enfant », nous raconte-t-elle avec un brin d’émotion dans la voix. Admirative, elle s’intéressait « aux histoires de patients » et avoue avoir été plongée très tôt dans cet univers-là. C’est ce qui a été décisif : « J’ai rapidement su que c’était le métier que je voulais faire » explique Marielle. Même si, pour elle, tous les enfants de médecins ne doivent pas nécessairement suivre cette voie car « il y a matière à ne pas être heureux en médecine. Les études sont longues et difficiles. Faire médecine parce qu’on est influencé par ses parents peut être une très mauvaise idée ». Un avis partagé par sa maman Mireille Dumoulin, médecin généraliste retraitée. Issue d’une famille de paysans, Mireille se souvient d’avoir choisi médecine sans pression. « J’étais la première personne de la famille à avoir eu le bac puis j’ai réussi médecine. Quelque part j’ai réalisé le rêve de mon père qui aurait voulu être médecin » nous confie-t-elle, le sourire aux lèvres. Pour elle donc, il n’était pas question d’imposer une orientation à ses enfants.

Pour le frère de Marielle, Manuel, « ce n’était pas un vrai choix délibéré » que de ne pas faire médecine comme sa sœur. En seconde, il a pris l’option sciences de l’ingénieur, regroupant un ensemble de disciplines dont ses professeurs lui avaient donné le goût. Fini les cours de SVT, place aux maths et à la physique où il était très à l’aise. Manuel avoue avoir eu tout de même une grosse réflexion en terminale, avant de mettre médecine en troisième choix. Impossible de ne pas y songer quand on a baigné dans une famille de médecins. Finalement, c’est son premier choix, une prépa scientifique, qui l’a emporté. Malgré tout, après sa première année, « Manuel a de nouveau hésité à faire médecine », se souvient Mireille.

Un souvenir qui en rappelle d’autres : Marc Dumoulin, le père, également médecin généraliste urgentiste, passionné par la médecine, revoit la scène d’un ado de 14 ans qui s’émerveillait devant le viaduc de Millau et qui déclarait avec certitude : « Je ferai ça plus tard ! ». C’est ainsi que Manuel est devenu ingénieur dans le bâtiment ; mais à force de côtoyer des médecins, il a fini par épouser Léa, interne en gynéco. Les médecins auront donc eu raison de Manuel, même si selon lui « il n’y avait pas de recherche freudienne ! ». Sa femme Léa, qui n’est pas issue d’une famille de médecins et qui, au départ, se voyait avocate, lâche en rigolant : « Je plains Manu qui est au milieu de tous ces médecins ! ». Heureusement, les repas de famille ne tournent pas uniquement autour de la médecine. « Globalement on a plein d’autres sujets ! » complète Léa.

UN MÉTIER DE CONVICTIONS

La cousine de Marielle, Alixe Lagrange, médecin anesthésiste en Martinique, a elle aussi baigné depuis l’enfance dans un univers médical. Pourtant, faire médecine ne s’est pas imposé à elle comme une évidence. « Ce n’était pas si simple de voir quel métier faire. Au départ, je voulais être instit’. J’aimais bien l’univers des enfants. » Or comme Marielle, l’hôpital était pour elle un milieu très familier. « Alors, je me suis dit pourquoi pas pédiatre » nous révèle Alixe, qui se rappelle avec un petit pincement au cœur ce que son père lui avait dit à l’époque : que médecine « ce n’était pas une bonne idée, que ce n’était pas un métier d’avenir ».

Un souvenir qui n’est pas partagé par son père, Jean-Léon, oncologue radiothérapeute, professeur émérite retraité de l’hôpital Henri-Mondor à Créteil. « Nous n’étions pas contre le fait qu’Alixe fasse médecine. Je ne voulais pas la pousser à faire le même métier que moi. En revanche, c’était certain que je voulais qu’elle choisisse des études d’un niveau élevé car on pensait qu’elle avait un fort potentiel » explique Jean-Léon. Cette volonté, c’est peut-être un héritage de sa propre histoire. Lui qui n’était pas issu de parents médecins, il se rappelle que dans sa jeunesse, il aurait bien voulu faire Sciences Po ; mais il n'était pas très bon en langues.

Après son bac, en mai 68, il y avait une sorte d’affolement du Gouvernement qui poussait les étudiants à s’inscrire rapidement à la fac. « Ce sont mes parents qui ont choisi pour moi et m’ont inscrit à la faculté expérimentale de médecine à Bobigny » nous confie Jean-Léon. Un choix imposé qu’il n’a tout de même pas regretté. Une histoire presque similaire pour son épouse Monique, sœur de Marc, qui s’est presque vue inscrite d’office en pharmacie par ses parents médecins. Elle n’était pas très emballée par ces études-là, elle aurait voulu être prof de gym. Puis finalement, après un internat en biologie, elle a trouvé sa voie comme pharmacienne biologiste hématologiste à l’hôpital SaintAntoine (AP-HP).

Très contente de sa carrière, maintenant achevée, elle conclut : « J’aurais pu être influencée par notre père militaire, médecin dans la Marine. C’était très stimulant, on voyageait beaucoup, c’était très sympa mais ça ne m’attirait pas plus que cela ». Ses sœurs, quant à elles, ont choisi la psychologie, comme quoi devenir médecin ne s’impose pas. C’est un métier de convictions. Et puis, qu’on se le dise, avec ou sans parents médecins, le concours reste le même. Toute la famille de Marielle est d’accord sur ce point.

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