Avec les médecins de garde au Samu, du premier soin par téléphone pour 80 à 110€ de l’heure

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800 appels en moyenne en 24 heures. Des permanenciers pour faire le premier tri, trois médecins du SAMU pour les urgences vitales, deux généralistes volontaires de garde pour gérer les autres cas. Bienvenue dans la Ruche.

Avec les médecins de garde au Samu, du premier soin par téléphone pour 80 à 110€ de l’heure

"Expliquez-moi ce qu'il se passe" : dans les locaux d'un Samu de la région parisienne, deux médecins généralistes se forment à la régulation médicale pour prêter main-forte aux 24 autres libéraux du département qui prennent en charge, 24h/24, les appels au 15 ne présentant pas d'urgence grave.

Au bout du fil : une dame avec des douleurs cervicales qui ne peut pas se déplacer ; une octogénaire qui explique "que tout va bien" mais qu'elle a des vertiges ; une jeune femme souffrant d'une sciatique ; un père face à son enfant asthénique et frissonnant.

En fin de matinée, "la ruche", installée dans les locaux du Samu, au centre hospitalier de Melun en Seine-et-Marne, a déjà reçu 334 appels (pour 800 en moyenne par 24h). En fonction de la nature des demandes, les permanenciers au bout du fil font le tri, renvoyant les dossiers aux trois médecins du Samu ou aux deux généralistes de permanence, accompagnés ce jour-là de deux novices en formation.

Selon les cas, les généralistes peuvent dispenser un simple conseil, orienter vers le médecin traitant, un médecin consultant sans rendez-vous, SOS médecins, les urgences... Mais aussi envoyer un infirmier (un dispositif expérimenté sur le département), une ambulance, les pompiers... Ils peuvent discuter des cas avec les médecins hospitaliers installés sur le même plateau, à quelques mètres.

Pour le Dr Fleury, venue se former, la régulation, "c'est une première". Casque sur la tête, elle écoute la conversation téléphonique d'une de ses collègues. Après des années en salariat, la généraliste vient de se "réinstaller" en libéral et avoue qu'elle ne s'attendait pas à "une telle pénurie de généralistes" sur le territoire.

Sa collègue plus expérimentée, consacre, elle, 50 heures par semaine à la régulation, "un mi-temps" par rapport à quand elle avait son cabinet, ironise-t-elle.

A l'autre bout du bureau, le Dr Tran se familiarise lui aussi avec les logiciels et les ressources médicales du secteur. Médecin remplaçant de 30 ans, il a décidé de dédier une demi-journée par semaine au 15 "pour diversifier son activité". Sur les 6 heures que dure la garde, il devra traiter, une fois formé, en moyenne une soixantaine de dossiers (une centaine s'il est le seul généraliste). Le tout pour 80 euros bruts de l'heure (avant déduction des cotisations sociales et des impôts), 90 euros en soirée et le week-end, 110 en nuit profonde.

Les plannings de jour ne sont remplis qu’à 50%

Sur le plateau, ces deux nouvelles recrues sont les bienvenues tant le recrutement, essentiellement via du bouche-à-oreille, est devenu difficile. "Les plannings de jour ne sont remplis qu'à 50%, ceux de la nuit et des week-end à 80%", détaille le Dr Thierry Cardinal, coordonnateur de l'association de régulation libérale pour la permanence des soins de la Seine-et-Marne.

C'est un fait : les libéraux ne sont pas assez nombreux à participer à la permanence des soins mais "obliger les généralistes à effectuer des gardes, c'est les obliger à fermer leur cabinet. Qui verra leurs patients ?", s'interroge-t-il.

Aujourd'hui retraité, il poursuit la régulation en cumul emploi-retraite comme six des 26 volontaires que compte désormais le département.

Les appels s'enchaînent : celui d'une infirmière scolaire pour une possible intoxication médicamenteuse, une personne triste (dont c'est le 1.612e appel au 15), une dame qui s'est fait arracher une dent et dont la mâchoire saigne, une mère pour son fils constipé.

"Aujourd'hui, la demande de conseils médicaux explose", note le Dr Cardinal, pointant du doigt "l'offre de soins déficitaire" mais aussi "une population plus inquiète, plus pressée".

Le 1er juillet, un nouveau dispositif baptisé "service d'accès aux soins" (SAS) fera ses débuts dans le département. Il vise à désengorger les urgences hospitalières, notamment en fournissant, dans les 48h, une consultation en ville pour les appelants du 15 qui en ont besoin.

"Mais sans plus de médecins sur le terrain, on continuera à dire allez aux urgences", s'inquiète le Dr Cardinal.

Avec AFP

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