Des traitements hors de prix et dangereux, une plainte collective en cours contre Hocine Sekkiou, adepte de médecine holistique

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Exercice illégal de la médecine, escroquerie, voire dérive sectaire : plaintes et signalements s'accumulent contre Complexus Care, un centre de santé holistique créé par un influenceur, près d'Aix-en-Provence, et proposant un suivi thérapeutique 100% à distance.

Des traitements hors de prix et dangereux, une plainte collective en cours contre Hocine Sekkiou, adepte de médecine holistique

Derrière cette haie, le centre Complexus Care, à Pélissane, où officie Hocine Sekkiou

© Google Street View

Leur cible : Hocine Sekkiou, adepte des médecines non-conventionnelles, et son entreprise, où exercent nutritionnistes et naturopathes, officiellement en "synergie" avec des médecins, en Belgique. Sans jamais avoir rencontré leurs patients, ces derniers prescrivent pourtant de lourds traitements médicamenteux, controversés voire interdits, comme l'avait révélé La Provence fin avril.

"Le parquet de Marseille confirme avoir été destinataire d'une plainte collective de 10 plaignants à l'encontre du centre de santé Complexus Care situé à Pélissanne. Cette plainte sera étudiée par le pôle spécialisé Santé publique", a indiqué le parquet.

La plainte a été déposée pour "abus de confiance et de faiblesse", "escroquerie" et "exercice illégal de la médecine", a précisé Me Maya Lahloul : "Mes clients se sentent honteux et ne comprennent pas comment ils ont pu se faire avoir par quelqu'un qui se présentait comme médecin, qui leur prescrivait des traitements lourds sans étude précise de leurs pathologies".

Hocine Sekkiou, qui se dit docteur en biochimie est connu pour ses vidéos santé sur Instagram

Attirés par le charisme d'Hocine Sekkiou, connu pour ses vidéos santé sur Instagram, des milliers de malades du monde entier ont fait appel depuis 2021 à ce centre de santé "holistique", supposé prendre en compte chaque patient dans sa globalité, "biologie, vécu et environnement". Avec la promesse d'une prise en charge pluridisciplinaire et individualisée.

Or, selon de nombreux témoignages recueillis, le suivi médical proposé était identique ou presque pour tous les patients, quelles que soient leurs pathologies, problèmes de thyroïde, infertilité ou Covid long. Et ce pour un coût exorbitant, pas couvert par la sécurité sociale.

"Hocine se vantait d'être docteur en biochimie et de répondre à l'errance médicale. J'ai bu ses paroles, avec lui j'avais l'impression d'être enfin écoutée", a confié à l'AFP une ex-patiente. Elle fait partie du groupe Facebook "Hocinegate", qui compte plus de 860 membres, où d'ex-patients témoignent de leurs mésaventures.

Après s'être vu prescrire des compléments alimentaires -voire de la DHEA, une hormone naturelle qui selon certains pourrait retarder le vieillissement-, elle reçoit une ordonnance d'un médecin belge pour un traitement de six mois au Medrol, un anti-inflammatoire stéroïdien normalement recommandé sur courte durée. Au risque d'affaiblir le système immunitaire, selon la base de données publiques des médicaments.

Le parquet de Marseille avait été alerté dès le 4 mai, par un signalement de l’ARS

"En voyant ces prescriptions, ma pharmacienne était effarée !", explique cette patiente souffrant d'un dérèglement thyroïdien. Après avoir déboursé 2 000 euros sur trois ans, notamment pour des analyses facturées 400 euros par un laboratoire belge, elle a déposé plainte début mars contre Hocine Sekkiou, pour "exercice illégal de la médecine", à Clermont-Ferrand.

Saisi donc d'une plainte collective, le parquet de Marseille avait été alerté dès le 4 mai, par un signalement de l'Agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte-d'Azur. De son côté l'ordre des médecins a été saisi pour exercice illégal de la médecine.

Quant à la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), elle a précisé avoir effectué un signalement auprès du parquet d'Aix-en-Provence. "M. Sekkiou dénigre les médecins classiques et se présente comme l'unique solution. On peut commencer à envisager une dérive sectaire", plaide Me Lahloul.

Hocine Sekkiou est aussi accusé de pressions voire de harcèlement par d’ex salariés

Outre ses méthodes sanitaires controversées, M. Sekkiou est accusé de pressions voire de harcèlement par d'ex-salariés, poussés notamment à interpréter des analyses dépassant leurs compétences : "Il fallait faire du chiffre en prenant un maximum de rendez-vous, jusqu'à huit par demi-journée", explique Charly, une ex-thérapeute de Complexus Care, qui emploie une vingtaine de salariés, principalement des femmes, payés entre 1 500 et 1 700 euros par mois.

Plusieurs ex-salariés préparent une plainte, soutenus par la CFDT S3C Provence-Alpes.

"Nous n'avons forcé personne à rejoindre le centre", se défend Abdnour Sekkiou, "membre de la famille proche" d'Hocine (NDLR: qui n'a jamais voulu s'exprimer auprès de l'AFP), qui se présente comme DRH du centre : "Si les personnes n'étaient pas contentes, elles n'avaient qu'à arrêter" le traitement.

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"Tous les praticiens (de Complexus Care) sont professionnels et reconnus dans leur profession", assure-t-il, précisant faire "entièrement confiance à la justice".

Avec AFP

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